Gabon
Comment préserver les forêts tropicales, poumon vert de la planète ? À Libreville, le "One Forest Summit" appelle à des financements innovants pour les pays concernés.
Poumon vert de la planète, la forêt africaine du bassin du Congo est la plus grande forêt tropicale du monde après l'Amazonie. Alors qu'elle stocke 40 milliards de tonnes de CO2 selon le centre de recherche scientifique CENAREST Gabon, elle représente un enjeu clef pour le climat et la biodiversité. Le Gabon fait partie des six pays qu'elle couvre.
Les forêts tropicales et leur préservation étaient au cœur du One Forest Summit début mars. Cette conférence internationale, coorganisée par la France et le Gabon, a rassemblé dans la capitale gabonaise, Libreville, dirigeants politiques, chefs d'entreprise, scientifiques et ONG d'une vingtaine de pays.
L'occasion de rappeler que les forêts africaines sont au premier plan désormais de la lutte contre le changement climatique selon Alfred Ngomanda, commissaire général du CENAREST Gabon. "C'est 10 ans des émissions de gaz à effet de serre globales qui sont actuellement stockés dans les forêts du bassin du Congo," fait remarquer ce grand spécialiste du sujet. "Au Gabon, c'est 100 millions de tonnes par an," précise-t-il.
Le financement au cœur des enjeux
Parmi les enjeux prioritaires du sommet : la question du financement. Le Gabon est l'un des rares pays à absorber plus de CO2 qu'il n'en émet et il souhaite voir rémunérer à leur juste valeur ses efforts environnementaux. "Le Gabon a travaillé pour réduire ses émissions de CO2," souligne Lee White, ministre gabonais de la Forêt, de la Mer et de l'Environnement.
"On a documenté la réduction de 90 millions de tonnes des émissions de CO2. On a comparé 2000 à 2009, avec 2010-2018, et on a réduit nos émissions de 90 millions de tonnes. Les données scientifiques ont été validées et les crédits (REDD+) ont enfin été validés en novembre 2022, pendant la COP de Charm el-Cheikh, la COP27", rappelle-t-il.
Concilier développement économique et protection de l'environnement, c'est le défi qu'entend relever ce pays toujours dépendant des revenus du pétrole. "Au Gabon, pays pétrolier, dans les 20 prochaines années environ, parce que les pays du G20 ont rempli l'atmosphère avec du CO2, il n'y aura plus de marché pour notre pétrole. On va être obligés de remplacer 50% de notre économie," explique Lee White.
88% du Gabon couvert par la forêt
Le Gabon a mis en place des politiques fortes pour défendre les forêts qui couvrent 88% de son territoire. Le parc de Pongara est l'un des 13 parcs nationaux créés il y a 20 ans pour protéger une faune et une flore d'une diversité exceptionnelle. Parmi les essences interdites d'exploitation, le Kevazingo, un bois emblématique du Gabon, rare et cher.
Alain Jessy Banguiya, écoguide au parc de Pongara, précise : "Le Kevazingo a un potentiel énorme pour les exploitants forestiers. Les Asiatiques l'utilisent de façon illégale. Donc le gouvernement a pris des engagements pour sa protection".
Éléphants de forêt, pangolins géants, gorilles des plaines, les parcs sont des refuges pour de nombreuses espèces menacées par le trafic illégal. Mais les gardes en charge de leur protection manquent de moyens.
Lutte contre le braconnage et la déforestation illégale
"La plus grande problématique, c'est le braconnage", indique Patrick Evezoo, conservateur du parc de Pongara. "Le braconnage des éléphants, le braconnage des espèces floristiques, ceux qui coupent le bois de manière illégale et il y a le braconnage des espèces halieutiques au niveau de la mer ; comme dans tous les autres parcs, on a besoin de beaucoup de moyens pour bien faire notre travail," explique-t-il.
Hors des parcs nationaux, l'exploitation de la forêt via des filières durables est une autre piste explorée par le Gabon. Il y a 10 ans, le pays a interdit l'exportation des grumes brutes, pour transformer le bois sur place, un produit à plus forte valeur ajoutée.
Un tiers du bois exploité dans les forêts du Gabon passe par une zone économique spéciale exemplaire en matière de gestion durable. Cette zone de Nkok accueille une centaine d'entreprises dont beaucoup liées à l'industrie forestière. Un service appelé Tracer permet de s'assurer que tout le bois qui arrive sur place est légal.
Du bois tracé et légal dans la Zone Économique de Nkok
"On va contrôler les documents en rapport avec l'existence légale du fournisseur, en rapport avec les droits d'accès aux ressources forestières du fournisseur. Après, nos équipes vont aller sur le terrain contrôler les pratiques," précise Serafin Ngouambe, coordinateur technique de Tracer-Nkok.
Lancée il y a dix ans, la Zone Économique Spéciale de Nkok a été certifiée pour sa neutralité carbone. Parmi les opérateurs récemment installés, la première usine en Afrique centrale à fabriquer des panneaux en aggloméré à partir de déchets de bois.
"Lorsque cette zone a été lancée, on utilisait le bois à 40%. Aujourd'hui, on arrive à utiliser la grume à 90% à travers la valorisation des déchets," souligne Waris Moulenda Fatombi, de la ZES de Nkok.
Gérer durablement les forêts tropicales et soutenir financièrement les pays exemplaires, des engagements pris à Libreville qui restent à mettre en œuvre pour l'avenir de tous.
10:59
L'actualité panafricaine du 18 novembre 2024 [Africanews Today]
01:58
COP29 : Guterres dénonce une "injustice intolérable"contre l'Afrique
01:44
COP16 : une espèce d'arbres sur trois menacée d'extinction, selon l'UICN
01:50
Kenya : à Wasini, la restauration des herbiers marins profite aux pêcheurs
01:08
Attaque à Ankara : des pays africains expriment leur soutien à la Turquie
01:33
COP16 : l'ONU appelle à des "investissements significatifs" pour la nature