Soudan
Des tirs d'artillerie lourde ont de nouveau secoué Khartoum lundi, après plus de deux mois et demi de combats au Soudan entre les paramilitaires et l'armée, assaillie sur plusieurs fronts et qui a réclamé une nouvelle fois le renfort des civils.
Les combats ont commencé "vers quatre heures du matin et ne se sont pas interrompus depuis", a raconté à l'AFP un habitant de la capitale.
Plusieurs millions de personnes sont encore bloquées à Khartoum, sans eau, sans électricité et avec des réserves de vivres et d'argent quasiment à sec.
En fin de journée, l'armée de l'air a bombardé un convoi de blindés paramilitaires qui remontaient vers Khartoum depuis le sud du pays, selon des témoins.
La guerre pour le pouvoir entre l'armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, a fait depuis le 15 avril près de 3.000 morts, selon l'ONG Acled, et 2,8 millions de déplacés et de réfugiés selon l'ONU.
La crise humanitaire se cesse de s'aggraver dans un pays où plus d'un habitant sur deux, selon l'ONU, dépend désormais de l'aide humanitaire pour survivre. Le conflit menace aussi de déstabiliser une zone à cheval entre le Sahel, la Corne de l'Afrique et le Moyen-Orient, des régions déjà elles-mêmes aux prises avec la violence.
Mais les deux belligérants ignorent jusqu'à présent les appels au cessez-le-feu, certains de pouvoir l'emporter militairement.
"Préparer" les civils au combat
L'armée s'est dite lundi prête à "recevoir et préparer" des combattants volontaires. La question de l'armement des civils, qui plongerait le pays dans la guerre civile, fait débat depuis des semaines.
Les "jeunes et les hommes qui en sont capables" doivent s'enrôler, a lancé le chef de l'armée le 27 juin, dans son discours à la nation pour la fête musulmane de l'Aïd al-Adha.
Au Darfour, une vaste région de l'ouest du pays frontalière du Tchad, des civils armés ont déjà participé aux combats, de même que des combattants tribaux.
Le gouverneur du Darfour, Minni Minnawi, un ancien chef rebelle aujourd'hui proche de l'armée, avait déjà au mois de mai appelé les civils à prendre les armes.
Lundi, une coalition de tribus arabes de l'Etat du Darfour-Sud a annoncé dans une vidéo mise en ligne son allégeance aux FSR et appelé ses membres à déserter l'armée pour rejoindre les rangs des paramilitaires.
La guerre a une "dimension ethnique" au Darfour, a averti l'ONU, estimant que les exactions commises dans cette région, principalement par les FSR et des milices arabes alliées contre des civils non-arabes, pourraient constituer des "crimes contre l'humanité".
Le décompte des agressions sexuelles, attribuées par la quasi-totalité des rescapées aux FSR, s'alourdit chaque jour, selon l'organe gouvernemental de lutte contre les violences faites aux femmes.
Les Janjawids, des miliciens arabes qui forment le gros des troupes des FSR, avaient mené dans les années 2000, sous le commandement du général Daglo, la politique de la terre brûlée au Darfour, pillant, violant et tuant des membres d'ethnies non-arabes pour le compte du dictateur Omar el-Béchir.
Enfants en danger
Aujourd'hui sous le feu des critiques, les FSR tentent de donner des gages d'apaisement.
Après avoir annoncé la formation de cours martiales d'urgence, elles ont déclaré dimanche vouloir sanctionner "les pillages, le vandalisme et surtout les vols des voitures de civils", alors que des vidéos de combattants faisant sortir de force des familles de leur véhicule inondent les réseaux sociaux.
Les FSR sont aussi accusées de "voler" des maisons et d'expulser leurs habitants qui viennent grossir le flot des déplacés, parfois sans espoir de retour.
Les organisations humanitaires ont sonné l'alarme notamment sur le sort des enfants, dont plus de 13,6 millions, selon l'Unicef, ont besoin d'aide humanitaire, parmi lesquels 300.000 pourraient mourir de faim faute de recevoir cette aide.
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