Kenya
Au Kenya, le féminicide n’est toujours pas reconnu comme une infraction juridique spécifique, malgré une augmentation constante des cas ces dernières années. Femmes et jeunes filles continuent d’être victimes de violences extrêmes, dans un contexte où les réponses institutionnelles restent limitées.
Parmi ces drames figure celui de Mary Wambui, une fillette de 10 ans, tuée il y a trois ans. Ce jour-là, elle jouait à l’extérieur de son domicile. Ne la voyant pas rentrer, sa mère, Lenah Kanywa, et sa sœur aînée partent à sa recherche. La dernière piste mène à la maison d’un voisin, le fils adulte du propriétaire. L’homme est aujourd’hui jugé pour l’agression et le meurtre de l’enfant.
« Quand j’ai éclairé sous le lit, j’ai vu la jambe de Mary. Quand je l’ai sortie, j’ai vu qu’elle avait été poignardée », témoigne Lenah Kanywa.
Des chiffres alarmants
Le cas de Mary est loin d’être isolé. En janvier 2024, un rapport conjoint d’Africa Data Hub et d’Africa Uncensored a révélé un nombre record de féminicides au Kenya en 2023. La publication de ces données a provoqué une vague de manifestations, rassemblant des milliers de personnes à travers le pays.
Face à la pression populaire, le gouvernement a mis en place un groupe de travail chargé d’enquêter sur la hausse des féminicides. Des réunions publiques ont été organisées, mais pour les organisations de défense des droits des femmes, ces mesures restent insuffisantes.
Pour Njeri Migwi, fondatrice de l’ONG Usikimye, la priorité doit être donnée à un soutien immédiat des victimes et de leurs familles dès le premier contact avec les autorités.
« Nous avons besoin d’un soutien psychosocial dès l’arrivée au commissariat. Ce rôle ne devrait pas être assuré par un policier, mais par un psychologue capable d’accompagner les victimes dans leur processus de guérison », explique-t-elle.
Afin de sensibiliser le public aux violences sexistes, Usikimye a lancé une exposition itinérante à travers le Kenya. Robes symboliquement tachées de sang, reconstitution d’un commissariat impersonnel, mémorial dédié aux victimes : les installations frappent les visiteurs par leur dureté.
Lors de l’un des vernissages, Lenah Kanywa a pris la parole. Grâce à l’accompagnement psychologique et aux groupes de soutien proposés par l’ONG, elle a retrouvé la force de témoigner.
« J’ai commencé à parler. Avant, je restais silencieuse parce que je souffrais énormément. En rencontrant d’autres femmes, j’ai compris que je n’étais pas seule », confie-t-elle.
Trois ans après le meurtre de sa fille, l’affaire de Mary est enfin devant les tribunaux. Lenah espère obtenir justice, même si elle sait que rien ne pourra effacer la perte de son enfant. Comme pour de nombreuses familles au Kenya, le combat contre le féminicide est aussi une lutte pour la reconnaissance, la protection et la dignité des victimes.
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