Kwame Nkrumah, unique fondateur du Ghana moderne ? l'affaire fait débat

Le 21 septembre, le Ghana célébrait, comme il a coutume de le faire depuis des décennies, “la Journée du fondateur”. Date anniversaire de Kwame Nkrumah, choisie à dessein afin de magnifier ce panafricaniste africain, père de l’indépendance ghanéenne. Seulement, il pourrait avoir un remodelage de l’hommage consacré à l’homme politique, et cela ne fait pas que des heureux.

En effet, le chef de l’Etat ghanéen, Nana Akufo-Addo, vient d’introduire auprès du Parlement deux lois en vue d’obtenir deux jours fériés distincts célébrant son lointain prédécesseur. Ainsi, le 21 septembre sera dénommé non pas “Journée du fondateur”, mais “Journée commémorative de Nkrumah” et le 4 août sera désormais consacré à la “Journée des fondateurs”.

Par cette dernière dénomination, le locataire du Flagstaff House entend élargir la paternité du Ghana moderne au groupe des “Big Six”, réunissant les six fondateurs du premier parti politique ghanéen, l’UGCC – créé le 4 août 1947 – qui a mené le pays à l’indépendance. Même si, bien plus tard, Kwame Nkrumah et ses anciens compagnons de lutte ont pris des trajectoires bien différentes après l’accession à l’indépendance.

“Il est clair que les générations successives de Ghanéens ont apporté une contribution essentielle à la libération de notre pays de l’impérialisme et du colonialisme. Il est donc approprié que nous les honorions, comme ceux qui ont contribué à la fondation de notre nation”, a expliqué dans un communiqué la présidence face à une polémique de plus en plus importante sur le sujet.

Protestation de l’opposition

De l’avis d’une certaine classe politique ghanéenne, notamment, ce nouveau calendrier n’est rien d’autre qu’une “réhabilitation familiale”. Une référence faite à Edward Akufo-Addo, président du Ghana (1970-1972) et Joseph Boakye Danquah, respectivement père et oncle de l’actuel président ghanéen et également membres fondateurs du parti indépendantiste UGCC.

John Dramani Mahama, ancien président ghanéen et membre du NDC (opposition) n’a pas porté de gang pour dénoncer le projet de son successeur.

“L‘émergence de Kwame Nkrumah en tant que Fondateur du Ghana moderne et symbole international de la liberté n’est pas un hasard. Il était un panafricaniste, un philosophe, un écrivain et un visionnaire qui joignait ses paroles à l’acte. Sa grande personnalité est toujours reconnue au Ghana et au-delà.

C’est une ironie sombre de notre histoire que la tradition très politique qui a conspiré pour tronquer sa vision inégalée, le 24 février 1966 [Coup d’Etat qui a renversé Kwame Nkrumah, NDLR], cherche aujourd’hui à réviser l’histoire du Ghana.”, a-t-il dénoncé sur son compte Facebook, la veille du 21 septembre.

Pour l’heure, l’initiative de Nana Akufo-Addo reste au stade de projet. Mais opposition et pouvoir entendent bien faire pencher la balance en leur faveur.