Arabie Saoudite
Après un été de transferts records, le coup d'envoi du championnat saoudien vendredi suscite un intérêt inédit mais également des critiques du royaume pétrolier soupçonné de vouloir embellir son image grâce au sport.
Plusieurs clubs ont attiré cet été des stars du football mondial, de l'attaquant Karim Benzema, au milieu de terrain Fabinho en passant par l'ailier Sadio Mané, après la signature de Cristiano Ronaldo à Al-Nassr en janvier dernier.
Le mois dernier, Al-Hilal a même proposé 300 millions d'euros au Paris Saint-Germain pour recruter Kilian Mbappé, mais l'attaquant français a refusé de rencontrer les dirigeants pour discuter d'un éventuel transfert.
"L'Arabie Saoudite rêve de devenir la Premier League anglaise", explique Simon Chadwick, professeur d'économie du sport à Skema Business School. "Les médias lui accordent de l'attention et certains fans de foot se demandent sur quelle chaîne ils pourront regarder la Saudi Pro League", a-t-il ajouté.
En France et en Afrique, c'est la chaîne Canal+, bien connue des amateurs de foot, qui a obtenu les droits de diffusion du championnat pour les deux prochaines saisons.
Seulement cinq ans après avoir ouvert ses frontières à des touristes non-musulmans et avoir autorisé la conduite aux femmes, l'Arabie Saoudite tente d'ouvrir sa société conservatrice et longtemps fermée à l'étranger.
Le plus grand exportateur de pétrole du monde a dépensé des centaines de millions d'euros dans le sport : le transfert de Cristiano Ronaldo, le Grand Prix de Formule 1 de Djeddah ou le lucratif circuit de golf LIV Series par exemple.
Ces initiatives font partie des grands projets du prince héritier Mohammed ben Salmane visant à moderniser l'économie saoudienne et à réduire sa dépendance au pétrole.
Le royaume souhaite que "la boussole du football professionnel pointe vers le Moyen-Orient et le monde arabe", selon Moqbel Al-Zabni, rédacteur en chef du journal Al Riyadiah. La signature de la star Cristiano Ronaldo en janvier à Al-Nassr, club basé à Riyad, capitale du pays, a attiré l'attention du monde entier sur la Saudi Pro League.
Le royaume, grâce à des salaires mirobolants, a depuis séduit aussi bien des stars confirmées que des joueurs en progression et des entraîneurs de haut niveau.
"Je travaille dans le sport depuis 40 ans et je n'ai jamais vu un projet aussi grand et aussi ambitieux", a dit à la BBC le réalisateur britannique Peter Hutton, qui siège au conseil d'administration de la ligue saoudienne.
Pep Guardiola, entraîneur de Manchester City, a lui affirmé que le championnat saoudien avait "complètement changé le marché" et s'attend à ce que d'autres joueurs suivent le mouvement, les 18 équipes engagées pouvant avoir chacune huit étrangers.
Pour certains, ces investissements servent aussi à détourner l'attention de la situation des droits humains en Arabie saoudite.
"La plupart des gros titres portent sur les transferts de grands joueurs en Arabie Saoudite et non sur les longues peines de prison infligées à des militants", a déclaré à l'AFP un diplomate occidental en poste à Riyad, sous couvert d'anonymat.
"Il y a des défis à relever à tous les niveaux", a-t-il ajouté, notamment en ce qui concerne le respect des contrats et des droits des nouveaux joueurs.
En juin, la FIFA a infligé à Al-Nassr une interdiction de transfert, en raison du non-paiement d'indemnités pourtant dues au club anglais de Leicester après le transfert du Nigérian Ahmed Musa.
Le football saoudien a encore beaucoup à faire selon Simon Chadwick."Nous devrons probablement attendre les cinq à dix prochaines années avant de déterminer s'il se produit un changement durable", dit-il.
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