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Afrique du Sud : l'archevêque Desmond Tutu fête ses 90 ans

Desmond Tutu sort de l'hôpital Brooklyn Chest, après avoir été vacciné, au Cap, le 17 mai 2021   -  
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RODGER BOSCH/AFP or licensors

Afrique du Sud

Desmond Tutu, qui fête ses 90 ans jeudi, reste une figure morale incontournable en Afrique du Sud. Mais le révérend s'exprime désormais rarement dans un pays qui, privé de ses icônes de la lutte contre l'apartheid, se sent parfois un peu orphelin. Un récent graffiti raciste sur un portrait du lauréat du prix Nobel souligne la pertinence de son action en faveur de l'égalité.

Retraité depuis 2010, Mgr Desmond Tutu, célébré pour sa farouche opposition au régime raciste honni, est dormais un vieux monsieur dans un pays jeune où beaucoup ne le connaissent plus que grâce aux livres d'école. L'âge moyen des Sud-Africains est de 27 ans.

En dépit de restrictions dues à la Covid-19 assouplies, les festivités autour de son anniversaire s'annoncent discrètes et largement virtuelles. Desmond Tutu, premier archevêque anglican noir du pays, à l'énergie et au rire contagieux, devrait assister à un service dédié à la cathédrale St George, où il a longtemps prêché.

L'insulte raciste peinte à la bombe le mois dernier sur une fresque de Desmond Tutu au Cap est "répugnante et triste", a déclaré Mamphela Ramphele, présidente par intérim du Desmond and Leah Tutu Trust. Les Sud-Africains doivent poursuivre l'œuvre de Tutu en faveur de l'égalité raciale, a-t-elle déclaré à l'Associated Press.

Prix Nobel de la Paix

"Le racisme est une malédiction à laquelle l'Afrique du Sud doit échapper", a déclaré Mamphela Ramphele. "L'héritage de l'archevêque Tutu est énorme. Il a lutté contre le racisme et s'est battu pour l'humanité de nous tous." La semaine dernière, une vente aux enchères en ligne d'objets liés au parcours du prix Nobel a permis de récolter 3,5 millions de rands (plus de 200 000 euros) destinés à la fondation qui porte son nom et de son épouse depuis 66 ans.

La fondation organise aussi une conférence en ligne jeudi à laquelle doivent participer le Dalaï Lama, l'ancienne présidente de l'Irlande Mary Robinson, la militante des droits de l'Homme Graca Machel et l'ex médiatrice sud-africaine Thuli Madonsela, admirée pour sa dénonciation courageuse de la corruption d'Etat.

Ce choix d'intervenants rappelle les valeurs de Desmond Tutu, s'entourant de défenseurs des droits à une époque où les responsables politiques sud-africains font davantage parler de leurs somptueuses maisons et de leurs fortunes personnelles.

Vaccination contre la Covid-19

Sa dernière apparition publique date de mai, lors de sa vaccination contre la Covid-19. En chaise roulante, il a souri et salué de loin, sans s'adresser aux journalistes. Difficile de se souvenir que cette icône a été autrefois, dans les années 1960, un frêle étudiant en théologie rentrant de Grande-Bretagne dans son pays pour y subir les mêmes humiliations que tous ses compatriotes noirs.

Sa fille Mpho Tutu van Furth, avec laquelle il a écrit deux livres, raconte avoir traversé le pays en famille. "On s'est arrêté sur la route et mon père est allé nous acheter des glaces, il faisait terriblement chaud. Je me souviens de l'employé lui disant qu'il ne sert pas les kaffirs à l'intérieur du magasin, qu'il doit commander par la fenêtre. Et de mon père sortant en trombe. Nous n'avons pas mangé de glace ce jour-là".

"Kaffir" est la pire injure raciste en Afrique du Sud, dont l'énonciation aujourd'hui peut conduire à des poursuites pénales. L'influence de Tutu au sein des institutions anglicanes l'a pourtant mené vers une démarche de réconciliation. Il a baptisé son pays la "nation arc-en-ciel", intimement persuadé que l'expérience sud-africaine pouvait aider le reste du monde à comprendre comment surmonter les conflits.

Obsession du pardon

Son obsession du pardon est dénoncée par une nouvelle génération de Sud-Africains, pour lesquels la population noire a fait beaucoup trop de concessions dans la transition vers la démocratie en 1994, ne demandant pas assez de comptes aux tortionnaires de l'apartheid.

Mais chacun reconnaît à Desmond Tutu d'avoir continué à dénoncer défaillances et injustices : il s'est attaqué à l'homophobie, a défié Nelson Mandela sur la générosité du salaire de ses ministres, vivement critiqué la corruption endémique sous la présidence de Jacob Zuma.

Malgré le sérieux de son travail, Desmond Tutu faisait preuve d'un humour irrépressible lors de ses fréquentes apparitions publiques. Il a notamment soutenu les droits des LBGT et le mariage homosexuel. "Je ne vénérerais pas un Dieu qui est homophobe et c'est à quel point je me sens profondément concerné par cette question", a-t-il déclaré en 2013. "Je refuserais d'aller dans un paradis homophobe. Non, je dirais 'Désolé, je préfère de loin aller à l'autre endroit'."

Il s'est retiré de la vie publique en 2010 et a publié des déclarations par le biais de sa fondation. Il a été traité pour un cancer de la prostate et a été hospitalisé à plusieurs reprises en 2015 et 2016, et a subi une intervention chirurgicale pour remédier à des infections récurrentes dues à un traitement antérieur du cancer.

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