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Inspire Middle East : le meilleur du cinéma arabe au festival d'El Gouna

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Cette semaine, Inspire Middle East vous emmène en Egypte pour la troisième édition du festival du film d’El Gouna, qui a notamment couronné le cinéma saoudien. Notre reporter Rebecca Mac-Laughlin Eastham s’est entretenue avec plusieurs célébrités, comme Steven Seagal ou Hend Sabry. Enfin, Salim Essaid a rencontré la cinéaste émiratie Nayla Al Khaja, qui cherche à réaliser son premier film d’horreur.

Pour cette nouvelle édition, le festival du film d’El Gouna a présenté 84 films originaires de 41 pays. Les cinéastes soudanais se sont démarqués, en remportant certains des prix les plus prestigieux.

Le réalisateur Amjad Abu Alala s’est vu décerner l‘Étoile d’or du meilleur long métrage de fiction, ainsi que 50 000$, pour son film Tu mourras à 20 ans, qui raconte l’histoire d’un jeune garçon condamné par une prophétie religieuse à mourir à l‘âge de 20 ans.

“ [Ce prix] veut dire beaucoup, pour un pays que ne fait pas de cinéma, s’enthousiasme le réalisateur, Amjad Abu Alala. C’est une mauvaise chose qu’il n’y ait pas d’industrie du cinéma au Soudan, et je pense que c’est utile de raconter ces histoires jamais entendues.”

La consécration des cinéastes saoudiens

Un autre réalisateur saoudien, Suhaib Gasmelbari, a remporté le prix du meilleur documentaire pour son film Talking about trees. Ce film raconte l’histoire de quatre amis, partis d’Arabie Saoudite dans les années 1960 pour étudier le cinéma à l‘étranger. Après des années d’exil, ils se réunissent pour réaliser leur rêve : faire revivre le cinéma dans leur pays.

Des cinéastes européens étaient également présents à El Gouna, aux côtés de leurs confrères du Moyen-Orient. Douleur et Gloire du réalisateur espagnol Pedro Almodovar a notamment été diffusé pour la première fois en Egypte.

La journaliste et réalisatrice française Caroline Fourest a présenté son premier film de fiction, Sœurs d’armes. Il raconte le calvaire et le combat contre l’organisation Etat Islamique de femmes yézidies, une communauté ethno-religieuse kurde du nord de l’Irak.

“Nous faisons des films pour franchir les frontières, estime la réalisatrice. Et ce film est très spécial parce que c’est le premier film de guerre féministe, il montre que les femmes ont vraiment terrorisé les djihadistes pendant la guerre et le diffuser ici en Egypte, c’est vraiment quelque chose de très spécial”.

Le tapis rouge n’a pas déçu. Les acteurs et réalisateurs étaient sublimés par les tenues des créateurs du Moyen-Orient. Mais tout n’était pas que paillette et glamour : l’Unicef et le festival d’El Gouna ont signé un accord pour soutenir les droits des enfants défavorisés en Egypte et dans la région, d’une durée de cinq ans. Ces organismes espèrent que la voix des plus vulnérables sera entendue, à travers le cinéma.

Une myriade de célébrités locales et internationales

Lors de cette troisième édition du festival, trois thèmes ont dominé les conversations : l’émergence des films saoudiens, les nouveaux dialogues, plus dynamiques, utilisés par les cinéastes tunisiens, et l’émergence d’une industrie régionale du divertissement sur le modèle d’Hollywood.

Pour parler de ces productions, Inspire Middle East a rencontré Lindsay Sloane, des studios MGM à Los Angeles. Elle a notamment travaillé sur la série primée The Handmaid’s Tale, une adaptation du roman dystopique de Margaret Atwood. “Lorsque qu’on a travaillé sur cette série, nous savions qu’elle était très spéciale et que c‘était une bonne série. Mais on ne sait jamais comment cela va fonctionner avec le public, s’il va penser la même chose. Nous sommes très chanceux que ça ait marché et très reconnaissants”, raconte Lindsay Sloane.

La productrice est venue plusieurs fois à El Gouna. Selon elle, on peut établir des parallèles entre l’industrie cinématographique en plein essor de la région MENA et celle des États-Unis à ses débuts. “J’ai été étonné de voir que l’art est vraiment un langage universel et que les gens y mettent tout leur cœur et leur âme et le célèbrent, comme nous le faisons aux États-Unis. C‘était très agréable de voir cela.”

Au début de sa carrière, Linsday “pensait comme un homme, mais se comportait comme une dame”, selon ses propres mots. Elle était également la seule femme de son service de production. “Beaucoup de choses ont changé depuis mes débuts, estime-t-elle. Mais je dois avouer que j’ai été très chanceuse et que d’autres femmes n’ont pas eu la même expérience. Dans mon service, j’étais très écoutée, on appréciait que j’apporte un regard différent.” Elle a un conseil pour les femmes qui voudraient embrasser la même carrière : “N’ayez pas peur d’exprimer votre opinion”.

