République démocratique du Congo
"Nous sommes partagés entre mourir de faim ou prendre le risque de se ravitailler en nourriture dans nos propres champs et nous faire tirer dessus par les rebelles" : le choix est difficile pour Furaha Nyimutozo et les autres déplacés de guerre de la rébellion du M23 dans l'est de la République démocratique du Congo.
Le M23 (Mouvement du 23 mars) constitue le dernier avatar des rébellions à dominante tutsi dans l'est de la RDC. Vaincus en 2013, ces rebelles ont repris les armes depuis fin 2021 et pris le contrôle de plusieurs localités.
Depuis cette date, le HCR a enregistré environ "200 000 nouveaux déplacés" à Rutshuru, selon Blaise Ngoy, son chargé de la communication au Nord-Kivu. "La majorité vit dans des familles d'accueil" et "4 000 ménages" sont pris en charge par le HCR.
Entre janvier et juin, le bureau des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) a enregistré 900 000 déplacés en RDC.
Au stade de Rugabo, on aperçoit une foule devant ce lieu qui abritait avant la guerre des rencontres de football. Les regards sont attirés par d'énormes tentes de couleur blanche portant les lettres à l'encre bleu du HCR ainsi que par la fumée de bois de cuisson.
Dans ce stade, 1 500 familles sont hébergées, reparties sous des tentes pouvant recevoir chacune jusqu'à plus de 40 ménages composés des parents et d'une moyenne de quatre enfants.
"Nous avons besoin de 225 millions des dollars pour répondre aux besoins des déplacés de l'est de la RDC. Mais à ce jour, nous avons 43 millions, soit 19 %", explique Pierre Atchom, chef du bureau HCR à Goma, à une équipe de l'AFP.
"Les besoins sont énormes et la crise ne fait que s'enliser", regrette-t-il, redoutant les conséquences néfastes d'une cessation définitive d'activités du HCR dans cette région qui ne suscite pas autant d'attention que la guerre en Ukraine.
"Regagner nos villages"
"Pour quelqu'un qui a une famille, c'est la galère. Nous demandons de l'aide afin que nous puissions regagner nos villages", plaide Julienne Nyiramana, mère de quatre enfants.
"Nous serons exterminés par la faim, dès que le HCR va se retrouver dans l'impossibilité d'intervenir pour nous aider", alerte Emmanuel Hakizimwami, un déplacé de 35 ans, père de 4 enfants.
Dans le site, la vie n'est pas facile: "Mes enfants mangeaient au moins trois fois par jour dans notre village. Ici on mange difficilement une fois", se désole en larme Antoinette Semucho âgée de 25 ans et mère de deux enfants.
Son village est occupé par des rebelles du M23. "Qu'allons-nous devenir lorsqu'il n'y aura plus rien" de la part du HCR ?, s'interroge-t-elle.
Sous un soleil de plomb, Innés, une fillette de 10 ans habillée d'une blouse noirâtre en lambeaux, joue avec son frère au ventre bedonnant alors que sa peau colle aux os. D'autres enfants, sales, présentent les mêmes signes de malnutrition.
Le même spectacle s'offre à Ntamugenga, un village situé dans une vallée surplombée par une colline qui sert de position avancée du M23. Quelque 7.200 familles sont réparties dans quatre sites. La ligne de front est située à 500 mètres de ce village qui abrite quatre sites des réfugiés.
Ici, les champs de bananiers qui séparent l'armée congolaise et les rebelles du M23 sont un piège pour celui qui s'y hasarderait pour chercher de la nourriture. "Pour les rebelles, celui qui s'approche des champs est considéré comme militaire ou informateur et donc espion de l'armée", explique Célestin Nyamugira chef de ce village. "Souvent, ils tirent sans sommation", regrette-t-il.
"Avec trois autres femmes déplacées, nous avions tenté de chercher de la nourriture. Les rebelles nous ont ravi ce que nous avions récolté et fouetté sur nos seins. Nous avons fini notre course à l'hôpital", témoigne Espérance, 32 ans et mère de trois enfants.
Il faut que le gouvernement trouve "une solution pour ramener la paix", avertit Célestin Nyamugira, chef du village de Ntamugenga, pour que les habitants regagnent leur habitation et "éviter que les enfants et les vieillards périssent de faim ici."
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