France
Venus pour la plupart du continent africain, ces exilés ont traversé la Méditerranée il y a quelques semaines ou plusieurs mois. Nombreux sont ceux qui attendent des décisions du juge des enfants.
Mamoudou Bah a sorti son agenda, préparé son sac à dos, mais pour lui, ce n'est pas vraiment la rentrée. Privé d'école, ce jeuneGuinéen remplit, avec des dizaines d'autres jeunes migrants isolés, des classes informelles tenues par des bénévoles à Paris.
En cet après-midi de début septembre, deux jours après la rentrée scolaire pour 12 millions d'élèves en France, il est venu assister à l'un des cours organisés par l'association Utopia 56 - qui vient en aide aux exilés - dans le 19e arrondissement de la capitale.
Le Guinéen, qui affirme avoir 15 ans, a été déclaré majeur par le département à son arrivée en juin, comme 70 à 90 jeunes qui fréquentent régulièrement ces cours bénévoles le temps d'un recours en justice pour tenter de faire reconnaître leur minorité.
Longiligne, allure juvénile, Mamoudou Bah y assiste pour "ne pas oublier" ses acquis après un an sans école, lui qui a "promis" à ses parents de ne pas rompre avec la scolarité en s'exilant.
"Les jeunes viennent ici avec beaucoup d'ambition", assure-t-il à l'AFP, à la sortie d'un cours de français dans le groupe "avancé", lors duquel il a débattu pendant deux heures sur des sujets d'actualité autour de dessins de presse.
Son sourire l'aide à refluer ses larmes quand il raconte le passé qui l'a poussé à l'exil. "Les traumatismes, ça fait mal, mais j'ai envie d'apprendre, que l'on me donne ma chance d'aller dans une école où je découvrirai la géographie, l'Histoire", rêve-t-il.
En attendant d'intégrer une école classique pour "s'insérer positivement" dans la société, il se satisfait de ces cours, prodigués deux fois par semaine.
Aide sociale à l'enfance
Dans les trois pièces voisines qui font office de classes au rez-de-chaussée d'un immeuble, d'autres jeunes originaires d'Afrique sont assis, derrière une table ou à même le sol pour les retardataires. Ils apprennent l'alphabet, font des dictées, conjuguent, selon leur niveau.
Tous attendent une décision de justice pour être pris en charge par l'aide sociale à l'enfance.
Une attente qui peut durer "six à sept mois", explique Nathan Lequeux, coordinateur des cours de français. Selon Utopia 56, la majorité des jeunes migrants se retrouvent à la rue et sans école, bien qu'ils pourraient y prétendre, durant cette période.
Ces cours, "ça permet d'évacuer mon stress et les attentes interminables", philosophe un autre Guinéen, Mamadou Saliou, qui assure avoir 16 ans. Il les fréquente depuis trois mois, pour combler ses "lacunes", dit-il.
Grâce à cette assiduité, il est fier d'avoir obtenu un 16/20 au test du Centre académique pour la scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage (CASNAV), nécessaire dans l'optique d'une scolarisation.
Il devra encore en passer d'autres, mais Mamadou est "confiant" dans ses chances d'entrer au lycée et se former pour "travailler dans le social".
Un de ses nouveaux amis, Yahaya, rencontré dans cette école officieuse, s'est frayé un chemin pour le rejoindre. En Côte d'Ivoire, il n'est jamais allé à l'école. Utopia 56 l'a "beaucoup aidé" pour sortir de l'analphabétisme, apprécie-t-il.
Combien sont-ils, comme eux, à bénéficier de ces cours ?
"Plusieurs centaines de visages" sont passés en près de deux ans, estime Nathan Lequeux. Parmi eux, quelque 160 ont finalement été scolarisés dans le secondaire.
A ceux-là, s'ajoutent les mineurs isolés étrangers (MNA) reconnus comme tels et qui étaient 250 sur des listes d'attente d'établissements scolaires en France, avait écrit dans un communiqué l'association Droit à l'école, à la veille de la rentrée.
Leur place "est à l'école", avait-elle déploré, "pas dans la rue".
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