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La relation UE-Afrique est entrée dans un nouveau paradigme, selon Charles Michel et Macky Sall

Charles Michel & Macky Sall   -  
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Belgique

Les dirigeants de l'Union européenne et de l'Union africaine étaient réunis à Bruxelles les 17 et 18 février derniers pour le sixième sommet entre les deux partenaires. Les deux continents veulent lancer les bases d'un nouveau partenariat, l'UE souhaitant notamment demeurer le premier partenaire multilatéral de l'Afrique.

Énergie, environnement, terrorisme, sécurité, lutte contre les pandémie, tant de sujets évoqués par Charles Michel, président du Conseil européen et Macky Sall, président du Sénégal et de l'Union africaine, interrogés pour Euronewspar nos journalistes Grégoire Lory et Nathalie Wakam.

Euronews : Charles Michel, le premier objectif de ce sommet était de rebattre les cartes. Êtes-vous pleinement satisfait de ce qui s'est fait pendant ces deux jours à Bruxelles ?

Charles Michel : Je suis très satisfait parce que j'ai la conviction que durant ces deux jours à Bruxelles, on a réellement refondé, renouvelé le partenariat entre l'Afrique et l'Europe, et on a changé de paradigme. La préparation du sommet, déjà, traduisait cette volonté politique commune. Comment peut-on identifier ensemble les objectifs, les défis ? Et comment peut-on identifier ensemble les meilleures solutions avec plus de pragmatisme, en étant plus opérationnels, plus concrets. Donc ces principes à la fois de respect mutuel, d'intérêts mutuels, mais aussi d'évaluations régulières afin de faire en sorte qu'on puisse réellement délivrer et concrétiser nos engagements.

Euronews : Donc vous êtes content ?

Charles Michel : Je suis content parce que j'ai ressenti une atmosphère. J'ai ressenti réellement les leaders africains et européens engagés, motivés, mobilisés dans l'écoute mutuelle et c'est important de s'écouter parce que c'est la clé de la confiance. Mieux comprendre quels sont les points de vue de part et d'autre. Mieux comprendre au départ des points de vue parfois, qui ne sont pas spontanément les mêmes. Mieux comprendre où se trouvent les ponts, où se trouvent les chemins communs pour faire en sorte, quand il y a des difficultés, parce qu'il peut y en avoir, que l'on voit qu’elle est la capacité de surmonter l'obstacle de manière intelligente.

Euronews : Macky Sall, pensez-vous qu'après ce sommet, il est possible de bâtir ce partenariat renouvelé ?

Macky Sall :Absolument. Tel que l'a dit Charles, je voudrais le remercier d'abord pour la bonne organisation de ce sommet mais également par la manière dont ce sommet a été préparé. Cela nous a permis d'aboutir à ce résultat qui va être le point de départ de ce partenariat rénové, repensé, mais bâti sur le respect mutuel, la solidarité et finalement, l'écoute mutuelle parce que souvent on ne nous écoutait pas. Souvent on ne nous écoutait pas on nous donnait juste des recettes, des solutions. Je note quand même ce changement de paradigme fondamental dans la relation, bâtie sur l'amitié, la considération, sur l’écoute mutuelle et sur la recherche de solutions communes, la co-construction de solutions.

Et en venant à Bruxelles, bien sûr, il y avait des sujets délicats sur lesquels on n'avait pas encore fini de négocier : la question de la transition énergétique et climatique, les questions sur les droits de propriété par rapport aux vaccins, ce sont des sujets difficiles que nous avons réussi, plus ou moins en tout cas, à bien fixer. Donc d'abord sur la méthode de travail ça a été une innovation majeure et cela nous a donné une efficacité plus grande pour finalement arriver à des résultats assez probants. Maintenant il reste la mise en œuvre sur laquelle aussi nous nous sommes engagés.

Recevoir des doses (de vaccin) n'est pas suffisant. Nous voulons produire les doses en Afrique
Macky Sall
Président du Sénégal et de l'Union africaine

Euronews : Macky Sall, la gestion du Covid a mis à rude épreuve les relations entre l'Union africaine et l'Union européenne. Il y a eu Omicron et les décisions qui ont été prises dans la foulée. Là, il y a la question prégnante de la levée des brevets sur les vaccins. Et visiblement, vous n'avez pas obtenu satisfaction. C'est un échec ?

