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#EndSARSNow : victoire pour la jeunesse nigériane

Manifestation contre la brigade spéciale SARS, à Ikeja, le 8 octobre 2020.   -  
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PIUS UTOMI EKPEI/AFP or licensors

Nigéria

Les autorités nigérianes ont annoncé dimanche la dissolution d'une unité spéciale de police controversée après une semaine de forte mobilisation de la jeunesse, portée par les grandes stars du cinéma et de la musique du pays notamment sur les réseaux sociaux.

"La brigade spéciale de répression des vols (SARS) a été dissoute avec effet immédiat", a fait savoir la présidence sur son compte Twitter.

De son côté, la police a assuré que les officiers de la SARS seraient redéployés dans d'autres brigades criminelles, et qu'une "unité spéciale de surveillance des crimes commis à l'encontre des citoyens" sera mise en place.

Depuis plus d'une semaine, les Nigérians exigaient la dissolution de la SARS, une unité spécialisée pour les crimes importants (vols, assassinats, parfois kidnappings...) mais accusée d'extorsion de la population, d'arrestations illégales, de torture et même de meurtre.

"Nous avons gagné!" a lancé Wizkid, star de l'Afropop nigériane, lors d'un rassemblement de plusieurs centaines de personnes devant l'ambassade du Nigeria à Londres, où vit une importante communauté nigériane.

"Votre voix a été entendue, c'est un nouveau Nigeria, nous n'avons pas peur de parler", a lancé devant la foule le chanteur âgé de 30 ans, qui compte près de 20 millions de d'abonnés sur Instagram et Twitter réunis.

"C'est fantastique, mais nous devons maintenant être sûrs que les promesses seront tenues et que les chefs de la SARS ne seront pas à la tête d'autres brigades policières", a déclaré Aminat Sule, 20 ans, l'un des organisateurs de la manifestation.

"L'annonce de cette dissolution n'est pas suffisante pour avoir la garantie de transparence et que tous les agents de police, de la SARS et des autres unités, soient condamnés s'ils commettent des abus", a commenté le directeur d'Amnesty International au Nigeria, Osai Ojigho.

- #EndSARSNow -

La contestation est née sur les réseaux sociaux après la diffusion d'une vidéo montrant des agents présumés de la SARS tuant un homme à Ughelli, dans l'Etat du Delta (sud). Elle a rapidement pris de l'ampleur, lorsque toutes les plus grandes célébrités du pays se sont engagées dans le mouvement #EndSARSnow.

Certains comme les chanteurs Runtown ou Falz avaient même appelé les Nigérians à descendre dans la rue et organisé des manifestations à Lagos, en lançant un appel à leurs fans.

Le Nigeria, pays de 200 millions d'habitants est leader de la scène culturelle en Afrique subsaharienne, et ses stars de la musique et de Nollywood sont extrêmement populaires dans toutes les classes de la population nigériane.

Ils avaient souvent été critiqués pour ne pas s'engager dans les questions sociales, à l'instar de Fela Kuti, le père de l'Afrobeat qui a passé sa vie à dénoncer la corruption des élites.

"Depuis Fela, personne n'avait vraiment pris la parole, parce que ces artistes vivent dans un monde privilégié, avec de l'argent, un environnement différent de leurs fans", explique à l'AFP le journaliste nigérian Oris Aigbokhaevbolo.

"Mais ils voient aujourd'hui que la jeunesse attend d'eux qu'ils s'engagent, ils ont besoin de leur voix pour se faire entendre", poursuit cet éditorialiste du site de référence Music in Africa.

- Tournant-

Le mouvement #EndSARSnow marque un véritable tournant, certains acteurs ou chanteurs n'hésitant pas à interpeller les politiques ou le président Muhammadu Buhari ouvertement sur les réseaux sociaux.

Les violences policières au Nigeria, étaient devenues le sujet le plus partagé au monde vendredi en fin d'après-midi sur les réseaux , selon le classement "Trending" de Twitter.

La star d'afropop Burna Boy (5,7 millions d'abonnés sur Instagram) a aussi acheté samedi de giganstesques espaces publicitaires d'une dizaine de mètres de haut, pour y afficher le slogan #EndSARSNow à travers le Nigeria

Dans les rues du pays, le mouvement n'a rassemblé que quelques centaines de personnes, essentiellement des jeunes, dans plusieurs grandes villes du sud du pays, ainsi qu'à Abuja.

Mais des rassemblements de ce type sont extrêmement rares au Nigeria où les manifesfations sont souvent réprimées dans le sang.

Si les rassemblements ont pu se dérouler dans le calme à Lagos, la capitale économique du pays, ils ont fait deux morts dans l'Etat du Delta (sud), un manifestant et un policier.

Ils ont été également été sévèrement réprimés dans l'Etat d'Oyo ou à Abuja, la capitale fédérale, où plusieurs manifestants ont été arrêtés.

Manon Fouriscot, cofondatrice d'Afriques Connectées, souligne notamment la force d'"une utilisation rapide et massive des réseaux sociaux, une mobilisation active des stars nationales, un passage d'une mobilisation online à un mobilisation off line dans la rue", qui constitue selon cet organisme panafricain d'analyse des réseaux sociaux, un "cas d'école" sur le continent.

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