Ouganda
Les militants ougandais de défense des droits humains réclament des sanctions contre les autorités de ce pays d'Afrique de l'Est, après la promulgation d'une "loi anti-homosexualité" qui, selon eux, "légalise l'homophobie et la transphobie".
Le président Yoweri Museveni a approuvé cette loi, considérée comme l'une des plus répressives au monde en dépit de mises en garde de ses partenaires internationaux.
Baptisé "Loi anti-homosexualité 2023", le texte prévoit de lourdes peines pour les personnes ayant des relations homosexuelles et faisant la "promotion" de l'homosexualité. Un délit d'"homosexualité aggravée" est passible de mort, une peine qui n'est toutefois plus appliquée depuis des années en Ouganda.
"C'est un moment-clé pour les parties intéressées, comme les États-Unis et l'UE, pour aller de l'avant avec des sanctions contre les Ougandais impliqués dans des violations des droits de l'homme", appelle une coalition d'organisations de défense des droits humains dans un communiqué publié lundi soir.
Cette loi "dangereuse et discriminatoire" criminalise "toute défense en faveur des droits des Ougandais LGBTQ+, punissant ce travail légitime d'une peine pouvant aller jusqu'à 20 ans de prison", écrivent ces organisations. "Cela détruira la lutte contre le HIV", ajoutent-elles.
"La criminalisation et la suppression de la défense légitime des droits humains sont inacceptables dans une vraie démocratie", a déclaré Clare Byarugaba de l'association Chapter Four Uganda, l'une des organisations de la coalition, dans le communiqué.
"Malgré nos efforts concertés pour empêcher l'adoption du projet de loi anti-homosexualité, le président a légalisé l'homophobie et la transphobie sous le parrainage de l'État", estime Frank Mugisha, directeur de Sexual Minorities Uganda, également membre de la coalition.
Cette coalition a déposé un recours devant la cour constitutionnelle ougandaise.
Cette promulgation a suscité une vague internationale d'indignation. Le secrétaire général de l'ONU est "très inquiet" et "appelle les États membres à respecter la Déclaration universelle des droits de l'Homme", a déclaré mardi son porte-parole Stéphane Dujarric.
"Il appelle encore une fois tous les pays à dépénaliser les relations consenties entre personnes du même sexe et les personnes transgenres. Pour être clair, personne ne devrait être pénalisé, emprisonné, pour qui il aime", a-t-il insisté.
Le président américain Joe Biden, dénonçant une "atteinte tragique" aux droits humains, a de son côté déclaré avoir demandé à son administration d'étudier les conséquences de cette loi "honteuse" sur "tous les aspects de la coopération entre les Etats-Unis et l'Ouganda".
Les autorités américaines envisagent "des mesures supplémentaires", comme des sanctions ou des restrictions d'entrée sur leur territoire pour "toute personne associée à des violations des droits de l'homme ou des faits de corruption", a-t-il ajouté.
Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a dénoncé une loi "contraire aux droits humains".
"Le gouvernement ougandais a l'obligation de protéger tous ses citoyens et de faire respecter leurs droits fondamentaux. S'il ne le fait pas, les relations avec les partenaires internationaux s'en trouveront compromises", a-t-il affirmé.
En 2014, des bailleurs avaient déjà réduit leur aide après le vote d'une loi réprimant l'homosexualité dans le pays. Washington avait notamment suspendu le financement de programmes destinés au gouvernement et imposé des interdictions de visas. Des pays de l'UE (Danemark, Suède, Norvège, Pays-Bas...) avaient également gelé une partie de leur aide bilatérale.
La loi avait finalement été annulée par la Cour constitutionnelle pour un vice technique lors du vote. Les partisans de la "loi anti-homosexualité 2023" ont déclaré dès lundi s'attendre à voir les financements occidentaux réduits.
"Ils vont couper des aides à l'Ouganda", a déclaré Asuman Basalirwa à la presse, un parlementaire à l'initiative du texte, estimant que le pays devrait se tourner vers de nouveaux "partenaires de développement", notamment dans le monde arabe.
La loi bénéficie d'un large soutien populaire et les réactions d'opposition ont été rares dans le pays, dirigé d'une main de fer depuis 1986 par Yoweri Museveni.
S'il n'y a pas eu de poursuites récentes pour des actes homosexuels, harcèlement et intimidations sont le quotidien des homosexuels en Ouganda, où s'est développé un christianisme évangélique hostile au mouvement LGBTQ+.
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