Macky Sall :Non, pas du tout. C'est pas du tout un échec. C'est à dire lorsqu'il y a deux positions qui sont opposées on essaie de rechercher un compromis, une solution qui permette de contenter les deux positions. On n'est pas dans une relation manichéenne où c’est oui ou non. Déjà, pour arriver à ce que nous voulons, c'est à dire que les vaccins soient produits en Afrique, au moins 60%, il y a eu quand même des efforts qui ont été faits par l’Europe. D'abord la mise à disposition de vaccins sur Covax, quel que ce qu’on peut en dire. C’est déjà 150 millions de doses qui été déjà données. Et l’Europe s'engage pour mettre 400 millions de doses d'ici l'été 2022. Donc ça c'est le premier pas.

Mais nous disons que recevoir des doses n'est pas suffisant. Nous voulons produire les doses en Afrique. Et dans ce cadre, il y a eu un échange extrêmement important où des pays européens, et la Team Europe s'est engagée avec nous, avec l'OMS, pour transférer dans six pays africains dans un premier temps, six hubs, la nouvelle technologie de l'ARN messager.

Et il faut dans ce cadre aussi traiter du sujet des brevets. Les brevets, certains disent : il faut les suspendre. C'est une position. D'autres disent on ne peut pas remettre en cause la propriété intellectuelle. Donc, qu'est-ce qu'il faut faire ? Nous avons une pandémie. Il y a des gens qui meurent. Pendant cette pandémie. Nous allons et nous avons donné mandat aux deux commissions, de l'Union européenne de l'Union africaine, et l'OMC va accompagner pour qu'on arrive à trouver le compromis. Et le compromis c'est d'abord le transfert de technologie. Une fois qu'on a la technologie il est plus facile de discuter avec celui qui a le brevet, peut être d'améliorer les conditions, d'alléger les coûts afin que ceux qui ont la technologie, puissent reproduire sur le continent. Donc ce débat est renvoyé d’ici avril-mai et je pense qu'on ne peut pas dire que c'est un échec. Au contraire, c'est une volonté commune d'arriver à ce compromis qui sera trouvé j'en suis certain.

Euronews : Charles Michel, pourquoi l'Union européenne n'a pas souhaité lever les brevets ? Est-ce que vous ne craignez pas d'accentuer la méfiance de vos partenaires africains ?

Charles Michel : Nous avons la conviction que nous partageons exactement le même objectif. Nous voulons, leaders africains, leaders européens, qu'il y ait la capacité de développer des productions vaccinales, et dans le secteur du médicament de manière plus générale sur le continent africain. Ça, c'est le point de départ.

Deuxième élément, nous mesurons bien que la propriété intellectuelle est un levier puissant pour favoriser l'innovation, la recherche. Et ça, c'est évidemment essentiel de protéger cette dimension-là. Et puis nous comprenons bien, quand on produit des médicaments ou des vaccins, qu’il y a un élément très important qui est la technologie, le know-how et la capacité régulatoire. Et nous avons voulu être extrêmement pragmatiques. Pourquoi ? Parce que les derniers mois, plutôt que d'avoir un débat idéologique sans fin où deux positions antagonistes et un peu extrême s'affronteraient, on s'est dit on ne va pas attendre, on va en tout cas déjà maintenant se retrousser les manches. J'étais à Dakar visiter l'Institut Pasteur, que ce soit au Sénégal, dans d'autres pays africains, pour lancer des projets où nous avons poussé les secteurs privés à développer des projets là où il y avait une volonté politique très, très forte. Et c'est cela qui a donné lieu à la capacité aujourd'hui de concrétiser ces transferts de technologie.

Et on va plus loin. On va maintenant travailler ensemble sur une position commune, africaine et européenne que l'on pourra défendre au sein de l'OMS et de l'OMC. Ça veut dire que c'est un bel exemple où la fédération des forces politiques africaines et européennes peut amener le monde à trouver une solution intelligente. Lorsqu'on est frappé par une telle pandémie, on doit effectivement trouver cet équilibre entre, d'une part, la propriété intellectuelle pour garantir l'innovation, mais aussi veiller à ne pas perdre du temps et à faire en sorte que partout dans le monde il y ait de l'accès à des vaccins.

Euronews : L'Union européenne propose 150 milliards d'euros à l'Afrique. Est-ce que ce montant est suffisant pour contrer, disons, l'influence de la Chine et de la Russie. Et est-ce la seule réponse possible ?

