Gabon
Un délai de deux ans avant les élections libres promises au Gabon par les militaires ayant renversé le président Ali Bongo est un "objectif raisonnable", a estimé dimanche auprès de l'AFP le Premier ministre de transition.
Le 30 août, l'armée a renversé Ali Bongo Ondimba, au pouvoir depuis 14 ans, quelques instants après qu'il a été proclamé réélu au terme d'une élection jugée frauduleuse par les militaires et l'opposition.
Le général Brice Oligui Nguema, proclamé Président de la transition, a promis aussitôt de rendre le pouvoir aux civils par des élections au terme d'une période dont il n'a pas annoncé la durée.
"Il est bon de partir sur un objectif raisonnable en disant: nous avons le souhait de voir le processus aboutir en 24 mois pour qu'on puisse revenir à des élections", a déclaré Raymond Ndong Sima, civil nommé Premier ministre jeudi dernier par les militaires, ajoutant que cette période pourrait être "légèrement supérieure ou inférieure".
M. Ndong Sima, 68 ans, a été porté à la tête du gouvernement de la transition par le général Oligui Nguema. Il était auparavant l'un des ténors de l'opposition à M. Bongo.
Le coup d'Etat du 30 août s'est fait en quelques instants et sans effusion de sang, tous les chefs de corps de l'armée et de la police s'étant rassemblés derrière le général Oligui.
Les militaires putschistes, qui jouissent du soutien d'une très grande majorité de la population et de l'opposition, assurent avoir agi pour "préserver des vies humaines" après une élections frauduleuse et pour mettre fin à la "mauvaise gouvernance" et la "corruption" dont ils accusent le clan Bongo.
Samedi, M. Ndong Sima a annoncé la composition de son gouvernement nommé par le général Oligui, et qui comprend d'anciens ministres du président déchu, des membres de l'ex-opposition et des personnalités de la société civiles auparavant hostiles à M. Bongo et sa famille, qui dirigeait le pays depuis plus de 55 ans.
La Charte de transition mise en place par les militaires interdit aux membres du gouvernement provisoire de se présenter aux prochaines élections, M. Ndong Sima compris, mais n'exclut pas explicitement que le général Oligui puisse alors briguer la présidence.
Ce dernier a également promis une nouvelle Constitution qui sera adoptée par référendum et un nouveau code électoral, avec la participation de "toutes les forces vives de la Nation".
"Le principe annoncé" par les militaires, "c'est qu'il n'y a plus ni opposition, ni majorité, donc on prend des gens dans toutes les familles politiques", a commenté le Premier ministre.
"Les gens qui vont (...) préparer différents textes, discuteront de cet aspect des choses, c'est-à-dire de la durée (de la transition), et de qui est véritablement habilité à se présenter et à ne pas se présenter", a expliqué M. Ndong Sima.
"Il ne serait pas bon que les militaires se présentent, pour qu'ils soient des arbitres impartiaux et objectifs de l'élection", a-t-il toutefois estimé.
Mains libres ?
La désignation par le général Oligui Nguema, à la Présidence de la transition comme au sein du comité de militaires qui forme son équipe rapprochée, d'officiers chargé de la plupart des mêmes secteurs que les ministres de M. Ndong Sima pose la question de l'autonomie et des marges de manœuvre de son gouvernement civil.
"Ce n'est pas nouveau d'avoir aux côtés du président (du Gabon) des chefs de départements qui assurent l'interface entre le président et les départements ministériels", a nuancé M. Ndong Sima.
"Est-ce que j'aurai les mains libres ? Ça, je ne peux pas le savoir à l'heure actuelle, on le verra" et "ça dépendra de ce que les militaires voudront obtenir", a-t-il estimé, ajoutant: "S'ils veulent obtenir un résultat satisfaisant, ce sera leur intérêt de laisser les mains libres à ceux qu'ils ont appelés".
D'autant que "c'est eux (...) qui vont porter le bilan de ce que nous allons faire", donc "c'est l'intérêt des militaires de donner à ceux qu'ils appellent la possibilité de travailler et d'atteindre des résultats", a-t-il affirmé.
M. Ndong Sima, qui indiquait le 4 septembre à l'AFP être "intéressé" par les prochaines élections, a assuré que "la situation du pays exige que chacun fasse un petit compromis sur sa propre position".
Quitte à renoncer à la présidentielle ?
"Vous savez j'ai l'habitude de dire que l'avenir appartient à Dieu", a-t-il répondu.
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