Nigéria
Il promet d'incarner le changement tant attendu par la jeunesse du pays le plus peuplé d'Afrique et de rebattre les cartes de la présidentielle nigériane. Face à une foule de partisans survoltés, le candidat "outsider" Peter Obi semble plus déterminé que jamais.
Joseph Nwanko, vendeur de chaussures, est un de ses fervents supporters, ceux qu'on appelle désormais au Nigeria, les "Obidients".
"Je n'ai jamais voté pour aucun parti. Mais cette fois, on pense enfin être écouté", se réjouit cet homme de 35 ans lors d’un rassemblement organisé à Ibadan, une des grandes villes du sud du Nigeria. "Nous sommes la jeunesse. Si nous ne nous mobilisons pas, qui va le faire pour nous ?"
Soutenu par le Parti travailliste, Peter Obi est en train d'émerger comme le challenger le plus crédible face aux candidats des deux principaux partis nigérians, l'APC et le PDP, qui dominent le pouvoir depuis le retour à la démocratie en 1999.
Crise économique
L'élection prévue le 25 février est une course serrée pour succéder au président Muhammadu Buhari, qui se retire après deux mandats sous le feu des critiques, le pays s'engouffrant dans une grave crise économique et faisant face à d'immenses défis sécuritaires.
A 61 ans, Peter Obi, ancien gouverneur de l'Etat d'Anambra (sud-est) qui fut un temps candidat PDP à la vice-présidence, a gagné en popularité cette année, notamment sur les réseaux sociaux où ses partisans le voient comme le candidat venu bousculer la vieille garde.
Le parti au pouvoir, l'APC, a choisi Bola Tinubu, ancien gouverneur de Lagos, surnommé le "Parrain" pour son immense influence politique et âgé de 70 ans. Celui du PDP, principal parti d'opposition, n'est autre que Atiku Abubakar, ancien vice-président du Nigeria, âgé de 76 ans et candidat à la présidence pour la sixième fois.
Pour ces derniers, Peter Obi n'est qu'un phénomène sur Twitter dénué d'un parti suffisamment structuré sur le plan national pour les menacer.
Fiabilité des sondages
Il est vrai que pour atteindre la magistrature suprême, le chemin risque d'être escarpé pour Peter Obi, même si son message résonne auprès de la jeunesse du pays. Surtout auprès des Nigérians urbanisés du sud du pays.
Difficile de pronostiquer ses chances de gagner, même si certains sondages - qui n'ont généralement aucune fiabilité au Nigeria - le donnent en tête. Les analystes estiment en tout cas qu'il représente un défi pour les candidats de l'APC et du PDP.
"Toutes les conditions politiques, économiques et sociales font de Peter Obi une alternative acceptable", souligne Ikesemit Effiong, analyste de SBM Intelligence. "Il commence à écorner l'image des partis politiques traditionnels", ajoute-t-il.
Portant des lunettes et souvent vêtu d'un simple costume traditionnel noir, Peter Obi mène une campagne populaire où il vante son expérience de gouverneur et son statut d'outsider. Riche commerçant, il affirme vouloir redresser le Nigeria : augmenter la production plutôt que la consommation, gouverner de manière responsable et s'attaquer à l'insécurité.
"Le gouvernement que nous avons l'intention de former, sera le début d'un nouveau Nigeria", a-t-il déclaré à une foule de milliers de personnes à Ibadan.
Calcul géographique
Mais la formation politique avec laquelle il se présente, le Parti travailliste, manque de structure au niveau national, et ne dispose d'aucun gouverneur. Lors du précédent scrutin en 2019, son candidat avait remporté 0,2% des voix.
"On parle beaucoup des Obidients mais, ils vont s’essouffler", pense le gouverneur de l'Etat d'Edo, qui fait campagne pour le PDP.
Car une élection au Nigeria, c'est aussi un calcul géographique. Pour gagner la présidence, le candidat doit certes remporter la majorité des voix, mais aussi au moins 25% des suffrages dans 2/3 des 36 Etats.
Le pays le plus peuplé d'Afrique est partagé de manière presque équivalente entre un nord majoritairement musulman et un sud majoritairement chrétien. Il est aussi un patchwork de centaines de groupes ethniques, dont les plus importants sont les Yoruba, les Haussa et les Igbo.
Groupes ethniques
Peter Obi, est un Igbo du sud-est, un des bastions traditionnels du PDP. A Lagos, sa popularité pourrait aussi menacer la prédominance de M. Tinubu, selon les analystes.
Mais les opposants mettent en doute le soutien d'Obi dans le nord, qui s'est avéré être un bassin de vote stratégique pour Muhammadu Buhari lors des deux dernières élections.
"Avez-vous vu les médias sociaux faire la promotion de Peter Obi dans le nord ?", interroge Bello Matawalle, gouverneur de l'État de Zamfara et dirigeant de l'APC sur une télévision locale.
La participation électorale est souvent faible au Nigeria et certains observateurs se demandent si la présence d'Obi pourrait perturber suffisamment le soutien de l'APC et du PDP et forcer un second tour pour la toute première fois.
Abrahim Babatunde Lawal, chauffeur de taxi à Lagos, a voté deux fois pour Buhari et l'APC. En février, il donnera sa chance à Obi. "Il est une nouvelle dimension, quelqu'un qui est différent des anciens politiciens", lance-t-il. "Je ne dirai pas qu'il va gagner, ce sera très difficile, mais nous avons le droit d'espérer".
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