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Soudan : les maternités à l'épreuve de la guerre

Cette image tirée d'une vidéo de l'AFPTV tournée le 4 mai 2023 montre des nourrissons dans une maternité à Oumdourman, la ville jumelle de la capitale soudanaise.   -  
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Soudan

De nombreux établissements médicaux ont été bombardés lors des violences qui ont éclaté le 15 avril entre des généraux rivaux et les forces qu'ils commandent.

Au début de la guerre à Khartoum, Esraa Hesbarassoul a dû sortir en panique ses jumeaux prématurés d'une couveuse car l'hôpital où ils se trouvaient était bombardé. Sans oxygène et sans ambulance, l'un des deux est mort.

Aujourd'hui, la jeune mère a réussi à rejoindre la petite maternité d'Omdourman, la banlieue nord-ouest de Khartoum, où elle veille sur son dernier enfant.

Quand les premières bombes sont tombées sur l'hôpital le 20 avril, "on nous a dit qu'il fallait évacuer tout le monde tout de suite et qu'on devait prendre nos jumeaux", raconte à l'AFP cette Soudanaise drapée dans un grand voile bariolé.

"Il n'y avait aucune ambulance disponible donc on a dû les transporter comme on pouvait mais l'un des deux est mort faute d'oxygène", poursuit-elle.

Esraa Hesbarassoul est loin d'être la seule mère piégée par la guerre qui a commencé le 15 avril: selon l'ONU "24 000 femmes doivent accoucher dans les semaines à venir" à Khartoum.

D'après la même source, 219 000 femmes attendent actuellement un enfant dans la capitale où plus de cinq millions d'habitants survivent sans eau courante ni électricité et en rationnant le peu de nourriture qui leur reste.

500 naissances

C'est pour elles que le petit hôpital de quatre étages al-Nada reste ouvert envers et contre tout. Et surtout, grâce à un généreux don de l'Association des médecins soudanais-américains (SAPA), explique à l'AFP son directeur Mohammed Fatharrahmane, stéthoscope autour du cou et lunettes sur le nez.

Avec cet argent, parvenu grâce aux canaux de solidarité tissés par la diaspora dans un pays coupé du système bancaire mondiale sous l'embargo des années 1990 et 2000, "on a pu prendre en charge 500 naissances --par voie naturelle et par césarienne-- et admettre 80 enfants" en pédiatrie depuis le début de la guerre, affirme-t-il.

Autour de lui, des prématurés en couveuse s'accrochent à la vie et de jeunes enfants pleurent tandis que des docteurs leur administrent une piqûre.

Dans les salles éclairées par des néons blafards, les ventilateurs au plafond tentent de chasser la chaleur qui dépasse déjà les 40 degrés dehors. De temps à autre, le bruit des combats et des explosions résonnent au loin.

Alors que la guerre a tué environ 700 personnes et blessé 5.000 autres, l'effort médical se concentre sur les blessés de guerre. Les rares hôpitaux qui n'ont pas été bombardés ou occupés par des combattants ne gèrent plus désormais que les urgences vitales.

"Il n'y a plus de services d'obstétrique et de pédiatrie depuis le début du conflit", affirme le docteur Fatharrahmane.

Fatima et son mari Jaber ont ainsi trouvé porte close dans de nombreux hôpitaux et cliniques avant de rencontrer le docteur Fatharrahmane. Il soigne depuis leur fils atteint d'une méningite.

"Tout va s'écrouler"

Déjà avant que la guerre n'éclate entre militaires et paramilitaires, la vie des mères et de leurs nouveaux-nés étaient en danger au Soudan.

Dans ce pays, l'un des plus pauvres au monde, trois femmes sur mille meurent en couches, soit huit fois plus qu'en Egypte voisine par exemple. Sur 1 000 enfants, 56 mourront avant d'atteindre l'âge de cinq ans, contre 19 en Egypte.

Et pour trouver un établissement médical, un Soudanais sur trois doit marcher plus d'une heure. S'il y parvient, seuls 30% des médicaments essentiels seront disponibles pour le soigner.

Aujourd'hui, la petite équipe d'al-Nada redoute aussi d'être bientôt forcée de tout arrêter.

"Nos stocks de médicaments commencent à s'amenuiser, si ça continue comme ça, tout va s'écrouler", s'alarme la pharmacienne de la maternité, Alaa Ahmed, robe fleurie et foulard beige.

Se réapprovisionner en médicaments ou en lait infantile aux entrepôts centraux du ministère de la Santé est inenvisageable: ils se trouvent de l'autre côté du Nil, dans un des quartiers qui jouxtent celui de l'aéroport où les combats font rage.

Les paramilitaires des Forces de soutien rapide "empêchent tout le monde d'y accéder", accuse l'armée.

Résultat, se lamente Alaa Ahmed, "beaucoup de gens me demandent des médicaments mais malheureusement, je ne peux pas les leur donner."

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