Noura rêve, un film déconcertant

Parmi les autres invités venus tout droit de Los Angeles se trouvait Steven Seagal, surtout connu pour son rôle dans Piège en haute mer. Nous l’avons interrogé sur les récents changements technologiques et sociaux à Hollywood, notamment en terme de salaire.

“C’est une question un peu politique. Mais je pense que dans certains domaines, il y a eu des progrès merveilleux et très inspirants. Et que dans d’autres domaines, ça va plutôt dans une très mauvaise direction. Il y a un peu deux mondes qui vont dans des directions opposée_s”, estime l’acteur. Lui aussi a un conseil pour les jeunes qui souhaiteraient se lancer dans l’industrie du cinéma : “A mon humble avis, il faut faire des choses dans lesquelles vous croyiez sincèrement. Si vous y croyez suffisamment et si vous avez le bon karma, alors vous y arriverez.”

L’actrice tunisienne Hend Sabry a été élue « Meilleure Actrice ». Son dernier film, Noura rêve, a été projeté pour la première fois au festival d’El Gouna. Il raconte l’histoire d’une femme dont le mari, violent, est en prison, et qui risque elle-même l’emprisonnement pour avoir commencé une nouvelle vie avec son amant.

Un long-métrage percutant, qui a décontenancé le public. “ Il y a eu 2-3 minutes de silence à la fin du film, avant les applaudissements. Les gens étaient un peu apeurés, choqués, surpris. C’est une réaction que le cinéma doit provoquer”, raconte l’actrice. Selon elle, ce silence s’explique par plusieurs choses, propre à la région.

L’actrice tunisienne a toujours déclaré qu’elle n‘était pas intéressée par une carrière à Hollywood. Un sentiment qui perdure aujourd’hui, malgré la nouvelle notoriété des acteurs et actrices arabes à travers le monde. “On a d’avantage besoin de moi ici, pour jouer des rôles différents, plutôt que pour des rôles stéréotypés à Hollywood, qui montrerait une seule facette de l’identité arabe.”

Hend Sabry a dernièrement tourné dans son premier film d’horreur, un genre encore peu populaire au Moyen-Orient. “ Pourtant, dans la région, nous sommes habitués à ces histoires de possession, explique l’actrice. Les djinns, ça fait partie de notre culture. Mais le cinéma ou les cinéastes n’ont jamais voulu explorer cela sérieusement. Personnellement, je suis très contente de ce que j’ai fait dans « Blue Elephant », mais je ne suis pas un fan des films d’horreur. Jouer la méchante par contre, c’est quelque chose que je veux approfondir.”

L‘émergence des films d’horreur arabes

Le genre de l’horreur n’a jamais été réellement exploré par les réalisateurs arabes dans la région, mais Nayla Al Khaja espère bien changer cela. Cette réalisatrice indépendante a participé à la création de l’industrie cinématographique aux Emirats Arabes Unis, il y a 15 ans.

“A l‘époque, les gens ne s’intéressaient pas au cinéma. Quand vous vouliez faire un film, ils ne comprenaient pas l’intérêt, à moins qu’il ne s’agisse d’une publicité télévisée”, se souvient-elle.

Depuis, Nayla Al Khaja a abordé des sujets controversés, avec des films comme Animal, sorti en 2016, sur un père sociopathe qui tourmente sa famille.

Aujourd’hui, la réalisatrice et productrice, plusieurs fois récompensée, se lance dans son premier film d’horreur : The Shadow. Il raconte l’histoire d’une enfant de neuf ans, malade et victime de phénomènes incontrôlés. Sa mère tentera tout pour lui sauver la vie.

Le film est en grande partie tourné en dialecte émirati, avec des acteurs locaux. “J’aime l’horreur parce que j’ai grandi dans une atmosphère de peur, nous avions des parents stricts et je pense que ça a marqué mon imagination, raconte Nayla Al Khaja. J’aime beaucoup jouer avec la lumière pour créer une ambiance.”

Sa passion est née dans l’enfance, lorsque sa grand-mère lui racontait l’histoire d’Umm Dwais, une femme fantôme du folklore émirati, qui attirait des hommes dans le désert pour les tuer.

Même si ce genre n’est pas encore très populaire dans la région, plusieurs films d’horreur ont été réalisés, notamment en Egypte. L’un d’entre eux, qui a connu un grand succès, raconte l’histoire vraie de Raya et Sukaina, au début du XXe siècle. Ces tueuses en série ont, à l’aide de leurs maris, assassiné et enterré 17 femmes dans leur maison à Alexandrie.

Leur histoire a inspiré des pièces de théâtre, une série télévisée et bien sûr, un long-métrage. D’autres films d’horreur ont suivi, notamment The Ambassador of Hell, en 1945, sur un homme qui fait un pacte avec le diable. Ou encore Kandisha en 2008, l’histoire d’un avocat marocain qui enquête sur un meurtre surnaturel. A cette liste s’ajoutera bientôt The Shadow de Nayla Al Khaja, qui espère faire frissonner le public à la fin de cette année.

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