Guinée
Loffo Camara. Un nom qui ne dira pas grand chose à la jeune génération. Enfouie dans certains livres d’histoire, son histoire parfois réécrite ou tout simplement bafouée, cette femme a pourtant été l’une des fiertés de la gente féminine en Afrique. Pourtant… sa mort n’en sera que plus violente.
Toutes les histoires à son propos, du moins celles que nous avons parcourues, convergent vers un même point : Loffo Camara a été une victime de la révolution guinéenne à laquelle elle s‘était pourtant voué corps et âme.
Membre – pionnière du Parti démocratique de Guinée (PDG) et du Bureau Politique national du PDG, cette ancienne sage-femme a été la première femme au sein du gouvernement de la Première République de Guinée. Elle était alors ministre des Affaires sociales de 1961 à 1968. Une première dans la jeune Afrique nouvellement indépendante.
Sur son bilan à la tête de ce département, peu d’informations ou rien quasiment. On retient cependant qu’elle fut l’un des fers de lance de l‘émancipation de la femme en Guinée. Cette originaire de Macenta – dans le sud-ouest de la Guinée – était une férue de la couture. Un hobby qu’elle mettait d’ailleurs au service de son parti, le PDG, en confectionnant les vêtements des femmes du parti, et en leur partageant sa passion.
Mais cette belle histoire avec le parti indépendantiste guinéen a connu un épilogue des plus macabres au début de la décennie 70. En effet, quelque deux années après l’indépendance guinéenne, Loffo Camara et certains de ses compagnons de route proposent une restructuration au sein du PDG. Ils suggèrent notamment de mettre fin au cumul des postes, ou encore que les membres du gouvernement soient élus par les membres du parti.
Des orientations qui irritent le chef de l’Etat de l‘époque et père de l’indépendance, Sékou Touré. En 1967, Loffo Camara fait partie des ministres laissés sur le carreau lors d’un remaniement ministériel. L‘équipe de quinze ministres sera réduite à sept. Mais elle n‘était pas encore au bout de ses peines.
Une martyre de la révolution
Car en décembre 1970, accusée de complot, elle fut arrêtée dans le cadre de l’opération Mer Verte avant d‘être transférée dans l’infernal Camp Boiro, considéré comme le symbole des années noires du régime Sékou Touré. De ces moments passés dans ce camp, les historiens retiennent des cas de tortures, de traitements inhumains. Amadou Diallo, prisonnier survivant du camp et auteur du livre La mort de Telli Diallo, paru aux éditions Karthala raconte :
“On les avait rasées, sans doute pour les humilier, puis comme aux hommes, on leur avait appliqué l‘électricité. Allongées sur une natte, jambes écartées, des électrodes avaient pincé leurs oreilles, leur nez, leur bouche, leurs doigts, avaient été introduits dans leur vagin et le courant les avait traversées. De ces séances, elles étaient sorties en sang.”
Le 25 janvier 1971, Loffo Camara tombe sous les balles assassines d’un peloton d’exécution commandité par Sékou Touré. Elle fut enterrée dans une fosse commune avec cinq de ses compagnons d’infortune. Plus de 47 ans après son brutal assassinat, les restes de cette martyre de la révolution guinéenne n’ont pas été rendus à sa famille.
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