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Tigré : des soldats érythréens accusés du massacre de civils à Aksoum

Une femme s'appuie sur le mur d'une maison bombardée lorsque les forces fédérales sont entrées dans la ville de Wukro, au nord de Mekele, le 1er mars 2021.   -  
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EDUARDO SOTERAS/AFP or licensors

Ethiopie

La commission éthiopienne des Droits de l’Homme (EHRC) accuse des soldats érythréens d’avoir tué des centaines de civils au Tigré, fin novembre dernier. Dans un rapport publié ce mercredi, l’EHRC avance que ces massacres pourraient constituer un crime contre l’Humanité.

Cet organisme indépendant rattaché au gouvernement éthiopien rejoint les conclusions d’Amnesty International et de Human Rights Watch. Selon l’EHRC, de graves violations aux droits de l’Homme ont été commises le 28 et 29 novembre dernier, dont le massacre d’une centaine d’habitants d’Aksoum, la ville sainte du nord du Tigré.

"Les informations recueillies au cours de cette enquête préliminaire confirment que pendant les journées du 28 et 29 novembre, de graves violations des droits de l'homme ont été commises et qu'à Aksoum, plus d'une centaine d'habitants (...) ont été tués par des soldats érythréens", affirme l'EHRC, en précisant que ces chiffres ne sont pas définitifs. "Ces graves violations des droits humains pouvant constituer des crimes contre l'humanité ou des crimes de guerre". L'EHRC souligne "la nécessité d'une enquête approfondie sur la situation générale des droits humains dans la région du Tigré".

@EthioHRC & @UNHumanRights acceptent de mener une enquête conjointe sur les violations des droits de l'homme et les abus présumés commis par toutes les parties au Tigré.

Depuis le 4 novembre, cette région est le théâtre d’affrontements après le début d’une intervention militaire déclenchée par le Premier ministre éthiopien. Après des mois de démentis officiels, Abiy Ahmed a reconnu ce mardi la présence sur le territoire éthiopien de troupes venues de l’Érythrée. Il a toutefois jugé "inacceptables" les atteintes aux civils commises dans la région par les deux armées.

Depuis plusieurs semaines, les récits de massacres et de violences sexuelles perpétrés par les forces pro-gouvernementales, éthiopiennes comme érythréennes, se multiplient. Les événements qui se sont déroulés les 28 et 29 novembre à Aksoum, ville sainte du nord du Tigré classée au patrimoine mondial de l'Unesco, constituent une des "atrocités parmi les pires documentées à ce jour dans ce conflit", estimait Amnesty International en février.

Pires violences

L'EHRC a pu se rendre à Aksoum, ce que n'avaient pu faire Amnesty et HRW, forcées d'enquêter à distance. Elle a recueilli les témoignages de survivants, de témoins, de responsables locaux et de personnels médicaux, ainsi que "des preuves matérielles dont des (preuves) vidéo, audio et photo".

Les pires violences ont commencé le 28 novembre, au lendemain de l'arrivée de troupes érythréennes dans la ville. "Les soldats érythréens ont fait du porte-à-porte pour demander aux femmes où étaient leurs maris ou leurs enfants et leur disaient de faire sortir leurs fils si elles en avaient", indique le rapport. Les témoignages glaçants d'exécutions sommaires évoquent une mère tuée alors qu'elle courait retrouver sa fille, des hommes exécutés sous les yeux de leurs femmes et de leurs enfants, ou d'autres encore abattus alors qu'ils voulaient récupérer des corps de victimes dans la rue...

Dans ce climat de terreur, des cadavres sont restés plusieurs jours dans les rues, parfois déchiquetés par des animaux. Certains de ces actes visaient spécifiquement les Tigréens. Un témoin raconte ainsi que des soldats érythréens, en fouillant des maisons, "ont trouvé deux résidents dont ils ont établi qu'ils ne pouvaient pas parler le tigrinya (la langue locale) et ils les ont laissés partir, tandis qu'ils ont sorti les autres du bâtiment et les ont abattus".

Les graves violations des droits humains à Aksoum, y compris les meurtres ciblés de civils devant leurs familles, les violences sexuelles, la destruction et le pillage, soulignent la nécessité d'une enquête approfondie sur les droits humains au Tigré.

Communauté internationale

Les habitants d'Aksoum ont également "déploré" l'inaction des forces éthiopiennes alors que les troupes érythréennes profanaient les églises de la ville ancienne. La commission éthiopienne des Droits de l’Homme rapporte également des pillages d’hôpitaux à partir du 19 novembre. Les autorités d’Asmara rejettent toujours les accusations de massacres à Aksoum.

L'ONU et la communauté internationale s'alarment des récits venant du Tigré, et ont demandé le départ des troupes érythréennes de la région. Le président américain Joe Biden a envoyé un émissaire à Addis Abeba pour faire part à Abiy Ahmed de ses "graves inquiétudes" sur "la crise humanitaire et les violations des droits de l'homme" au Tigré. Son secrétaire d'État Antony Blinken avait évoqué mi-mars lors d'une audition parlementaire des "actes de nettoyage ethnique", qu'avaient démentis le gouvernement éthiopien.

La Haut-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme Michelle Bachelet a demandé début mars une "enquête objective et indépendante" après avoir "corroboré de graves violations" susceptibles de constituer des "crimes de guerre et des crimes contre l'humanité".

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