Etats-Unis
Les Etats-Unis, un pays multiracial où les problèmes de cohabitation entre communautés semblent s‘éterniser. La première puissance économique du monde ne parvient pas à se débarrasser de ses démons, malgré son évolution incontestable. La race reste encore dans ce pays un ‘‘problème’‘ et désormais, ce qu’il convient d’appeler le profilage raciste est dénoncé sur les réseaux sociaux. Les détails.
Des hashtags comme PermitPatty, #IDAdam et #PoolPatrolPaula (pour ne citer que ceux-là) sont crées à la pelle pour contrecarrer ces agissements qui ne se basent souvent que sur la couleur de la peau. Aux Etats-Unis, il n’est pas rare qu’un Blanc saute sur son téléphone pour appeler la police afin de signaler un ‘‘problème’‘ avec un Noir. Et ce, souvent sans raison valable. Mais l’avènement des réseaux sociaux et des smartphones a permis d’apporter un contre-poids à ces agissements racistes.
Parmi le nombre incalculable de profilages racistes au pays de l’Oncle Sam, l’arrestation de deux hommes noirs en avril dernier dans un café Starbucks de Philadelphie qui a, comme qui dirait, mis le feu aux poudres. Ce jour-là, un employé dudit café les avait tout simplement trouvés… suspects, appelant le fameux 911 (le numéro de la police). Il n’en fallait pas plus à la police pour débarquer sur les lieux et menotter les deux infortunés devant tous les autres clients, pour les relâcher plus tard.
Makana Chock, professeure en communication à l’Université de Syracuse, donne son avis sur le brûlant sujet : “des incidents qui auraient pu être classés sans suite ou considérés comme exagérés ne peuvent plus être ignorés “, car les utilisateurs “tendent à partager des choses auxquelles elles adhèrent, dans l’outrage ou dans la sympathie.”
Des actes racistes à n’en plus finir
Les profilages racistes sont légions aux Etats-Unis. Ce fut le cas début juillet, lorsqu’une certaine Erica Walker, de race blanche, salariée dans une résidence de Memphis, a trouvé bon de bondir sur son téléphone pour appeler la police. La raison de ce choix ? Elle a trouvé anormal qu’un Noir se baigne en chaussettes dans la piscine commune de la résidence. Furax, la petite amie du baigneur a lancé à la presse locale : “il y a 25-30 Blancs et vous ne dites rien (…) mais quand nous venons, c’est un problème !”
Et comme nous vous l’avons fait savoir, ce ne sont pas les cas de profilages raciaux qui manquent. En Caroline du Nord, c’est un homme de race blanche qui demande à une femme Noire ses papiers d’identité, chose qu’il n’a jamais demandée à une personne de la même race que lui. Cette dernière voulait tout simplement profiter des faveurs d’une piscine privée située dans une résidence.
La femme en question, une mère de famille qui était en compagnie de son fils et qui a pourtant un droit d’accès aux locaux, a exprimé sa frustration en ces termes : “je pense que c’est du profilage racial, je suis la seule personne noire ici avec mon fils.”
A la fin juin dernier, cette fois ci en Caroline du Sud, toujours dans une piscine, un autre fait de racisme est signalé. Une femme de Blanche dénommée Paula Adam menace ouvertement un adolescent Noir d’appeler (encore) la police si le jeune homme ne “dégage” pas de la piscine du quartier où il se baigne. Le Noir âgé de 15 ans, qui avait pourtant été invité par des résidents, s’est entendu cracher un désagréable “tu n’es pas d’ici”, sorti tout droit de la bouche de la femme aux ardeurs racistes.
San Francisco (la capitale mondiale du jean), capitale de la Californie, l’Etat le plus peuplé des Etats-Unis, n‘échappe pas à cette attitude qui date pourtant d’un âge reculé. Une femme blanche a contacté la police parce qu’elle n’a pas accepté pas le fait de voir une fillette noire vendre des bouteilles d’eau devant sa maison.