Charles Michel : Je voudrais peut-être corriger un élément. Il ne faut pas qu'il y ait de malentendu. La volonté de l'Union européenne n’est pas du tout de contrer l'influence de quelqu'un. C'est de développer un projet positif, un partenariat positif, intelligent, engagé. Pourquoi ? Parce que nous avons une volonté sincère, parce que c'est notre intérêt mutuel. Nous savons bien que quand l'Afrique se porte bien en terme de stabilité, de développement et de prospérité, c'est bon pour l'Europe. Et de la même manière quand l'Europe se porte bien en terme de prospérité, de stabilité, c'est bon également pour l'Afrique. Ça c'est un premier élément qu'il est important de souligner et de clarifier. Ça c'est la sincérité de cet engagement.

Alors maintenant sur le montant. C'est un montant qui est sans précédent. Jamais nous n'avons été capables de mobiliser une telle enveloppe financière. Pourquoi ? Parce qu'on a décidé de réfléchir en canalisant en même temps les moyens publics, les moyens traditionnellement mobilisés pour ce partenariat, avec le souci de canaliser mieux l'argent privé, le secteur privé. Ça c'est un élément additionnel qui touche à ce nouveau logiciel que l’on décrivait il y a quelques instants. On va chercher ce qu'on appelle l'effet de levier. La Banque européenne d'investissement devient un acteur majeur du point de vue européen pour développer des partenariats avec nos partenaires africains. Du reste, lorsque l’on est au travail avec les leaders africains, je veille chaque fois à emmener avec nous les experts de la Banque européenne, chaque fois, pour être bien informés sur les priorités des pays africains en terme d'investissement, notamment dans le secteur des infrastructures, par exemple.

Je comprends très bien que c'est plutôt l'Europe, avec d'autres économies avancées, qui ont abusé des ressources naturelles et qui sont à l'origine du réchauffement climatique
Charles Michel
Président du Conseil européen

Euronews : Macky Sall, on sait que l'Europe est réticente à financer des projets en lien avec les énergies fossiles. Et je sais que vous avez un gros plaidoyer dans ce sens-là. Est-ce que ça veut dire que vous allez aller chercher des investisseurs ailleurs ?

Macky Sall :Déjà, il faut dire que à la fin de ce sommet, on a quand même eu un compromis avec l'Europe sur cette question essentielle, moi, qui me tient personnellement à cœur parce que je suis contre l'injustice. Or ce qu'on voulait faire, c'était injuste vis à vis de l'Afrique. C’est à dire l'Afrique qui émet pour moins de 3% de CO2 et qui subit drastiquement les conséquences du changement climatique, on lui dit non vous annulez tout ce qui est fossile. Ce n'est pas réaliste, ce n'est pas juste. Mais l'Afrique est engagée pour lutter contre le changement climatique. Sur l'accord de Paris, dans la plupart des pays africains, les gens sont engagés dans un mix énergétique et nous avons des politiques d'adaptation qui sont en marche. Mon pays, par exemple, est à 31% d'énergies propres, d'énergies renouvelables. Il n’y a pas beaucoup de pays qui ne sont à ce niveau aujourd'hui au moment où on nous parlons.

Mais comme nous avons besoin de donner de l'électricité à 600 millions d'Africains qui n'en ont pas encore, parce qu'il y a un défaut d'électricité, nous avons besoin aussi de développer l'industrie en Afrique pour créer de l'emploi, de la valeur ajoutée. Au lieu de juste vendre des matières premières et d'acheter des produits manufacturés, nous devons industrialiser le continent. Nous le ferons en respectant une pratique bas carbone, mais nous le ferons quand même avec une énergie qui soit capable d'être compétitive pour nos économies. Au moment où nous le ferons, nous, en même temps, nous allons nous adapter et nous allons développer des projets durables tels que d’ailleurs la Grande muraille verte en Afrique et tout ce qui est énergies propres et énergies renouvelables.

Euronews : Ce qui revient du terrain, c'est que ces standards, ces critères européens ne sont peut-être pas adaptables en Afrique. Est-ce que ça veut dire que l'Union doit revoir ses critères ? Est-ce qu'elle doit revoir l'ampleur de l'effort climatique ?

