France
Pangolins, têtes de singe ou encore chauve-souris: à l'aéroport parisien de Roissy-Charles-de-Gaulle, les douaniers saisissent chaque semaine des centaines de kilogrammes de viande de brousse. En 2021, les douanes du terminal 2 ont saisi 36 tonnes de produits illégaux issus d’espèces sauvages, principalement venues d'Afrique ou d'Asie.
Une partie de ces viandes sont destinées à de la consommation personnelle, « mais il y a également des grands courants de fraude » qui alimentent entre autres des restaurants clandestins, explique Adrien Clopier, chef adjoint de la brigade du T2
« Vu ce qu'on saisit chaque jour, vous vous dites qu'on est foutu. Personne n'a tiré les enseignements du Covid ! », s'insurge son chef Emmanuel Bizeray, devant ces flux illégaux qui ne diminuent pas malgré leurs efforts.
Pour ce mangeur d'escargots, « pas de jugement » sur le régime alimentaire des passagers, mais une « extrême inquiétude » à cause du risque de zoonoses, ces maladies qui se transmettent de l'animal à l'homme, mises en lumière par le Covid.
À cela s'ajoute l'impact sur la biodiversité, avec un « grand nombre d'espèces protégées » saisies : « des singes, des grands primates en voie de disparition », énumère-t-il.
Cas emblématique : celui du pangolin, à la fois en voie de disparition et potentiellement porteur de maladies. « Le pangolin, ça parle à tout le monde après le Covid, pourtant on en saisit plusieurs par semaine », dit-il dans une allusion aux soupçons portés sur cet animal quant à l'origine de la pandémie. « Tout comme des primates porteurs du virus Ebola », rouspète le chef douanier.
Sachant que les douanes n'estiment saisir « qu'environ 10 % du trafic de viande », « on est sur une roulette russe » face aux maladies, met en garde M. Bizeray, déplorant "un problème systémique". Selon l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), le trafic d'espèces sauvages représente 23 milliards d'euros par an.
L'UICN et Aéroports de Paris (ADP) ont annoncé mercredi une campagne de sensibilisation des voyageurs « sur les risques encourus, sanitaires et pénaux ». L'association réclame aussi au gouvernement de « meilleures dispositions réglementaires » -notamment que soit inscrit dans le droit international « la responsabilité légale du transporteur » - et plus de fonds.
Présente mercredi à l'aéroport pour évaluer la situation, la Secrétaire d'État chargée de l'écologie Bérangère Couillard a annoncé la création d'un groupe de travail interministériel sur le sujet pour trouver des « mesures extrêmement concrètes, rapides ». Mais cela semble peu face à l'ampleur de la tâche et au blues des douaniers, "impuissants et en colère", selon M. Bizeray.
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