Ouganda
Les tensions sont loin de s’estomper entre l’Ouganda et le Rwanda. Accusé de soutenir les groupes rebelles opposés au gouvernement rwandais, le chef de l’Etat ougandais Yoweri Museveni a adressé un courrier à son homologue Paul Kagame dans lequel il décline toute responsabilité.
La lettre datée du 10 mars a été rendue publique par les médias ougandais contrôlés par le gouvernement. Dans ce courrier dont l’authenticité a été confirmée par un responsable de la présidence ougandaise, Yoweri Museveni adopte un ton plus conciliant en vue d’apaiser les tensions croissantes avec son voisin rwandais.
En premier lieu, le dirigeant ougandais nie toute collaboration avec des rebelles rwandais, assurant qu’il « est hors de question que l’Ouganda soutienne des ennemis du Rwanda ». Depuis quelques semaines, en effet, Kigali accuse Kampala de prêter main forte au Congrès national du Rwanda, un groupe d’opposition en exil dirigé par l’ancien chef de l’armée rwandaise Kayumba Nyamwasa.
Ce dernier vit présentement en exil, en Afrique du Sud, où il a déjà échappé à deux tentatives d’assassinat qu’il attribue aux autorités rwandaises. Information démentie par Kigali qui reproche plutôt à l’ex-chef de l’armée d‘être derrière des rebelles actifs dans l’est de la République démocratique du Congo.
Si Museveni reconnaît bien avoir récemment rencontré un membre du Congrès national du Rwanda qui sollicitait l’aide de l’Ouganda, il nie cependant avoir conclu un quelconque deal. D’un autre côté, le dirigeant ougandais a également rencontré le magnat de l’industrie du tabac Tribert Rujugiro, également ennemi juré du régime rwandais. Tribert Rujugiro, qui vit en exil en Ouganda est accusé de soutenir les rebelles opposés à Kagame. L’usine de tabac qu’il tient en Ouganda est du reste l’un des points saillants du litige entre le Rwanda et l’Ouganda.
Alors que les autorités rwandaises exigent la fermeture de l’usine et le gel des avoirs de l’industriel, Museveni souhaite avant tout que la justice de son pays confirme que M. Rujugiro exerce des activités « terroristes » avant d’envisager le gel de ses avoirs. « Kagame sait que si je décidais d’aider les rebelles à se battre contre lui, il faudrait moins de six mois pour le vaincre », avait ironisé, dimanche, l’homme d’affaires dans une interview avec le média ougandais New Vision.
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La lettre de Yoweri Museveni à son homologue rwandais devrait toutefois permettre de ramollir les positions après des jours d’escalade verbale faisant craindre d’un éventuel conflit armé. « Ceux qui tentent de déstabiliser notre pays ne connaissent pas notre capacité », avait lancé le président Museveni, aussitôt recadré par Paul Kagame. « Personne ne peut me mettre à genoux », avait renchéri l’homme fort de Kigali.
Bien avant, le Rwanda a fait fermer un poste frontalier crucial pour le commerce entre les deux pays ; une action qualifiée par l’Ouganda d‘« embargo commercial ». Les citoyens rwandais ont par ailleurs reçu de leur pays l’interdiction de se rendre en Ouganda.
Ces tensions entre les deux pays viennent sans aucun doute exacerber un climat de méfiance déjà alarmant dans la région, alors que le Burundi et le Rwanda se regardent en chiens de faïence. Pis, de l’analyse de l’Institute of Security, un groupe de réflexion basé en Afrique du Sud, ces problèmes « pourraient conduire à un autre conflit indirect dans l’est de la RDC », transformé au fil des ans en une région sans foi ni loi.
C’est d’ailleurs de cette région qu’est partie l’hostilité que développent depuis des années Yoweri Museveni et Paul Kagame. Courant 1990, les armées ougandaise et rwandaise sont entrées en guerre dans l’est de la RDC en soutenant des groupes rebelles rivaux qui exploitent les ressources naturelles de cette partie du pays. Ce conflit indirect entre les deux hommes a ainsi sonné le glas d’une vieille collaboration lorsque Museveni était encore le parrain de Kagame. Ce dernier a d’abord été un agent du renseignement ougandais lorsqu’il servait comme commandant dans l’armée ougandaise. Puis, avec l’aide de l’Ouganda, il avait réussi, avec son groupe rebelle, à renverser le régime rwandais, en 1994.
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