Guinée
Deux leaders d'un collectif ayant organisé des manifestations qui ont fait cinq morts, selon le ministre de la Justice, ont été inculpés et écroués après être passés lundi devant un juge d'instruction d'un tribunal de la proche banlieue de Conakry.
Jeudi et vendredi, de sanglantes manifestations contre la junte, interdites par les autorités, ont fait "cinq morts (...) de nombreux blessés civils et militaires et d’importants dégâts matériels", selon un communiqué lundi de l'ancien procureur Alphonse Charles Wright, nommé début juillet Garde des Sceaux par la junte.
La junte présidée par le colonel Mamady Doumbouya, qui a renversé le 5 septembre le président Alpha Condé au pouvoir depuis plus de dix ans (2010-2021), a réquisitionné l'armée "pour le maintien de l'ordre", et procédé vendredi et samedi à des dizaines d'interpellations.
Parmi elles, celles d'Oumar Sylla alias Foniké Mangué et d'Ibrahima Diallo, deux leaders du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), coalition de partis, syndicats et organisations de la société civile à l'origine de la manifestation.
Les deux hommes, entendus dans l'après-midi par un juge d'instruction, ont été inculpés "de participation à un attroupement interdit, de pillages, de destruction de biens publics et privés, de coups et blessures volontaires" et écroués à la prison civile de Conakry.
Saïkou Yaya Barry, secrétaire exécutif de l'Union des forces républicaines (UFR) de l'ex-Premier ministre Sidya Touré, a lui aussi été inculpé et écroué. Neuf jeunes ont également été poursuivis pour les mêmes délits.
Le procureur a requis lundi une peine de six mois de prison avec sursis et d'une amende de 500 000 fg (60 euros) contre chacun d'entre eux. Le FNDC a dénoncé "une énième provocation et l'instrumentalisation de la justice" par la junte.
Le collectif, qui avait appelé à un autre mouvement de contestation le 4 août sur tout le territoire pour dénoncer la "gestion unilatérale de la transition" par la junte, a suspendu samedi les manifestations pour une durée d'une semaine "à la demande expresse" du chef de l'État bissau-guinéen Umaro Sissoco Embalo, président en exercice de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO).
La CEDEAO a par ailleurs appelé lundi dans un communiqué "les autorités guinéennes, la classe politique et la société civile à engager un dialogue inclusif afin de désamorcer la tension et de convenir d'un calendrier et de modalités raisonnables pour le rétablissement pacifique de l'ordre constitutionnel".
La veille, les "Forces vives de la nation", coalition de partis politiques, syndicats et organisations de la société civile, ont aussi exigé "l’ouverture immédiate d’un cadre de dialogue inclusif" et menacé de nouvelles manifestations à partir du 15 août 2022 sur toute l’étendue du territoire national.
S'exprimant jeudi à Bissau, Umaro Sissoco Embalo a assuré avoir convaincu la junte d'accélérer le retour à la démocratie de trois à deux ans, une information qui n'a pas été confirmée par les autorités guinéennes.
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