Eswatini
La dernière monarchie absolue d'Afrique, Eswatini, organise vendredi des élections législatives avec une particularité: les partis politiques ne sont pas autorisés à participer au scrutin, chaque candidat faisant valoir son "mérite individuel", selon la Constitution.
Quelque 585.000 inscrits sont appelés à se rendre aux urnes pour élire 59 députés d'un Parlement qui n'a qu'un rôle consultatif. Le roi Mswati III valide tous les projets de loi et jouit d'un droit de veto. Dix députés supplémentaires sont directement nommés par le monarque absolu.
Le scrutin ne devrait pas changer la donne politique dans le pays: les candidats interdits de représenter un parti ont été désignés lors de primaires le mois dernier et la plupart sont fidèles au roi. Une douzaine seulement sont notoirement de l'opposition. D'autres n'ont pas affiché leur couleur pour éviter la répression.
"La démocratie n'est pas très pratiquée ici", explique Thantaza Silolo, porte-parole de la plus grande formation d'opposition, le Mouvement de libération du Swaziland (Swalimo), évoquant déjà des risques de fraude électorale.
Partis "terroristes"
Longtemps purement interdits, les partis n'ont toujours pas de statut clair aujourd'hui: la Constitution de 2005 garantit seulement la liberté d'expression et d'opinion, ainsi que le droit d'association et de rassemblement.
L'une des principales organisations d'opposition, le Mouvement démocratique uni du peuple (Pudemo), a été officiellement interdite par les autorités et étiquetée "organisation terroriste".
La plupart des formations opposées au roi ne sont pas officiellement enregistrées en tant que partis mais associations ou ONG. La plupart ont appelé à boycotter un scrutin jugé joué d'avance.
Trois ont appelé au vote, espérant grappiller quelques sièges au Parlement.
Deux opposants élus aux dernières législatives sont en prison, un autre en exil.
Peu de meetings ont eu lieu au cours de la campagne, limitée à deux semaines.
Roi omnipotent
Anciennement appelé Swaziland, le territoire montagneux grand comme la moitié de la Belgique (environ 17.300 km2) est dirigé d'une main de fer depuis 37 ans par Mswati III, 55 ans, monté sur le trône à 18 ans.
Omnipotent, le roi peut dissoudre le Parlement et le gouvernement, nommer ou démettre les juges. Il commande aussi la police et l'armée.
Ancien protectorat britannique indépendant depuis 1968, le pays enclavé entre l'Afrique du Sud et le Mozambique compte 1,2 million de sujets.
Le royaume, où la contestation est rare, a été secoué ce dernières années par des manifestations prodémocratie violemment réprimées par la police et l'armée. En 2021, une quarantaine de personnes ont été tuées lors de protestations anti-régime qui ont duré plusieurs mois.
Un couvre-feu a été imposé, les manifestations interdites et internet limité. Des protestations et des grèves ont toutefois continué de façon sporadique.
En janvier, un influent opposant et avocat, Thulani Maseko, a été tué par balle chez lui, quelques heures après une déclaration du roi arguant que ses opposants "ne devraient pas se plaindre de mercenaires qui les tuent" car "ils ont commencé la violence". L'ONU a réclamé une enquête.
Surnommé "Le Lion", Mswati III est critiqué pour vivre dans un faste extravagant alors que près des deux tiers de sa population vit sous le seuil de pauvreté. Il est connu pour posséder une large collection de voitures et de montres de luxe.
Polygame, il a au moins 25 enfants et une quinzaine de femmes dont certaines choisies alors qu'elles étaient mineures.
A son 50e anniversaire, en 2018, il a rebaptisé le royaume Eswatini, "le pays des Swazis" en langue swati. Dans les mois qui ont suivi, les pancartes ont du être changées à travers tout le territoire.
Le pays est par ailleurs l'un des plus touchés au monde par le VIH.
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