République démocratique du Congo
Les troupes de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) vont entamé leur retrait progressif de la République démocratique du Congo (RDC). Cette décision intervient alors que le groupe rebelle du M23, soutenu par le Rwanda, continue de progresser dans l’est du pays.
Déployée en décembre 2023, la force militaire de la SADC, composée de soldats sud-africains, tanzaniens et malawiens, avait pour mission d’appuyer l’armée congolaise face aux offensives du M23 dans la province du Nord-Kivu. Cependant, confrontées à des combats intenses et à des pertes humaines importantes, ces troupes ont vu leur présence remise en question, notamment en Afrique du Sud, où des critiques sur le coût et l’efficacité de l’opération se sont multipliées.
De son côté, la RDC voit ce retrait comme un revers dans sa lutte contre le M23, alors que l’armée congolaise peine à contenir l’avancée des rebelles, notamment autour de Goma, capitale du Nord-Kivu.
Sanctions ciblées de l’Union européenne
En parallèle, l’Union européenne a décidé d’imposer des sanctions à l’encontre de neuf individus impliqués dans les violences en RDC. Parmi eux figurent des membres de groupes armés non étatiques actifs dans l'est et le nord-est du pays, tels que le M23, les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), les Forces démocratiques alliées (ADF), l'Alliance des patriotes pour un Congo libre et souverain (APCLS), et la Coopérative pour le développement du Congo (CODECO).
Ces sanctions, qui incluent une interdiction de voyager dans l’UE et un gel des avoirs, visent à accroître la pression sur les acteurs perpétuant l’instabilité dans la région.
Vers des négociations inévitables avec le M23 ?
Face à ces développements, la pression diplomatique s’intensifie sur Kinshasa pour qu’elle privilégie la voie du dialogue. Selon des sources diplomatiques, la RDC envisage désormais d’envoyer des représentants aux pourparlers de paix organisés par l’Angola sous l’égide de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL).
"L’équilibre fragile entre sanctions et négociations ne suffit plus", estime Christian Moleka, analyste politique congolais. "Le retrait de la SADC montre que Kinshasa ne peut compter que sur elle-même pour stabiliser l’Est. Il est temps de revoir la stratégie militaire et politique face au M23."
"Les pressions diplomatiques s’intensifient sur Kinshasa pour ouvrir des négociations directes ou indirectes avec le M23. On l’a vu dans la résolution 2773 du Conseil de sécurité, dans les décisions de l’Union africaine et lors du sommet conjoint EAC-SADC. Sur le terrain, la rébellion continue de progresser, avec la menace d’une extension des combats vers le Maniema, la Tshopo ou même le Katanga", a-t-il ajouté.
Moleka souligne également la nécessité pour le gouvernement congolais de renforcer ses capacités militaires et de promouvoir une cohésion nationale pour faire face aux défis sécuritaires persistants.
"La complexité de la question congolaise, c'est que les parties prenantes ont toujours joué à l'équilibrisme, une forme de funambulisme où on donne un point à Kinshasa et un point à Kigali. Cette approche est défavorable à Kinshasa. Autant on a exercé une pression diplomatique sur le Rwanda, autant on lui accorde des compensations. Ce positionnement ne résoudra pas le problème en profondeur. Il faut que la communauté internationale assume enfin qu'il y a un agresseur et un agressé." — Christian Moleka, analyste politique
Le départ des forces de la SADC est perçu comme un échec stratégique pour Kinshasa, qui espérait réitérer le scénario de 2013 en mettant le M23 en difficulté sur le terrain militaire. Mais les Forces armées de la RDC (FARDC) manquent de moyens et peinent à contenir l’avancée des rebelles.
Une armée à réformer en profondeur
Au-delà des opérations militaires, la RDC doit engager des réformes structurelles pour renforcer son appareil sécuritaire, souligne Christian Moleka :
"Il faut une cohésion intérieure et une restructuration du commandement militaire. Tout dépendra de la capacité du président Tshisekedi à manœuvrer politiquement pour instaurer une véritable cohésion et réduire les conflits internes. Sans cela, il sera difficile d’avoir une armée capable de répondre aux défis sécuritaires."
Un contexte régional explosif
Ce retrait survient alors que les Nations unies et les organisations humanitaires alertent sur l’aggravation de la crise humanitaire : plus de 600 000 personnes ont été déplacées depuis novembre 2024, fuyant les combats entre l’armée congolaise et les rebelles.
Le départ des forces de la SADC laisse la RDC face à une situation incertaine. Alors que le M23 continue son avancée, Kinshasa devra rapidement trouver une réponse efficace, qu’elle soit militaire ou diplomatique, pour éviter une escalade encore plus dramatique du conflit.
Aller à la video
Paris : carton plein pour le concert "Solidarité Congo"
09:38
Voyage à Goma : Joseph Kabila a-t-il tout perdu ? [Africanews Today]
02:25
RDC : à Goma, la Pâques sous haute tension dans l'ombre du M23
01:24
RDC : le parti de Kabila suspendu pour "complicité avec le M23"
02:22
Retour de Kabila en RDC : un signal fort pour la paix ?
Aller à la video
RDC : Joseph Kabila est rentré d'exil