Colombie
La militante de gauche Francia Marquez ou l'universitaire conservatrice Marelen Castillo ? Pour la première fois dans son histoire, la Colombie aura pour vice-présidente une Afrodescendante, quel que soit le vainqueur du second tour du 19 juin.
Francia Marquez, 40 ans, est la colistière du sénateur de gauche et ex-guérillero Gustavo Petro, tandis que Marelen Castillo, 53 ans, est la doublure de l'inclassable millionnaire Rodolfo Hernandez, tous deux à égalité dans les intentions de vote pour le scrutin de dimanche.
L'une des deux succédera à la conservatrice Marta Lucia Ramirez (2018-2022) qui, après une longue carrière politique et un lent changement dans les mentalités, était devenue la première femme vice-présidente du pays.
Bien que 9,3% des 50 millions de Colombiens se reconnaissent comme noirs, peu d'entre eux occupent des postes de pouvoir, et encore moins des femmes. Une seule Afrodescendante est aujourd'hui au gouvernement et deux parlementaires noirs siègent parmi les 300 députés et sénateurs.
L'accession d'un Afrodescendant à la vice-présidence est "en termes politiques, symboliques et culturels, très important car la Colombie est un pays où le racisme est très fort", estime l'analyste Cristina Echeverri.
Francia Marquez, l'activiste
Cheveux crépus, tenue africaine et poing levé, Francia Marquez a fait campagne pour "ceux qui ne sont rien". "Ceux dont l'humanité n'est pas reconnue, ceux dont les droits ne sont pas reconnus dans ce pays, nous nous levons pour changer l'histoire", expliquait la féministe et écologiste dans une interview accordée à l'AFP en mars.
Née dans une famille pauvre du département de Cauca, dans le sud-ouest du pays, elle est devenue mère célibataire à 16 ans, a dû fuir sa région après des menaces de mort, a fait des ménages pour gagner sa vie et eu la ténacité d'étudier avant de se frayer un chemin en politique.
Défenseure de l'environnement, elle a survécu en 2019 à une attaque à la grenade et au fusil pour s'être opposée à l'exploitation minière. Un an plus tôt, elle avait reçu le prix Goldman, également connu comme le prix Nobel de l'Environnement.
Lors des primaires de la coalition de gauche, Francia Marquez a obtenu le deuxième plus grand nombre de voix (785 000) derrière Gustavo Petro (4,4 millions), qui l'a immédiatement choisie pour colistière.
Elle rassemble "l'environnemental, l'ethnique, le racial, la jeunesse, le féminisme" et elle "oxygène la politique traditionnelle", estime Cristina Echeverri. Avec son ascension, un racisme sous-jacent a également émergé au grand jour.
Depuis avril, Francia Marquez a été la cible de commentaires à caractère raciste dans les médias et sur les réseaux sociaux, selon l'Observatoire de la discrimination raciale de l'Université des Andes.
Marelen Castillo, l'universitaire
Fille d'une mère couturière noire et d'un père fonctionnaire blanc, Marelen Castillo est née dans un quartier pauvre de Cali (sud-ouest). Titulaire d'un doctorat en Sciences de l'éducation en Floride, aux Etats-Unis, elle était encore récemment "une parfaite inconnue", comme elle le reconnaît elle-même.
Mais "nous, parfaits inconnus, sommes les plus nombreux", aime à plaisanter cette mère de deux enfants au teint métissé et aux cheveux lissés. Elle raconte avoir envoyé son CV lorsqu'elle a appris que Rodolfo Hernandez recherchait "une femme afrodescendante de la côte Pacifique".
Marelen Castillo a également étudié la biologie, la chimie, l'ingénierie industrielle et avant son entrée en politique, elle présidait un établissement d'enseignement catholique de Bogota. Bien qu'elle se reconnaisse comme Afrodescendante, elle affirme n'avoir jamais été victime de racisme et évite d'aborder le sujet dans ses discours.
Durant la campagne, elle s'est efforcée d'adoucir les contours machistes de Rodolfo Hernandez qui considère comme "idéal" que les femmes assurent l'éducation des enfants et effectuent les tâches ménagères. "Je vais être le visage qui va soutenir les femmes", a-t-elle contrebalancé.
Au terme de cette campagne présidentielle disruptive qui a balayé les partis traditionnels, la future vice-présidente aura un "rôle critique et pertinent dans l'exercice du pouvoir", estime Diego Lucumi, expert des questions raciales à l'Université des Andes.
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