Charles Michel : _M__oi je vois en tout cas dans cet exemple qui a été expliqué par Macky Sall, quelque chose de très intéressant parce que non seulement, ça on le savait, Macky Sall est un avocat redoutable qui manie bien l'argumentation objective et rationnelle, et on se souvient bien que probablement, la confiance entre Macky Sall et moi-même a été l'occasion depuis des mois d'échanger sur ce sujet-là._

Je comprends très bien, comme les autres leaders européens, que d'une part, c'est plutôt l'Europe, avec d'autres économies avancées qui ont abusé des ressources naturelles et qui sont à l'origine du réchauffement climatique. Donc, c'est vrai qu'il y a une injustice, ou il y aurait une injustice à considérer que pour la transition qui est nécessaire, on n'accepte pas qu'il y ait la prise en considération pragmatique des réalités sur le continent africain. Au départ il n’y avait pas beaucoup d'enthousiasme sur le plan européen pour entendre ce message-là parce qu’il y a plutôt une radicalité parce que nous ressentons bien cette urgence climatique. Et puis, c'est le dialogue, c'est l'écoute mutuelle, c’est ce changement de logiciel qui a permis non seulement en préparation de cette réunion, avec de nombreux contacts préalables, de nombreux échanges d'informations préalables. Et puis, on a réussi à s'accorder sur un texte mais qui est bien la démonstration que là où il y a de la volonté politique et de la confiance, la confiance passe par la transparence, elle passe par une forme de loyauté mutuelle.

Lorsqu’il s’est agi de terrorisme en Afghanistan ou en Syrie, des coalitions mondiales se sont mobilisées [...] des milliers de milliards de dollars ont été mobilisés [...] Pourquoi quand il s'agit de l’Afrique, on doit nous dire : «débrouillez-vous»
Macky Sall
Président du Sénégal et de l'Union africaine

Euronews : Permettez qu'on évoque à présent la question de la sécurité. La France a annoncé un retrait coordonné de Barkhane et de Takuba. Vous avez réagi, vous vous êtes dit heureux que cet engagement soit renouvelé. Concrètement, à quoi on va assister dans les prochains mois dans cette région ?

Macky Sall : D'abord, il faut retenir que nous avons eu un échange extrêmement important à l'Élysée avant-hier. Charles Michel était là, et les dirigeants européens et les dirigeants africains sur la question de la sécurité, de la lutte contre le terrorisme. Et il est apparu au cours de ce débat qui est aussi un débat franc, vous savez les choses se disent clairement, mais dans le respect ... il est apparu dans ce débat que l'Europe ne veut pas laisser l'Afrique seule faire face au terrorisme. C'est une bonne chose. Nous souhaiterions que toutes les parties du monde raisonnent comme ça puisque si tout le monde raisonnait comme ça, on n'allait pas laisser les Africains seuls face au terrorisme. Lorsqu’il s’est agi de terrorisme en Afghanistan ou en Syrie, c’est les coalitions mondiales qui se sont mobilisées, des milliers de milliards de dollars ont été mobilisés pendant vingt ans en Afghanistan. Pourquoi quand il s'agit de l’Afrique on doit nous dire : débrouillez-vous ?

Alors il y a eu quelques pays, la France fait partie de ces pays, qui ont répondu à l'appel du Mali en 2013. Les Africains ont répondu avant que l'ONU ne mette en place une mission de casques bleus. Nos différents pays ont envoyé gratuitement leurs soldats. Je me rappelle, mes soldats ont fait la route de Dakar à, dans la partie nord du Mali, le nom me reviendra, et ils ont fait 2 300 kilomètres de route pour aller au secours du Mali parce que c'était un de nos voisins qui était touché. Cette solidarité là, nous souhaitons qu'elle soit globale et il est heureux que l'Europe ait renouvelée cette volonté et cette solidarité envers l'Afrique. C'est pourquoi elle (l’Europe) nous a dit : maintenant, au Mali, il y a des problèmes, il y a des situations et les conditions opérationnelles ne permettent plus de maintenir notre mission sur place, mais nous allons la ré-articuler pour rester dans le Sahel, rester dans la zone, articulée vers le Niger, mais aussi vers les autres pays qui sont les pays côtiers du golfe de Guinée. Le temps que j'espère au Mali, les choses s'améliorent pour qu'ils reviennent au Mali. Parce qu'on ne peut pas lutter contre le terrorisme dans le Sahel en ignorant le Mali, ce n'est pas possible. C'est un vaste territoire de 1 million 200 000 kilomètres carrés à lui tout seul, frontalier avec 7 autres pays : l'Algérie, la Mauritanie, le Niger, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, la Guinée, le Sénégal. C’est tout ça le Mali. Donc un tel espace, on ne peut pas efficacement lutter contre le terrorisme et ne pas y être présent. Maintenant je considère qu'il y a des situations conjoncturelles et j'espère que l'on va les dépasser très rapidement pour nous permettre de reprendre l'efficacité de la lutte contre le terrorisme dans le Sahel.

