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Côte d'Ivoire : peur sur la ville de Ferké après les attaques jihadistes dans le Nord

Côte d'Ivoire

“La population a peur. Ce qui est arrivé, le Mali et le Burkina l’ont connu”, affirme Kiali Ouattara, chef traditionnel à Ferkessédougou, dans le nord de la Côte d’Ivoire, après l’attaque jihadiste qui a coûté la vie à 13 militaires à Kafolo, à moins de 100 km, sur la frontière burkinabè.

“Je vois des patrouilles de la gendarmerie sillonner la ville mais la peur demeure”, après l’attaque du 11 juin, ajoute ce chef de canton de “Ferké”, la capitale régionale. Les opérations militaires se poursuivent encore dans la zone de Kafolo, dont l’accès est interdit à la presse.

“Le commando qui a attaqué Kafolo appartient à la katiba Macina d’Amadou Koufa”, affirme une source sécuritaire, en référence au groupe du prédicateur radical peul, implanté dans le centre du Mali et appartenant au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), principale alliance du Sahel affiliée à Al-Qaïda.

L’attaque du poste mixte armée-gendarmerie était une réplique à l’opération “Comoé” (fleuve entre les deux pays) des armées ivoirienne et burkinabè pour déloger des jihadistes installés dans le nord de la Côte d’Ivoire.

Une soixantaine de personnes, dont le “chef du commando”, un Burkinabé, ont été arrêtées, soit après l’assaut de Kafolo, soit avant (pendant l’opération Comoé), selon les autorités.

C’est la première attaque jihadiste en Côte d’Ivoire depuis Grand Bassam en 2016 (19 morts). Toutefois, à l’inverse de l’attentat qui a frappé la station balnéaire du Sud, cette fois ce n’est pas un commando suicide qui s’est déplacé, mais certains des assaillants étaient implantés dans la zone, souligne une source sécuritaire qui juge cette attaque “beaucoup plus inquiétante”.

Implantation à long terme

La présence de jihadistes dans cette contrée enclavée, peu peuplée, avec des petites forêts, était signalée depuis plus d’un an. Profitant de frontières poreuses, les groupes se servaient sans doute du territoire ivoirien comme d’une base de repos avant d‘être “dérangés”.

“Il y a probablement une stratégie d’implantation sur le long terme”, estime une source sécuritaire, qui trace des parallèles avec l’apparition du jihadisme au Burkina il y a 5 ans: “On a minimisé au début, regardez le résultat”.

“Au Burkina, les jihadistes proposent à des jeunes de devenir leurs AR (agents de renseignement) pour 25.000 F CFA par mois (environ 40 euros, somme importante pour ces régions, NDLR). C’est plus que probable qu’ils font de même en Côte d’Ivoire”, ajoute cette source.

Longtemps délaissé par le pouvoir politique issu du Sud, le Nord majoritairement musulman est le fief du président Alassane Ouattara, élu en 2010 et 2015, et qui y a beaucoup investi. Mais la région reste démunie.

“La pauvreté attire le jihadisme. Les jihadistes font de bonnes propositions aux jeunes et ils sont tentés. Il faut leur expliquer qu’il n’y pas de sous-métiers dans l’agriculture… Même si vous avez 100.000 FCFA (environ 150 euros) dans votre poche, vous ne pouvez pas acheter la vie de quelqu’un”, estime Koné Soungalo, président des jeunes de Ferké.

“On leur explique qu’un terroriste est une personne lambda qui est parmi nous et agit quand il peut ou veut”, ajoute Koné Soungalo, qui participe avec les autorités à des campagnes de sensibilisation. “Il ne faut pas que le chaos arrive ici”.

En première ligne

Les largesses des jihadistes peuvent leur attirer les bonnes grâces des populations qui n’apprécient pas forcément la présence des forces de l’ordre et les contrôles, souvent synonymes d’amendes ou de racket.

Comme le note un opérateur économique, “il y a souvent une connivence” entre les jihadistes et les trafiquants ou contrebandiers en tous genres.

Dans certaines zones, on assiste à une radicalisation ou en tout cas à une “wahhabisation” de la pratique religieuse. Au sud de Ferkessédougou, “Il y a au moins un village où les hommes se rendent désormais seuls à la mosquée et où des femmes se voilent”, contrairement aux habitudes de l’islam local, précise un responsable sécuritaire.

Mohamed Lamine Koné, l’imam de la mosquée principale de Ferké, assure n’avoir jamais vu de cas de radicalisation mais reconnaît: “Le préfet nous a demandé de faire très attention et de le tenir informé”.

“La vie continue mais maintenant on réfléchit avant de se déplacer en dehors de Ferké”, avoue un commerçant.

Le maire Kaweli Ouattara, un proche de l’ex-chef rebelle Guillaume Soro, est inquiet: “Ce qui se passe à Kafolo ou Kong peut se passer ici. Le Mali et le Burkina ne sont pas loin. Nous sommes en première ligne!”.

AFP

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