Sierra Leone
Quelque 3,1 millions d‘électeurs sierra-léonais sont appelés aux urnes le 7 mars pour des élections présidentielle, législatives et locales qui tourneront la page d’une décennie de pouvoir du président Ernest Bai Koroma.
Petit pays anglophone d’Afrique de l’Ouest, un des plus pauvres au monde, la Sierra Leone a vu son développement freiné par une corruption endémique, une épidémie d’Ebola et, l’an dernier, par des inondations meurtrières.
Voici cinq choses à savoir à une dizaine de jours du scrutin:
Nouveaux partis et visages connus
La scène politique est traditionnellement dominée par Congrès de tout le Peuple (APC, au pouvoir) et par le Parti du peuple de Sierra Leone (SLPP), principale formation d’opposition.
Mais l‘émergence d’un nouveau parti, la Grande coalition nationale (NGC), et de son candidat charismatique, l’ex-SLPP Kandeh Yumkella, pourrait en partie rebattre les cartes.
Le chef de l’Etat sierra-léonais a désigné son ancien ministre des Affaires étrangères Samura Kamara comme candidat de son parti, dont il entend continuer à exercer la direction.
Le SLPP a pour sa part choisi Julius Maada Bio, brièvement à la tête d’une junte en 1996 puis battu par M. Koroma en 2012, qui a cette fois fait campagne sur un programme anti-corruption.
“Un second tour entre l’APC et le SLPP est le scénario le plus probable, mais la NGC pourrait être déterminante dans la désignation du vainqueur final” s’il y a un second tour, souligne le directeur du think-tank Area Consulting, Jamie Hitchen.
Seize candidats, dont deux femmes, se disputeront la présidence, tandis que 132 sièges de députés sont à pourvoir.
Divisions régionales
Comme dans d’autres pays d’Afrique de l’Ouest tels la Guinée, les divisions politiques recoupent le plus souvent les divisions ethniques.
Le SLPP et son candidat sont principalement soutenus par les Mende et d’autres ethnies du Sud, l’APC du président sortant par les Temne et d’autres ethnies du Nord et de l’Ouest.
La capitale Freetown, où vit un tiers de la population, a toutefois un profil plus diversifié, obligeant les candidats à y redoubler d’efforts pour élargir leur base.
Corruption et Ebola
Un niveau extrêmement élevé de corruption a miné la confiance dans la classe politique depuis longtemps, et sans doute plus que jamais depuis l‘épidémie Ebola (2014-2016) qui fait quelque 4.000 victimes dans le pays.
Selon un audit de 2015, un tiers du budget de l’Etat consacré à la lutte contre l‘épidémie, soit 5,7 millions de dollars, ont disparu sans laisser de traces.
Plusieurs candidats dénoncent l’incurie du parti au pouvoir. Parmi les plus critiques figure l’ancien vice-président Samuel Sam-Sumana, limogé en 2015, qui se présente sous les couleurs de son propre parti, la Coalition pour le Changement (C4C).
“Les bas salaires des fonctionnaires sont la recette assurée pour la corruption”, a-t-il lancé le 15 février lors d’un débat entre les principaux candidats, en plaidant pour une augmentation des traitements des fonctionnaire et une application systématique de la loi.
Les travaux d’une “Commission anti-corruption” créée par le pouvoir n’ont convaincu, ses enquêtes s‘étant généralement enlisées.
Le parti au pouvoir pourrait également pâtir de sa gestion des inondations qui ont fait plus de mille mort en août dans la périphérie de Freetown et plongé dans le plus grand dénuement de nombreuses familles.
Statut des femmes
La présence de seulement deux candidates pour la présidence illustre le statut peu enviable des femmes en Sierra Léone, qui pour beaucoup vivent dans la précarité et sont confrontées à l’un des taux de mortalité maternelle parmi les plus élevés au monde.
La police a interdit la pratique de l’excision, qui concerne près de 90 % des femmes, pour la durée de la campagne après que des candidats eurent été accusés de financer cette mutilation génitale féminine (MGF) marquant le passage de l’enfance à l‘âge adulte en échange de voix.
Mais la mesure a été désapprouvée par des associations de femmes pro-MGF, pour qui la pratique fait partie de la culture du pays.
Une proposition de loi autorisant l’avortement est par ailleurs restée dans les tiroirs de la présidence depuis 2016.
Projets chinois controversés
Deux projets d’infrastructure développés par la Chine – une autoroute à péage et un nouvel aéroport – ont fait l’objet d‘échanges enflammés lors du débat du 15 février.
Mohamed Kamarimba, du Parti de l’Alliance démocratique (ADP, gauche), a promis d’y mettre un terme, tandis que Kandeh Yumkella a prôné un réexamen du projet d’autoroute, trop coûteux selon lui.
Julius Maada Bio est allé plus loin en affirmant que “la plupart des projets d’infrastructure chinois étaient des supercheries n’apportant aucun bénéfice à l‘économie du pays ou à ses habitants”.
AFP
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