Belgique
Un conseiller juridique de la plus haute juridiction de l'Union européenne a recommandé jeudi l'annulation d'un accord avec le Maroc qui aurait permis aux bateaux européens de pêcher au large de la côte contestée du Sahara occidental.
Le conseiller a déclaré que l'accord ne prenait pas pleinement en compte les conséquences sur les droits du peuple du territoire contesté "à bénéficier des ressources naturelles des eaux".
L'avocat général de la Cour de justice de l'UE a soutenu la décision antérieure de la Cour et lui a recommandé de rejeter les appels visant à confirmer l'accord de partenariat pour une pêche durable conclu en 2019 entre l'Europe et le Maroc et de renvoyer l'affaire devant une juridiction inférieure. En 2021, la Cour avait statué en faveur du Front Polisario, parti indépendantiste, estimant que l'accord violait les droits des habitants du Sahara occidental.
L'accord définit où les navires européens avec des permis marocains peuvent pêcher et inclut les eaux contrôlées par le Maroc à l'ouest du territoire contesté.
Les recommandations de l'avocat général Tamara Capeta ont conclu que l'accord ne traitait pas le territoire du Sahara occidental comme "séparé et distinct" du territoire du Royaume du Maroc. Mais elle a déclaré que l'Europe pourrait négocier avec le Maroc en tant que puissance administrante du territoire au nom des résidents tant qu'ils sont traités séparément.
La Cour suit généralement les recommandations d'experts juridiques nommés comme Mme Capeta et les recommandations de jeudi portent un coup au Maroc et aux autorités européennes qui ont fait appel de la décision. La Cour examinera probablement les recommandations de Mme Capeta et rendra une décision dans les mois à venir. Étant donné que l'accord de quatre ans a expiré en juillet, la décision imminente de la Cour peut influencer les futurs accords, mais pas ceux qui sont en vigueur.
Le Maroc n'était pas partie à l'affaire, mais les associations professionnelles de ses agriculteurs et de ses pêcheurs ont soutenu les appels. Mustapha Baitas, porte-parole du gouvernement marocain, a souligné jeudi que les recommandations n'étaient pas contraignantes.
"L'Union européenne devrait, par le biais de ses institutions et de ses États membres, assumer pleinement sa responsabilité pour la préservation et la protection du partenariat avec le Maroc face aux provocations et aux manœuvres politiques", a-t-il déclaré, selon l'agence de presse nationale MAP.
L'accord Maroc-UE de 2019 était le dernier d'une série d'accords remontant à 1988 et fournissait au Maroc 208 millions d'euros sur quatre ans en échange de 128 permis de pêche, principalement pour des bateaux espagnols.
Les eaux au large des 1 110 km de côtes du Sahara occidental sont riches en poissons tels que les sardines et les sardinelles. Le Maroc a également conclu des accords de pêche avec le Japon et la Russie.
Ce procès est l'un des moyens utilisés par le Front Polisario pour faire valoir ses revendications de souveraineté et exercer une pression sur l'agenda économique et la politique étrangère du Maroc. Cette action en justice fait partie d'une demi-douzaine d'actions intentées par le Front Polisario auprès de la Cour européenne concernant les exportations et le commerce marocains.
Dans un communiqué publié jeudi, le Front Polisario a rappelé que les conclusions de l'avocat général n'étaient que des recommandations, mais il les a saluées comme étant favorables, déclarant que "dans cette bataille juridique qui a commencé il y a dix ans, de grands progrès ont été accomplis".
L'accord examiné porte sur les droits de pêche au large de la côte nord-ouest de l'Afrique, mais le cœur de la question concerne la terre.
Le statut du Sahara occidental est un point de friction majeur entre le Maroc et l'Union européenne, qui considère les gouvernements d'Afrique du Nord comme des partenaires essentiels dans la lutte contre le terrorisme et la gestion des migrations. L'UE est le principal partenaire commercial et investisseur étranger du Maroc.
Depuis le retrait de l'Espagne en 1975, le Maroc et le Front Polisario, soutenu par l'Algérie, se disputent le territoire. Le Maroc considère ce territoire comme sa province méridionale et en gouverne toutes les parties, à l'exception d'une bande près de la frontière algérienne.
Les recommandations de jeudi interviennent alors qu'un nombre croissant de pays, dont 15 membres de l'UE, modifient leur position pour soutenir un plan marocain qui offrirait à ce territoire riche en ressources une large autonomie, mais pas de référendum sur une éventuelle indépendance.
Bien que l'Espagne fasse partie des pays qui soutiennent désormais le plan d'autonomie du Maroc, des représentants du Front Polisario ont rencontré des pêcheurs des îles Canaries l'été dernier dans l'espoir de parvenir à un accord pour fournir leurs propres licences d'une durée d'un an, ont rapporté les médias espagnols en juillet dernier.
Dans des décisions liées, Mme Capeta a également recommandé à la Cour de ne pas interdire l'importation de tomates et de melons du territoire contesté en France, mais d'exiger qu'ils soient étiquetés comme provenant du Sahara occidental, et non du Maroc.
Elle a également recommandé à la Cour de se ranger du côté d'un appel européen contestant une décision rejetant les droits de douane sur les importations marocaines. Elle a déclaré que l'extension d'un accord tarifaire que l'Europe a conclu avec le Maroc sur les produits du territoire contesté ne devrait pas être considérée comme une violation du droit du Sahara occidental à l'autodétermination.
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