Burkina Faso
Une commission mise en place début février par la junte militaire qui a pris le pouvoir il y a un mois au Burkina Faso, a proposé une transition de 30 mois avant un retour à l'ordre constitutionnel.
Dans un rapport, la commission "propose 30 mois de transition dirigée" par le chef de la junte, le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, ainsi que "la mise en place d'un gouvernement et d'un organe législatif restreints, n'excédant pas respectivement 20 et 51 membres", a expliqué à l'AFP une source militaire, ce qu'a confirmé une source proche de la présidence.
Le rapport, un projet de charte et d’agenda de la transition, a été présenté mercredi au chef de la junte, mais son contenu n'a pas été rendu public. Il devra être soumis à la hiérarchie militaire et aux "forces vives" du pays - partis, syndicats et organisations de la société civile - avant toute validation, a indiqué la source proche de la présidence en confirmant la proposition de période de transition de 30 mois "avant la tenue d'élections générales et inclusives".
Suspension de la CEDEAO
La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui a suspendu le Burkina Faso de l’organisation le 28 janvier en raison du coup d’État ayant renversé le président élu Roch Marc Christian Kaboré, avait demandé à la junte de présenter un calendrier "raisonnable pour le retour à l’ordre constitutionnel".
La durée des transitions est au cœur des négociations entre les pays de la région touchés par les putschs et la CEDEAO qui réclame qu’elles soient les plus courtes possible. Elle a jugé "inacceptable" celle de cinq ans exigée par le Mali et ne cesse de réclamer un calendrier à la Guinée qui refuse de se voir imposer tout délai.
"La proposition de 30 mois faite par la commission semble peu pour sortir ce pays de cette insécurité qu'on vit depuis six ans", a estimé Salam Sampougdou, membre de la Coalition pour une transition réussie qui rassemble des organisations de la société civile soutenant la junte. Selon lui, "il aurait fallu prévoir une option pour une prolongation de la durée de la transition".
Directives de la junte
Interrogé par l'AFP, un dirigeant du parti du président renversé, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), a dit ne pas souhaiter réagir avant d'avoir la version officielle du rapport. En remettant son rapport à Paul-Henri Sandaogo Damiba, intronisé président et chef de l'État le 16 février par le Conseil constitutionnel, Mariame Ouattara, présidente de la commission, a expliqué qu'elle s’était "inspirée des directives données par la junte".
Des directives portant sur "la restauration de l’intégrité du territoire, la consolidation de la paix pour un retour des déplacés internes, la bonne gouvernance et le retour à un ordre constitutionnel nouveau". Outre le projet de charte et l’agenda de la transition, "nous avons jugé utile de joindre une charte des valeurs pour soutenir la refondation" voulue par la junte militaire, a-t-elle ajouté.
"L’œuvre de refondation dans laquelle nous sommes collectivement engagés s’appuiera sur une vision claire du devenir que nous voulons pour notre pays, un pays qui renoue avec la paix, la sécurité pour l’ensemble de ses concitoyens et une gouvernance vertueuse fondée sur les valeurs d’intégrité, de travail et de solidarité", a déclaré le lieutenant-colonel après la réception du rapport, cité par la présidence du Faso. Il a salué "l'engagement" de la commission qui, a-t-il affirmé, a travaillé "bénévolement et en toute indépendance".
Violence djihadiste
La commission était composée de 15 membres, dont des juristes, des sociologues, des économistes et des officiers. Le lieutenant-colonel Damiba, 41 ans, a pris le pouvoir le 24 janvier à Ouagadougou après deux jours de mutineries dans plusieurs casernes du pays, en renversant le président Kaboré, accusé notamment de pas avoir réussi à contrer la violence djihadiste qui frappe le Burkina Faso depuis près de sept ans et a fait quelque 2 000 morts et 1,5 millions de déplacés.
Il a mis en place une junte appelée Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) qui a pour priorité "la sécurité". Un mois après le putsch, le président Kaboré est toujours en résidence surveillée à Ouagadougou, en dépit des appels à sa libération de la communauté internationale.
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