Algérie
Des milliers de manifestants ont défilé lundi à Alger, et d'autres rassemblements ont eu lieu dans le pays, pour le deuxième anniversaire du Hirak, mouvement populaire qui tente de se relancer après un an d'interruption dû à la crise sanitaire.
Il s'agit du cortège le plus imposant dans la capitale depuis la suspension des marches du Hirak mi-mars 2020 à cause de la pandémie de Covid-19, selon des journalistes de l'AFP.
"Nous ne sommes pas venus pour célébrer (le 2e anniversaire du Hirak), mais réclamer votre départ", ont scandé les protestataires, en référence au régime auquel ils s'opposent depuis deux ans.
"L'heure fatidique a sonné", pouvait-on lire sur une pancarte à Alger.
Des barrages de police ont été mis en place sur plusieurs axes routiers menant à la capitale et un impressionnant dispositif policier a été déployé en centre-ville.
Malgré ce dispositif, des protestataires ont commencé à se rassembler à la mi-journée.
La police, qui a essayé de les empêcher d'avancer vers la Grande Poste, lieu de rassemblement emblématique du Hirak, a procédé à des interpellations, parfois musclées.
- Manifestations en province -
Des marches ont eu lieu également à Annaba, Oran, Béjaïa, Sétif, Bouira, Mostaganem, Constantine et Tizi Ouzou, selon les réseaux sociaux et des témoignages recueillis par l'AFP.
Afin d'éviter les embouteillages, certains Algérois sont sortis à l'aube pour rejoindre leur travail.
"Je suis venus de Hamadi (à l'est d'Alger). J'ai dû démarrer à cinq heures du matin. Deux heures et demie de bouchon pour arriver dans le centre à cause des barrages. Ils vérifient chaque voiture", a expliqué Hamid, un fonctionnaire de 54 ans.
Quant à Fatma Zohra, une banlieusarde de 50 ans, elle a passé la nuit chez sa soeur à Alger pour "éviter de (se) retrouver coincée pendant des heures". Son autre sœur a "pris un jour de congé".
- Contre le "système" -
Déclenché le 22 février 2019, le Hirak, mouvement de protestation populaire inédit, avait poussé Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis deux décennies, à la démission deux mois plus tard.
Ce mouvement pacifique a dû suspendre en mars 2020 ses manifestations hebdomadaires en raison de l'épidémie de coronavirus.
Mais il continue de réclamer le démantèlement du "système" en place depuis l'indépendance en 1962, synonyme à ses yeux d'autoritarisme et de corruption.
Si le régime -le président Abdelmadjid Tebboune en tête- rend régulièrement hommage au "Hirak authentique béni", il considère que ses revendications sont désormais satisfaites, qualifiant aujourd'hui ses partisans de "magma contre-révolutionnaire".
Dans de récentes interviews, le ministre de la Communication Ammar Belhimer a affirmé que l'Etat algérien avait "satisfait les revendications légitimes (du Hirak) dans des délais record" et mis en garde contre les appels à sortir dans la rue.
Cet anniversaire survient au lendemain d'une série de décisions du président Tebboune, qui s'efforce de reprendre l'initiative, après une longue hospitalisation en Allemagne, face à une triple crise, politique, économique et sanitaire.
- Grâce présidentielle -
Jeudi, M. Tebboune a décrété une grâce en faveur d'une soixantaine de détenus d'opinion, dans un geste d'apaisement.
Comme promis, M. Tebboune a procédé dimanche à un remaniement gouvernemental, très attendu mais sans changement majeur.
Le Premier ministre Abdelaziz Djerad, pourtant critiqué, reste à son poste ainsi que les détenteurs des ministères régaliens. C'est le cas du ministre de la Justice, Belkacem Zeghmati, symbole de la lutte anticorruption mais aussi de la répression judiciaire.
Avant de s'envoler pour Berlin début janvier pour se faire soigner de "complications" post-Covid, M. Tebboune avait exprimé publiquement son insatisfaction de l'action du gouvernement Djerad.
M. Tebboune a également dissous dimanche l'Assemblée nationale, chambre basse du Parlement, ouvrant comme prévu la voie à des législatives anticipées dans les six mois. Aucune date n'a encore été fixée pour le scrutin, mais juin est évoqué.
"Le remaniement ne me concerne pas, ce sont les mêmes pions. C'est la même chose pour le Parlement, les nouveaux (députés) travailleront comme le régime actuel pour leurs propres intérêts. (...) Pas pour le peuple", a déclaré à l'AFP Zaki Hannache, militant de 33 ans.
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