Afrique du Sud
Propulsé à la tête de la plus grande ville d'Afrique du Sud, le nouveau maire de Johannesburg suscite les interrogations : les nids-de-poule sont sa priorité et il a nommé aux Transports un homme d'affaires connu pour déguster des sushis sur des femmes dénudées.
Thapelo Amad, 41 ans, était jusqu'ici un obscur conseiller issu d'un parti ultra-minoritaire détenant un seul siège au Parlement. Son arrivée surprise aux commandes de la capitale économique est observée dans le pays comme un exemple à l'échelle locale de ce que pourrait réserver en 2024 l'avènement d'un gouvernement de coalition.
L'Afrique du Sud dirigée depuis près de 30 ans par l'ANC de Nelson Mandela tient des élections générales l'an prochain. Les pronostics prédisent un score sous les 50% pour la première fois dans l'histoire du parti à un scrutin national.
Le chômage endémique, une pauvreté grandissante, une criminalité débridée et une grave crise de l'électricité avec des coupures récurrentes depuis des mois provoquent un profond mécontentement.
Déjà en perte de terrain dans les urnes, le Congrès national africain (ANC) a échoué à reprendre Johannesburg aux élections locales de 2021, qui se sont soldées par un score historiquement bas pour le parti.
Sans majorité absolue au conseil de la ville, l'ANC y est contraint à un partage des pouvoirs et des jeux d'alliances dont Thapelo Amad est le produit inattendu.
Celui que certains dans la coalition qualifient de "bouche-trou incompétent" aurait été choisi comme "maire de transition" pendant que l'ANC négocie un accord plus large impliquant d'autres municipalités avec le parti radical de gauche des Combattants pour la liberté économique (EFF).
"Les coalitions deviennent une réalité dans la politique sud-africaine", estime Nthatisi Modingoane, porte-parole de la municipalité où les mésaventures des maires successifs sont observées comme les réactions d'un rat de laboratoire à une substance inconnue.
Le nouveau maire a succédé fin janvier à Mpho Phalatse du premier parti d'opposition (DA, Alliance démocratique), évincée par un vote de défiance.
"C'est quelqu'un qui n'a absolument aucune expérience", résume Ina Gouws, du département de politique de l'Université du Free State, interrogée par l'AFP."Il n'y rien chez lui qui ne le rende indispensable", estime Daniel Silke, analyste chez Political Futures Consultancy.
Après sa désignation, M. Amad s'est lui-même dit "humble" et "bouleversé" devant la responsabilité qui l'attend. Interrogé par la presse sur les priorités de son mandat, il a déclaré : "Je m'occupe des nids-de-poule".
Dans un pays en état de catastrophe nationale à cause de la crise énergétique, sa déclaration a provoqué la consternation. Ses propos repris en boucle sur les réseaux sociaux ont rapidement été tournés en dérision.
Sa décision de nommer ensuite aux Transports Kenny Kunene, ancien détenu et mondain connu pour organiser des dîners lors desquels il sert des sushis sur des femmes nues, lui valant le surnom de "roi des sushis", n'a pas non plus rassuré.
La crainte de l'ANC en cas de coalition est de se retrouver avec un gouvernement ingouvernable. Une mission parlementaire s'est d'ailleurs rendue l'an dernier au Danemark pour observer une coalition gouvernementale réussie.
Mais "un argument de campagne de l'ANC pour les élections l'an prochain sera de dire aux électeurs que les coalitions ne fonctionnent pas", reste convaincu M. Silke.
Aller à la video
Afrique du Sud : le meurtrier de Chris Hani expulsé vers la Pologne
01:49
L'opposition sud-africaine menace de destituer le président Ramaphosa
02:18
Botswana : l'UDC arrive au pouvoir, l'opposition exulte
01:02
Afrique du Sud : l'Ukraine crée la discorde dans la coalition gouvernementale
Aller à la video
Afrique du Sud : décès de l'ancien ministre des Finances Tito Mboweni
01:00
Afrique du Sud : Ramaphosa échappe aux poursuites pour le "Farmgate"