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"Danser pour résister" : en Haïti, l’art défie la violence des gangs

Un monument à la mémoire de Baron Samedi et Gede lors d'une cérémonie en l'honneur de l'esprit vodou haïtien au cimetière national de Port-au-Prince, Haïti,1er novembre 2021   -  
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Haïti

Dans la verdure d’un jardin de Pétion-Ville, un quartier relativement épargné par les assauts des bandes criminelles, vingt danseurs de tous âges ont offert une performance singulière. L’événement, intitulé « Dance is life », était dirigé par Pascale Durosier, chorégraphe et professeure de danse, qui a su transformer ses propres blessures en un souffle collectif d’espérance.

Ancienne propriétaire d’un studio de danse au centre de Port-au-Prince, Pascale Durosier avait dû fermer son école il y a trois ans, sous la pression des violences quotidiennes. Elle raconte :

« Pour moi, la danse est un langage. C’est la manière d’exprimer ce que je porte en moi, ce que je ne peux pas dire à voix haute. C’est ma façon de me libérer, d’oublier tout le reste et de trouver la force d’affronter la situation. »

Plus qu’une simple pratique artistique, cette rencontre est un acte de résistance culturelle. Depuis la cérémonie du Bois-Caïman au XVIIIe siècle — considérée comme l’étincelle de la révolte des esclaves, qui aboutit à l’indépendance d’Haïti en 1804 — danse, tambours et rituels vaudou ont incarné un souffle de puissance et de liberté. Pascale Durosier explique :

« La danse est dans notre sang. Nous ressentons les tambours, cette connexion intime avec la musique. Et qu’est-ce qui a nourri notre indépendance ? La cérémonie du Bois Caïman. Là, il y avait la danse Petro, les tambours, les esprits à nos côtés. C’est à travers la danse que tout a commencé. Pour moi, la danse est une révolution. Pour les Haïtiens, elle doit incarner la puissance et l’identité, la conscience de qui nous sommes. »

Aujourd’hui, alors que près de 90 % de Port-au-Prince sont sous le contrôle de gangs criminels, selon l’ONU, et que la violence s’étend aux régions auparavant paisibles, la danse devient un repère vital pour ceux qui y participent. À Pétion-Ville, ces artistes perpétuent un héritage profondément enraciné :

Héritière des traditions venues d’Afrique de l’Ouest et du syncrétisme vaudou, la danse rappelle sans cesse aux Haïtiens leur histoire de lutte et d’émancipation, précieux ancrage face à la peur et à l’insécurité.

Dans un contexte où la vie quotidienne est dictée par la crainte, ces performances rappellent que l’art n’est jamais neutre. Il est langage, mémoire et résistance.

La danse haïtienne, riche de ses racines culturelles et spirituelles, continue de battre le rythme d’une identité forte et d’un espoir intact, même au cœur du chaos.

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