Euronews : Est-ce que l'échec de l'opération française Barkhane et l'échec de l'opération européenne à Kouba remet en cause ce format d'opérations et pourrait remettre en cause d'autres interventions européennes ?

Charles Michel :Moi je conteste l’analyse que vous faites parce qu’il faut se souvenir quel était le point de départ. Le point de départ c'était un risque d'effondrement total, extrêmement gravissime du Mali, avec les implications pour toute la région et bien au-delà. Et c'est parce qu'à ce moment-là, des Etats souverains ont considéré qu'il était utile d'avoir le partenariat de la France et des pays européens, que la décision a été prise de se déployer en soutien pour tenter d'éviter ce qui eût été une catastrophe bien plus grave encore que la situation actuelle, c'est un premier élément.

Deuxième élément nous prenons en considération la situation, à la fois l'évolution de la menace mais aussi la situation au Mali qui, comme cela a été indiqué, amène une difficulté, je l'espère circonstancielle. Et nous espérons que l'on pourra retrouver le plus vite possible une forme de coopération plus normalisée avec ce pays qui est un pays important au cœur du Sahel. Mais on s'adapte aussi par la ré-articulation qui a été expliquée. On s'adapte aussi en plein dialogue avec les pays africains en prenant en compte par exemple l'initiative d'Accra et l'importance de prendre aussi en considération les pays du golfe de Guinée qui étaient, du reste, représentés dans cette rencontre. Donc vous aviez à la table les pays européens, les pays africains et c'était l'occasion d'un échange direct, une analyse en commun de la situation et sur cette analyse en commun nous voyons comment on peut se déployer de manière opérationnelle. Encore une fois en essayant comme Européens de déployer des moyens qui sont les plus judicieux, les plus utiles, suite aux analyses qui sont faites par nos amis africains

Euronews : Charles Michel, il y a cinq ans à Abidjan, des décisions ont été prises concernant les questions d'immigration, notamment mettre fin au trafic illégal. On parlait par exemple, sur la Libye, de renforcer les partenariats. Mais on se rend compte que jusqu'à présent, on retrouve toujours des migrants sur la route de départ, ou des sauvetages en mer. Rien ne semble avoir changé entre 2017 et maintenant.

Charles Michel :D’abord il est certain que la question migratoire est une question qui est sensible politiquement en Europe, probablement également en Afrique. Et c'était important d'avoir ce dialogue. Je me souviens qu'en préparation de ce sommet, certains amis tant côté africain comme côté européen redoutaient un peu ce débat, redoutaient un peu que le débat soit l'occasion d'une grande confrontation, d'une grande dispute des Africains face aux Européen. On a voulu vraiment, en préparation, s'écouter mutuellement et avoir un regard intelligent et nuancé sur le sujet.

D'abord un, nous comprenons comme Européens qu'un des premiers défis pour la migration, est qu'elle est intra-africaine. Il y a d’abord un débat qui est la migration intra africaine. Et comment peut-on prendre en considération cette situation en mobilisant, ce qui a été décidé, des projets très concrets d'investissements massifs dans la formation professionnelle, l'apprentissage des métiers, faire en sorte que cette jeunesse africaine ait des perspectives qui soient optimistes.

Deuxième élément, comment peut-on effectivement combattre ensemble les formes criminelles qui utilisent et abusent en réalité cette détresse humaine de manière un peu cynique ? Là, nous avons des intérêts conjoints parce qu’on a la même compréhension de la dignité des personnes et par conséquent, on veut agir ensemble par rapport à ça.

Et puis, dans ce cadre plus global, on doit regarder aussi comment on a des capacités de coopérer en matière de retour et de réadmission pour ceux qui ne sont pas dans les conditions. Et je veux aussi indiquer, nous avons bien mis en évidence, que si on est ferme, que nous voulons l'être pour combattre la migration irrégulière, illégale, on doit aussi offrir des canaux réguliers et légaux de migration. Voyez, sur un thème comme celui-là, dès que l'on ramène de la rationalité je pense qu'on est capable alors avec sérénité, avec intelligence, de regarder comment on peut dégager des solutions ensemble.

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