Cameroun
La Coupe d'Afrique des Nations, dont le coup d'envoi sera donné dimanche au Cameroun après avoir été reporté en raison des inquiétudes suscitées par le virus Covid, pose également d'importants problèmes de sécurité, de politique et d'organisation au pays hôte.
Certains craignaient un nouveau report, le responsable du football africain, Patrice Motsepe, s'inquiètant en ffin d'année de la propagation rapide du variant Omicron dans un pays où le taux de vaccination est faible.
La Confédération africaine de football (CAF) a établi des règles draconiennes qui pourraient empêcher les supporters d'entrer en masse dans les stades.
Les spectateurs doivent être entièrement vaccinés et présenter un test PCR négatif moins de 72 heures avant un match.
La capacité des stades est fixée à 60 %, mais elle sera portée à 80 % lorsque les "Lions indomptables" du Cameroun joueront, notamment lors du match d'ouverture contre le Burkina Faso, dimanche.
Motsepe, un magnat de l'industrie minière sud-africaine, a déjà reconnu les risques présentés par la prolifération des faux tests.
La menace de la Covid plane sur le tournoi
Le Sénégal a retardé son départ pour le tournoi, après que trois joueurs ont été testés positifs, samedi soir trois nouveaux lions sont apparus positifs : Famara Diedhiou, Édouard Mendy et Kalidou Koulibaly.
Le Burkina Faso se retrouve le même jour avec trois ou quatre cadres contaminés dont la starlette Tapsoba et la Gambie a déclaré qu'elle faisait face à une "catastrophe" parce qu'elle n'était pas autorisée à remplacer les joueurs contaminés par la Covid.
Le Cameroun, pays pauvre d'Afrique centrale de 27 millions d'habitants, a officiellement enregistré 1 840 décès dus au Covid suite à 110 000 infections, bien que les experts mettent en garde contre une sous-déclaration.
Peu de gens portent des masques et seulement 2,4 % de la population a été vaccinée dans ce pays dirigé depuis près de quatre décennies par l'homme fort Paul Biya.
Les tensions séparatistes et djihadistes inquiètent
Les autorités doivent également faire face à des séparatistes armés dans l'ouest du pays et à des raiders djihadistes dans le nord. Certains craignent que les militants ne profitent de la présence du pays sous les projecteurs pour lancer des attaques.
Les forces de sécurité de l'Ouest sont en état d'alerte après que des groupes armés ont envoyé des messages de menace aux équipes du groupe F, qui réunit la Tunisie, le Mali, la Mauritanie et la Gambie.
Les quatre équipes doivent jouer dans la ville côtière de Limbe, et leur site d'entraînement est Buea, un haut lieu de l'agitation séparatiste.
"Les menaces sont très sérieuses", a déclaré à l'AFP par téléphone Blaise Chamango, responsable d'une ONG de Buea, Human Is Right.
Un "outil politique"
Le Cameroun avait été choisi en 2014 pour organiser la vitrine du football africain en 2019 mais a pris du retard dans les préparatifs. L'Égypte est intervenue à la dernière minute pour accueillir l'événement à la place du Cameroun.
Le tournoi de 2021 a été reporté à deux reprises, d'abord par crainte que les pluies saisonnières torrentielles n'affectent le calendrier serré, puis en raison de la pandémie de Covid.
Mais les grands projets d'infrastructure étaient également en cause, le complexe phare d'Olembe, dans la capitale Yaoundé, n'étant toujours pas entièrement achevé.
Le président camerounais Biya, 88 ans, à la ligne dure, a vu dans l'organisation de la fête du football africain un moyen de redorer son image internationale après sa dernière victoire électorale contestée en 2018, qui lui a valu un septième mandat.
À la fin du mois dernier, des dizaines de militants du principal parti d'opposition ont été condamnés à des peines de prison allant jusqu'à sept ans pour avoir pris part à des manifestations pacifiques contre son régime.
Paul Biya pour redorer son image internationale
À Yaoundé, le portrait de Biya apparaît souvent à côté des publicités pour le tournoi de football.
"Il a toujours utilisé le football comme un outil politique pour rallier les Camerounais et surfer sur leur succès", explique Jean-Bruno Tagne, auteur de "La tragédie des Lions indomptables".
Une partie de l'opposition et de la société civile a également dénoncé "l'indécence" du coût d'organisation de la coupe dans un pays dont le taux de pauvreté a atteint près de 40% et dont un tiers de la population vit avec moins de deux euros par jour, selon la Banque mondiale.
"Si le Cameroun gagne, les Camerounais peuvent tout oublier. Mais si ça se passe mal, il faudra des boucs émissaires et des têtes vont certainement tomber", a déclaré le politologue Stéphane Akoa.
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