République démocratique du Congo
Depuis près de deux décennies l’est de la RDC est en proie à une insécurité telle qu’il est difficile de passer une journée sans pleurer. Mais que ferait Mobutu si la situation était la même quand il prit le pouvoir le 24 novembre 1965 ?
Huit civils tués cette nuit, des manifestations et des tirs au siège de la Mission des nations unies en RDC (MONUSCO),… Comme d’habitude depuis quelque 20 longues années, Beni à l’instar de plusieurs localités de l’est halète encore en ce 25 novembre 2019.
Une date chargée de symboles pour les Congolais. Tant certains se souviennent de ce 24 novembre 1965, lorsque le lieutenant-général Joseph Désiré Mobutu destitua Joseph Kasa-Vubu pour devenir le deuxième président de l’histoire de la RDC.
« Jeudi 25 novembre 1965. Députés et sénateurs réunis en congrès prirent connaissance de la proclamation du Haut-commandement de l’ANC. Le Lieutenant général J-D. Mobutu, Commandant et chef de l’Armée nationale congolaise, devint le Chef de l’Etat. (AP archives) », a écrit sur Twitter, Nzanga-Mobutu, l’un des enfants de Joseph Désiré Mobutu.
Jeudi 25 novembre 1965. Députés et sénateurs réunis en congrès prirent connaissance de la proclamation du Haut-commandement de l’ANC. Le Lieutenant général J-D. Mobutu, Commandant et chef de l’Armée nationale congolaise, devint le Chef de l’Etat. (AP archives) pic.twitter.com/Aj7DhFQzqz
— Nzanga Mobutu (@NzangaMobutu) November 25, 2019
Or, en tant qu’acteur politique et diplômé en relations internationales et communication de précieuses universités occidentales, Nzanga-Mobutu sait qu’en politique, rien ne se dit ni ne se fait au hasard. Tout porte ainsi à croire que le signifié de ce texte était de susciter les réactions de certains de ses compatriotes. Surtout en cette période où ça brûle encore à l’est.
« Merci de nous rappeler ce grand et légitime événement. C’ est ce qu’on devrait faire pour notre armé. L’homme qu’il faut à la place qu’il faut au moment qu’il faut », répond un internaute au tweet de l’ancien ministre du Travail et de la Prévoyance sociale (2010-2011).
« Merci cher Oncle … Nous pouvons tout dire de l’ancien régime, j’inviterai mes compatriotes à en retenir quand même les fondamentaux : fierté d‘être Zaïrois, réunification, unité et pacification du pays, le vouloir-vivre collectif … », renchéri un autre internaute.
Mais il y a aussi des avis contraires. « C’était le commencement du malheur du Congo. Ils ont changé la constitution, le pays lui appartient et c’est le début de la dictature », répond Fellybo67, un autre internaute.
« Ton père était une honte, un traitre qui a bradé notre souveraineté. Ce pays doit sa situation chaotique à la dictature et la trahison de Mobutu pour satisfaire les intérêts égoïstes des occidentaux, il a marqué d’une page noire l’histoire de notre pays », assène Christian Lutumba, un autre anonyme.
Le « Grand léopard » lui aussi incapable ?
De la cinquantaine de réactions, il y a quasiment équilibre entre les pro et les anti-Mobutu. Difficile dans ce cas de déterminer si le « Grand léopard » pouvait croquer à belles dents les desperados qui écument l’est de la RDC depuis 1998. Donc un an après son éviction par Laurent Désiré Kabila soutenu par l’Ouganda, le Burundi et surtout le Rwanda lequel fit valoir le droit de poursuite pour traquer des responsables du génocide de 1994 réfugiés à l’est, notamment dans les deux provinces du Kivu.
Or, si la campagne de ces trois pays en RDC avait bénéficié de la bénédiction d’Occidentaux dont les puissants États-Unis, Mobutu avait conquis et conservé le pouvoir pendant 32 longues années grâce au soutien de mêmes Occidentaux qui l’utilisaient comme un rempart contre le communisme dans la région des Grands Lacs, estiment des experts.
Ils expliquent également qu’avant ou pendant son pouvoir, les Forces armées zaïroises (FAZ) ont souvent remporté des batailles, grâce en grande partie à l’important appui de puissances étrangères. Et l’un des plus inoubliables succès des FAZ reste la bataille de Kolwezi en 1978 dans l’actuel Katanga. Des Lumumbistes s‘étant emparés des 2/3 du territoire menaçaient terriblement le régime. « Le colosse avait les pieds d’argile », commenta un journaliste belge.
Il fallut l’intervention de la légion française pour repousser les rebelles et sauver le général Mobutu aux abois. Mais après avoir invité à Kinshasa Giscard d’Estaing en guise de gratitude, Mobutu s’attribua la victoire et mit de nouveaux galons sur ses épaules pour devenir maréchal. « C‘était ça le paradoxe avec Mobutu. Chaque fois que son armée échouait, il montait en grade », racontait Aubert Mukendi, un ancien célèbre analyste politique congolais.
Pour couronner le tout, lors de l’avancée des troupes de Kabila en 1997, de nombreux militaires zaïrois dénonçaient entre autres, les salaires « médiocres » et « l’insuffisance de la logistique (armes, alimentation) ». Ce qui explique en partie l‘échec des FAZ face aux hommes de Kabila et alliés rwando-burundo-ougandais. Même si le sort de Mobutu semblait déjà scellé (avertissement de Mohamed Sahnoun, représentant spécial des Nations unies et de l’OUA pour la Région des Grands-Lacs).
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