Afrique du Sud
L'ex-président sud-africain Jacob Zuma a annoncé samedi qu'il ne voterait pas pour l'ANC lors des élections de 2024, affaiblissant encore le parti au pouvoir depuis la fin de l'apartheid qui risque, pour la première fois de son histoire, de perdre sa majorité.
Zuma, âgé de 81 ans et qui reste poursuivi dans plusieurs affaires de corruption, ne quittera pas le parti dont il a longtemps été un pilier, mais avoue peiner "à le reconnaître aujourd'hui sous sa direction actuelle".
Après avoir servi l'ANC pendant plus de six décennies, depuis sa jeunesse, il affirme demeurer son "loyal serviteur". "A ma mort, je serai encore un membre de l'ANC", a-t-il insisté.
Pour autant, il ne fera pas campagne pour le parti au pouvoir et a appelé à voter pour un petit Parti radical, récemment créé et baptisé Umkhonto We Sizwe (MK), comme le nom de l'ancien bras armé de l'ANC, lors d'une conférence de presse à Soweto.
"Je ne peux pas et je ne ferai pas campagne pour l'ANC de (l'actuel président Cyril) Ramaphosa", a-t-il déclaré dans un texte lu par sa fille Duduzile, pour préserver sa voix attaquée par un rhume passager.
"Ma conscience ne me permet pas de mentir au peuple sud-africain et de prétendre que l'ANC de Ramaphosa est celui de (Nelson) Mandela et (Oliver) Tambo", a-t-il ajouté.
"Après mûre réflexion, je suis très attristé de constater que l'ANC d'aujourd'hui n'est plus le grand mouvement (...) pour lequel nous étions prêts à sacrifier notre vie", a-t-il insisté, estimant qu'il avait perdu "la confiance et le respect" des Sud-Africains en raison notamment d'un chômage endémique et des coupures de courant récurrentes.
Scrutin crucial
"On s'attend désormais largement à ce que l'ANC perde les élections générales pour la première fois depuis 1994", a rappelé ce critique acerbe du président Ramaphosa.
Depuis des mois experts et sondages avancent en effet que lors de ce scrutin, qui devrait se tenir entre mai et août, le parti au pouvoir pourrait perdre pour la première fois sa majorité parlementaire et donc la présidence du pays.
Une coalition menée par le premier parti d'opposition, l'Alliance démocratique (DA), appelle toutes les bonnes volontés à les rejoindre pour déloger l'ANC au pouvoir et s'emploie en attendant à multiplier les inscriptions sur les listes électorales.
Fin août déjà, une autre figure historique de l'ANC, son ancien secrétaire général Ace Magashule, mis au banc en 2021 pour corruption, avait annoncé la création de son propre parti, en vue des élections prévues l'an prochain, lors d'une conférence de presse à Soweto, lieu hautement symbolique du combat contre le régime raciste de l'apartheid.
Cet allié de Jacob Zuma reste populaire auprès d'une frange désenchantée de l'électorat en dépit de sa réputation sulfureuse. Son parti s'appelle le Congrès africain pour la Transformation (ACT), comptant deux initiales communes avec l'ANC.
Le charismatique Jacob Zuma, autodidacte et volontiers blagueur, reste influent en dépit d'un nombre impressionnant de casseroles. Il a été condamné en juin 2021 pour avoir obstinément refusé de répondre à une commission enquêtant sur la corruption d'une ampleur inédite sous sa présidence (2009-2018).
Son incarcération dans la foulée avait déclenché plusieurs jours d'émeutes, faisant plus de 350 morts.
L'ancien chef d'Etat reste poursuivi pour escroquerie, corruption et racket dans une affaire de pots-de-vin qui auraient été versés par le groupe français de défense Thales il y a plus de vingt ans, mais le procès ne cesse d'être reporté.
M. Zuma a été le redouté chef des renseignements au temps de l'ANC en exil et de "la lutte" contre l'apartheid.
Celui dont le deuxième prénom Gedleyihlekisa signifie en zoulou qu'il "rit en broyant ses ennemis" a notamment passé dix ans au pénitencier de Robben Island aux côtés de Nelson Mandela.
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