Iran
L'Iran a accusé Israël d'avoir joué un "rôle" dans l'assassinat, vendredi, d'un scientifique iranien de haut rang travaillant dans le secteur nucléaire, et prévenu qu'une "vengeance terrible" attendait les personnes impliquées dans ce que Téhéran a qualifié d'"acte terroriste".
"Des terroristes ont assassiné aujourd'hui un éminent scientifique iranien. Cette lâcheté -avec des indications sérieuses du rôle d'Israël- montre le bellicisme désespéré de ses auteurs", a tweeté Mohammad Javad Zarif, ministre des Affaires étrangères.
Il a également appelé la communauté internationale à "mettre un terme à ses honteuses positions ambivalentes et à condamner cet acte terroriste".
Le chef d'état-major, le général de division Mohammad Baghéri, a lui prévenu qu'une "vengeance terrible" attendait "les groupes terroristes et les responsables et les auteurs de cette tentative lâche".
La mort de Mohsen Fakhrizadeh est un "coup amer et lourd", a tweeté M. Baghéri, selon l'agence de presse étatique Irna, assurant que les Iraniens "n'auront pas de repos tant que nous n'aurons pas pourchassé et puni" les personnes impliquées.
Le ministère de la Défense avait plus tôt identifié la victime comme étant Mohsen Fakhrizadeh, chef du département recherche et innovation du ministère.
Il a été "gravement blessé" lorsque sa voiture a été prise pour cible par plusieurs assaillants, qui ont en retour été pris à partie par l'équipe de sécurité du scientifique, a indiqué le ministère dans un communiqué, ajoutant que l'équipe médicale n'était pas parvenue à le ranimer.
Selon un journaliste d'une télévision d'Etat, un pick-up Nissan noir transportant des explosifs dissimulés sous du bois a explosé devant la voiture de Fakhrizadeh, avant qu'elle ne soit visée par des tirs nourris provenant d'un véhicule circulant sur une autre voie.
Des images et vidéos de la scène montrent une berline noire sur le bord d'une route, le pare-brise criblé d'impacts de balles. Du sang est visible sur l'asphalte.
Plusieurs médias locaux, dont les agences de presse Tasnim et Fars, ont rapporté l'attaque contre le scientifique dans la ville d'Absard, à l'est de Téhéran.
Le département d'Etat américain avait indiqué en 2008 que Fakhrizadeh menait "des activités et des transactions contribuant au développement du programme nucléaire de l'Iran".
Le scientifique avait été qualifié par le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu de père du programme iranien d'armement nucléaire.
Contacté par l'AFP, un porte-parole de M. Netanyahu a refusé de commenter.
- Programme nucléaire -
Cet assassinat intervient moins de deux mois avant l'arrivée à la Maison Blanche du démocrate Joe Biden, président élu aux Etats-Unis.
M. Biden entend changer de posture vis-à-vis de l'Iran après les quatre années de présidence du républicain Donald Trump, qui s'est retiré en 2018 de l'accord portant sur le programme nucléaire iranien signé à Vienne trois ans plus tôt. Les Etats-Unis, dans le cadre de leur politique de "pression maximale", ont ensuite rétabli puis renforcé les sanctions contre l'Iran.
Pour M. Trump, cet accord n'offre pas de garanties suffisantes pour empêcher Téhéran de se doter de l'arme nucléaire. L'Iran a toujours nié vouloir d'un tel armement.
M. Trump a retweeté vendredi des informations sur l'assassinat du scientifique iranien, mais sans y adjoindre de commentaire personnel.
Fakhrizadeh a été tué au lendemain du transfert par la Thaïlande de trois Iraniens détenus pour une attaque à la bombe manquée visant des diplomates israéliens à Bangkok en 2012.
D'après Téhéran, ce transfert s'est fait en échange de la libération mercredi de la chercheuse australo-britannique Kylie Moore-Gilbert.
Condamnée à dix ans de prison pour espionnage au profit d'Israël - ce qu'elle a toujours nié-, cette spécialiste du Moyen-Orient a retrouvé la liberté après plus de 800 jours de détention.
Plusieurs autres scientifiques spécialisés dans le domaine nucléaire en Iran ont été assassinés ces dernières années, Téhéran en attribuant systématiquement la responsabilité à Israël.
L'Iran a démenti la présence de membres de ce groupe jihadiste sur son sol, affirmant que l'assassinat évoqué par le quotidien américain était une "information fabriquée".
- Plusieurs scientifiques iraniens ces 10 dernirèes années -
Plusieurs scientifiques iraniens travaillant dans le secteur nucléaire ont été tués ces dix dernières années lors d'attaques ciblées attribuées par Téhéran à Israël, à l'instar du scientifique de haut rang assassiné vendredi près de Téhéran.
- En janvier 2010, le scientifique nucléaire Massoud Ali Mohammadi est assassiné dans la capitale iranienne. Ce physicien de renom qui enseignait à l'université de Téhéran et qui travaillait également pour le Corps des Gardiens de la Révolution (Pasdaran, élite des forces armées iraniennes), est tué par l'explosion d'une moto piégée alors qu'il sortait de son domicile.
L'attentat est rapidement attribué aux services du renseignement israéliens et américains par plusieurs dirigeants et médias officiels iraniens.
Téhéran avait déjà accusé en décembre 2009 les Etats-Unis et Israël d'avoir enlevé le physicien nucléaire Shahram Amiri, disparu en mai de la même année.
- En novembre 2010, deux physiciens jouant un rôle important dans le programme nucléaire iranien sont visés à Téhéran par deux attentats à la bombe, attribués par l'Iran à Israël et aux Etats-Unis. L'un d'eux, Majid Shahriari, est tué.
- En pleine crise sur la question nucléaire iranienne, cinq scientifiques iraniens ont été victimes d'attentats à Téhéran entre 2010 et 2012. L'Iran a accusé l'Agence centrale du renseignement américaine (CIA) et le Mossad (les renseignements extérieurs israéliens) d'être derrière ces assassinats.
- Le 12 novembre 2011, l'explosion d'un dépôt de munitions des Gardiens de la Révolution dans la banlieue de Téhéran fait au moins 36 morts, dont le général Hassan Moghadam, responsable des programmes d'armement des Pasdaran. Selon le Los Angeles Times, l'explosion est due à une opération menée par les Etats-Unis et Israël contre le programme nucléaire iranien.
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