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France : le journaliste Olivier Dubois revient sur sa captivité au Mali

France : le journaliste Olivier Dubois revient sur sa captivité au Mali
Le journaliste français Olivier Dubois arrive au salon VIP de l'aéroport de Niamey, au Niger, le 20 mars 2023   -  
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Judith Besnard/Copyright 2023 The AP. All rights reserved.

France

Pour un correspondant étranger au Mali, la mission semblait être un rêve : alors que les extrémistes islamistes bouleversaient la région, Olivier Dubois, un journaliste français, a obtenu une rare interview avec un dirigeant du JNIM, une filiale d'Al-Qaida au Sahel.

C'est du moins ce qu'il pensait. En avril 2021, alors qu'il se rendait à Gao, dans le nord du Mali, pour une interview, Olivier Dubois, correspondant de Libération et de Jeune Afrique, a été enlevé.

Il a passé 711 jours dans le désert, dormant enchaîné à un arbre, mangeant de la viande de chèvre séchée et préparant son évasion. Près de deux ans après sa libération, il raconte son calvaire dans un livre publié jeudi en France, qui s'inspire largement des notes qu'il a secrètement conservées pendant sa captivité, écrites sur tous les bouts de papier qu'il pouvait trouver.

"L'un des principaux facteurs qui m'ont aidé à résister et à survivre a été de me dire que j'étais un journaliste", a déclaré M. Dubois à l'Associated Press lors de la première interview accordée à un média anglophone depuis sa libération. "Continuons à recueillir des informations, continuons à poser des questions et faisons comme si je travaillais."

Coup d'Etat

Ces dernières années, les pays du Sahel que sont le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont été bouleversés par des coups d'État militaires et sont désormais dirigés par des juntes militaires, qui luttent contre la montée de la violence extrémiste et ont fait des enlèvements la pierre angulaire de leur stratégie dans la région.

Après sa libération, les médias français ont publié une enquête révélant que le fixeur de M. Dubois avait travaillé avec les services de renseignement français, qui l'avaient utilisé pour localiser le chef extrémiste qu'il essayait d'interviewer.

M. Dubois a déclaré à l'AP qu'il savait que son projet était risqué, mais qu'il avait trop fait confiance à son fixeur et qu'il avait ignoré les signes avant-coureurs.

"Je ne suis pas sûr", a-t-il déclaré à propos des circonstances de son enlèvement. "Je pense qu'il s'agit d'une trahison. Mais le motif de cette trahison n'est pas encore clair. Je n'ai pas parlé à mon fixeur depuis que j'ai été libéré".

Enlèvements

Les enlèvements ont explosé au Sahel ces dernières années, selon les données de l'Armed Conflict Location & Event Data Project (ACLED), une organisation basée aux États-Unis.

Le JNIM, la branche sahélienne d'Al-Qaïda, est responsable de la plupart des 1 468 enlèvements commis au Sahel et au Bénin entre 2017 et 2025, selon l'ACLED. Le groupe compte sur l'argent des rançons pour financer ses opérations et sur la peur qu'il inspire aux populations locales pour les maintenir sous contrôle.

Olivier Dubois s'est souvenu qu'on lui avait dit qu'il serait "libéré rapidement" si sa famille et son gouvernement faisaient ce qu'on leur demandait. Il a été libéré le 20 mars 2023 à Agadez, au Niger, mais les détails de sa libération, y compris le versement éventuel d'une rançon, n'ont pas été divulgués.

Le président français Emmanuel Macron a écrit sur la plateforme sociale X "Olivier Dubois est libre", mais il n'a pas précisé les conditions de sa libération.

S'adressant à l'AP, M. Dubois a déclaré qu'il ne connaissait pas non plus les détails, mais qu'il se souvenait d'avoir été informé par les rebelles que les rançons variaient en fonction de la nationalité. En tant que citoyen français, il valait 10 millions d'euros, lui a-t-on dit. Un Sud-Africain valait 50 millions.

Ayant couvert de nombreuses histoires d'otages dans la région, Olivier Dubois savait que même s'il était libéré, son calvaire pourrait être long.

Otage anonyme

Pour ne pas perdre la raison, il est devenu obsédé par l'idée de s'évader. Mais après la quatrième tentative infructueuse, ses ravisseurs ont organisé un simulacre d'exécution et l'ont menacé de le tuer s'il essayait à nouveau. Au lieu de cela, Dubois s'est mis à lire le Coran.

La lecture du livre saint de l'islam avait un double objectif : elle occupait son esprit et l'aidait à mieux comprendre ses ravisseurs, à discuter avec eux et à établir une relation, afin qu'ils puissent le traiter davantage comme un être humain et moins comme un otage anonyme.

De manière inattendue, cela l'a également mis sur une voie plus spirituelle.

"Je suis un ancien athée, puis un agnostique qui pensait s'arrêter là", explique-t-il. "La lecture du Coran m'a donné envie de lire d'autres textes religieux. Cette captivité a été le début d'un voyage qui me conduira peut-être à Dieu - ou pas".

Maintenant que son livre - "Prisonnier du désert, 711 jours aux mains d'Al-Qaïda" - est sorti, Olivier Dubois a déclaré qu'il espérait être prêt à retourner au journalisme et à passer à autre chose. Mais l'expérience le hante encore.

"C'était un travail douloureux", a-t-il déclaré à propos du processus d'écriture. "Le premier réflexe après l'avoir terminé a été de prendre mes distances avec l'histoire, en espérant que le temps passerait et que, peut-être, tout cela serait derrière moi. Mais je ne sais pas vraiment si c'est possible".

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