Un Nigérian du nom de Ike Iloputaife, a fait les frais de cette vague raciste à San Diego. L’homme, qui promenait tranquillement ses chiens, a été signalé à la police par (encore) une femme blanche. Cette dernière a trouvé bon de dénoncer la présence d’un ‘‘étranger’‘ dans ‘‘sa’‘ rue, et cela, après un cambriolage. ‘‘Appeler la police à propos d’une personne noire dans cet environnement politique et culturel explosif peut la mettre en danger”, s’est exprimé Ike Iloputaife.
Une famille noire, qui faisait du barbecue dans un parc, s’est vue menacée par une autre femme blanche. Le motif de cette dernière ? Faire du barbecue dans ce parc serait illégal.
Les Noirs associés à la violence, le symbole de la piscine
L’image des Noirs est souvent associée au mal, au vice. Victoria Wolcott, professeure d’histoire à l’université de Buffalo, revient sur ce cliché : “certains Blancs associent les Afro-américains au désordre, à la violence, à un manque de propreté, à une menace quelconque.”
Et la spécialiste des relations raciales d’ajouter : “ils savent qu’on ne peut pas exclure quelqu’un à cause de la couleur de sa peau, donc ils appellent la police ou vont à la confrontation, c’est un moyen légal.”
Vous l’avez remarqué, bon nombre d’actes racistes sont observés autour des piscines et, si l’on se réfère aux explications de Victoria Wolcott, ce n’est pas l’effet d’un hasard. “La ségrégation y sévissait davantage à cause des stéréotypes sur la propreté, la sexualité. C’est très évocateur quand des Blancs estiment que les Noirs ne doivent pas venir dans leur piscine”, dit-elle.
D’après la professeure, l’accession au pouvoir de Donald Trump a donné du grain à moudre aux racistes Blancs. Les propos insultants du président américain contre les étrangers ont, selon Mme Wolcott, donné de l‘énergie aux racistes et autres xénophobes dans le pays.
Et cette analyse de la professeure s’avère vérifiable (et vérifié), avec l’exemple de cette femme Blanche, qui a insulté un ouvrier d’origine hispanique à San Bernardino. D’après cette femme raciste, les Mexicains sont “des violeurs et des animaux”. Elle a aussi pris Donald Trump à témoin, ajoutant : “même le président des Etats-Unis le dit”.
Une police mal aimée
Le 4 juillet, jour de la fête nationale des Etats-Unis, un homme blanc, bourré d’alcool, a balancé des injures à ses voisins d’origine hispaniques qui écoutaient de la musique latine dans leur jardin. Selon le fêtard ivre, il avait “ressenti un manque de respect” pour ses voisins, ajoutant au passage que ceux-ci devraient chercher à “mieux s’intégrer”.
La police n’est pas en reste dans ces cas de profilages raciaux. Pour la professeure Wolcott, les nombreux actes racistes émanant des hommes (et femmes) en tenue ont poussé les gens à filmer leurs interventions.
Les “dangers” d’une intervention policière incitent les passants “à intervenir alors que par le passé, ils seraient restés passifs”, dit Mme Wolcott. D’ailleurs, le pays a connu ces dernières années plusieurs émeutes après la mort de Noirs tués par des policiers Blancs.
L’ACLU (Union américaine pour les libertés civiles), une importante association à but non-lucratif américaine basée à New York et dont la mission est de défendre et préserver les droits et libertés individuelles, s’est prononcée sur le problème. Pour l’ACLU, “le profilage racial reste un problème national ancré et profondément inquiétant” aux Etats-Unis, rappelant par l’occasion que cette pratique est illégale.
Au pays de Donald Trump, commettre un profilage raciste n’est pas passible d’une peine d’emprisonnement. Erika Walker et Paula Adam, les deux femmes aux foudres racistes, ont été tout de même payé pour leur méchanceté gratuite. Chacune des deux a perdu son emploi.
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