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Séisme au Maroc : sauver des vies, une "course contre la mort"

Séisme au Maroc : sauver des vies, une "course contre la mort"
Une victime est transportée par des secouristes à Talat N'yakoub, au Maroc, le 11 septembre 2023   -  
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Fernando Sanchez/AP

Maroc

Quand un séisme comme celui qui a touché le Maroc frappe, les secouristes engagent ce que certains d'entre eux désignent comme une "course contre la mort", où chaque seconde, chaque geste, peut sauver une vie. Des missions d'urgence périlleuses et parfois traumatisantes.

Les secouristes sont unanimes : les premières heures et les tout premiers jours qui suivent un séisme sont déterminants. Avant même l'arrivée des secours, Éric Zipper, président de l'ONG Corps mondial de secours (CMS), dépeint trois phases : "une où les survivants blessés mais pas enfouis s'entraident, puis une phase de terreur, d'hébétude et enfin une phase où la population s'organise pour sa survie, trouve de quoi se chauffer, se loger, etc."

Les zones sinistrées, parfois reculées, loin des grandes villes ou dans les montagnes, sont souvent difficiles d'accès.

Au préalable, ONG et organes de secours étatiques s'organisent : le CMS, par exemple, a constitué une équipe d'une dizaine de médecins et secouristes et récolté 200 kg de médicaments d'urgence prêts à être acheminés jusqu'au Maroc quelques heures après le séisme de vendredi, qui a fait plus de 2 800 morts.

La Sécurité civile française possède trois unités spéciales totalisant 1 500 militaires, rapidement mobilisables. Ils sont formés entre autres au "sauvetage déblaiement" pour déblayer "des structures en béton dans laquelle il y a des poches de vies", rapporte le commandant Frédéric Harrault, chargé de mission au ministère de l'Intérieur.

Sous les décombres, il existe deux types de victimes : celles qui sont ensevelies, compressées par des matériaux et dont l'espérance de vie est moindre, et celles dites emmurées, prisonnières d'espaces clos mais qui peuvent bouger. Ces victimes peuvent mourir d'une hémorragie, du froid ou de la chaleur.

"En Turquie, cette année, des personnes sont mortes à cause des températures extérieures qui chutaient jusqu'à -15°C, d'autres car elles ne pouvaient pas prendre leur traitement médical alors qu'elles avaient des maladies cardiaques ou étaient diabétiques. Les causes sont multiples et plus on attend, plus il y a de morts", témoigne M. Zipper.

Leur moral joue un rôle déterminant : "Des personnes sont capables de gérer correctement l'attente, de garder espoir. D'autres cèdent à la panique et là, c'est plus dangereux", explique le président du CMS.

Les témoignages constituent la source principale des secouristes pour repérer les endroits où des survivants peuvent être enfouis. "Il faut toutefois rester vigilant : avec le désespoir, des personnes nous indiquent des endroits où elles ont entendu des voix de membres de leur famille la veille, mais qui sont en réalité déjà morts depuis quelques jours."

Outre les témoignages, les sauveteurs ont également recours à des chiens ou des appareils de détection, comme des caméras endoscopiques. S’infiltrer entre les dalles et les gravats pour secourir une personne est un exercice d'équilibriste dangereux, notamment à cause du risque de répliques sismiques.

"C'est comme si on était devenu tout petit et qu'on se déplaçait dans un mikado où il y a des murs que l'on ne doit surtout pas toucher et des plaques sur lesquelles on ne doit pas marcher", considère Éric Zipper, qui compte plus de 30 ans d'expérience de secourisme.

Quand des immeubles s'effondrent, il faut découper ou déplacer les couches de béton "comme on épluche une orange" avec des tractopelles ou des tronçonneuses à béton.

Pour les secouristes, l'impact psychologique d'une mission est souvent la phase la plus compliquée à gérer. "On sort des vivants, mais aussi des morts", témoigne le commandant Harrault, qui souligne que tous les pompiers et militaires de l'État peuvent bénéficier d'un suivi psychologique.

La première semaine du retour, l'ONG Corps mondial de secours appelle chaque jour le secouriste, puis espace peu à peu ses appels. Si nécessaire, il sera envoyé dans une unité psychologique.

"Ce qui me retravaille le plus, ce sont les regards. Celui d'un enfant qui me regarde quand je vais sauver ses parents. Ou celui de ce monsieur qui me fixe avec désespoir quand je sors sa femme, morte, des gravats", témoigne le président du CMS.

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