Namibie
En Namibie, les femmes doivent se réfugier dans les pays voisins, tels que l'Afrique du Sud, pour avorter légalement, car l’acte est limité par la loi sur l'avortement et la stérilisation sudafricaine de 1975, dont le pays a hérité au moment de son indépendance en 1990.
Depuis deux ans ans, le gouvernement de ce pays désertique d'Afrique australe a initié des débats avec la société civile sur l'opportunité de se défaire d'une loi héritée de l'époque de l'apartheid. Un rapport doit désormais être soumis au Parlement pour discussion, selon la ministre déléguée à la Santé Esther Muijangue, sans calendrier précis.
"Je suis très reconnaissante d'avoir été en mesure non seulement de subir une intervention, mais aussi de l'avoir faite légalement et en toute sécurité. Ma vie est meilleure aujourd'hui parce que je n'ai pas eu d'enfant il y a dix ans alors que je n’en avais pas les moyens. Chaque situation est différente et ce n'est pas une décision que l'on prend à la légère," explique Alejandra Angula (pseudonyme).
La loi de 1975 n'autorise l'interruption de grossesse qu'en cas de menace grave pour la santé de la mère ou du fœtus, ou lorsque la grossesse résulte d'un viol ou d'inceste.
"C'est quelque chose dont nous ne parlons pas parce que nous considérons que c'est tabou, mais d’un point de vue du social, c'est un problème sociétal réel et nous devons en discuter, nous devons être ouverts à ce sujet," selon Esther Muinjangue, vice-ministre namibien de la santé.
En 2020, trois pétitions ont été soumises à l'Assemblée nationale, appelant à la réforme de la loi. Les avis sur le sujet divergent fortement malgré la recrudescence d’avortement illégaux pouvant mener à des complications sévères.
"De nombreuses personnes ayant subi quelques avortements ne sont pas en mesure de donner naissance à de nouveaux bébés. Dans l'ensemble, c'est donc préjudiciable au pays. En réalité, nous avons besoin de plus de gens, et non de moins de gens dans notre pays. De plus, chaque personne est conçue par Dieu pour naître à la date à laquelle elle est née. Même s'il s'agit d'un viol, Dieu l'a permis," défend le Pasteur James Wallace, se positionnant contre l’avortement.
Pour Yvonne Lipenda, militante en faveur de l'avortement : "Il est temps. Nous voulons une justice reproductive. Je dois pouvoir avoir le choix lorsqu'il s'agit de mon corps, quel que soit l'état dans lequel je me trouve. Si je veux avorter parce que je ne suis pas prête à avoir un enfant, je dois pouvoir le faire parce que c'est mon choix."
Les femmes qui ne peuvent pas se faire avorter finissent souvent par abandonner leur bébé dans des lieux privés ou publics.
Le phénomène était si répandu qu'en 2019, le pays a adopté une loi stipulant que les femmes qui déposent leur enfant en toute sécurité auprès de la police ou dans des refuges ne feront plus l'objet de poursuites.
"La loi a changé en 2019, et toute mère est désormais autorisée à laisser son bébé dans un endroit sûr, à condition qu'il ne soit pas blessé. Mais, malheureusement, je pense qu'il y a encore trop de gens qui ne connaissent pas cette loi, et cette loi a changé. C'est pourquoi les abandons de bébés continuent malheureusement à se produire en Namibie," rappelle Ronel Peters, fondatrice de la Fondation Ruach Elohim.
Plus de 234 nouveau-nés non désirés ont été abandonnés de cette manière entre 2016 et 2022, selon les chiffres de la police.
Toutefois des opinions socialement conservatrices persistent dans cette nation africaine majoritairement chrétienne.
Cette discussion dans le pays s'inscrit dans un contexte de vifs débats sociétaux ces derniers mois, alimenté par des procédures judiciaires, pour la reconnaissance du mariage homosexuel notamment ou l'identité d'enfants nés grâce à une mère porteuse.
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