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Cameroun : le mbolé, son de la vie et de la mort

L'artiste camerounais Petit Malo, fait des gestes pendant une improvisation après avoir rejoint un groupe d'amis dans le quartier de Mvog-Ada à Yaoundé, le 8/11/2022.   -  
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DANIEL BELOUMOU OLOMO/AFP or licensors

Cameroun

Des veillées funèbres aux studios d'enregistrement, le genre musical Mbolé est devenu le son de la rue dans les quartiers populaires de Yaoundé, la capitale du Cameroun. Apparus au début des années 2000 et ayant explosé en 2016, les rythmes enjoués du genre ont tissé leur chemin dans le paysage culturel du pays.

À l'origine, il s'agissait d'une forme de musique scandée lors des veillées funèbres pour réconforter les personnes en deuil. Aujourd'hui, il fait partie du courant culturel dominant au Cameroun et constitue une forme d'expression puissante pour sa jeunesse frustrée.

Le mbole (prononcé "em-bo-lay") s'est développé il y a environ un quart de siècle dans les quartiers pauvres de Yaoundé, la capitale de ce pays d'Afrique centrale.

Au départ, il s'agissait d'une sorte de va-et-vient lors de veillées funèbres entre un chanteur, qui inventait des paroles et les chantait, et des "répondeurs", qui répétaient les paroles et donnaient le rythme à l'aide de seaux, de casseroles ou d'autres instruments.

"On invitait les gens autour de soi, on formait un cercle et on commençait à jouer pour divertir les gens", explique Etienne Koumato, un étudiant en biologie de 24 ans qui se produit dans un groupe de mbole appelé Ligue des Premiers et qui est signé par une maison de disques spécialisée.

"Au début, le mbole était stigmatisé. Les gens le considéraient comme une musique de caniveau, comme le rap", dit-il.

"Mais sous cette image, elle s'est adaptée et a conquis les gens".

Un genre musical national

Le mbole s'est répandu dans les mariages, les baptêmes et autres cérémonies, devenant progressivement plus sophistiqué grâce à l'introduction d'instruments tels que les claviers et le grand tambour ouest-africain, le djembé. Il y a environ six ans, le mbole a commencé à se généraliser, et il est désormais considéré comme un genre musical national.

"Il n'y a pas une seule station de télévision ou de radio qui ne diffuse pas de mbole", a déclaré Yannick Mindja, qui a réalisé un documentaire sur l'ascension de cette musique.

"Nous avions l'afro-beat, qui venait du Nigéria, mais quand vous écoutez le mbole, vous entendez tous les sons du Cameroun", a-t-il ajouté, pointant du doigt les formes de musique traditionnelle appelées bend skin, makossa et bikutsi.

"Le mbole est le petit-fils du bikutsi et le neveu du makossa, mais quand vous l'écoutez, vous vous sentez immédiatement camerounais", a déclaré Lionel Malongo Belinga, qui se produit sous le nom de Petit Malo.

Des racines de quartier

Derrière le succès médiatique, le mbole reste une forme d'expression polyvalente et est toujours très ancré dans les quartiers pauvres. Pauvreté, drogue et insécurité sont des thèmes récurrents chez ses jeunes interprètes, dont certains ont un statut quasi iconique dans leur quartier.

En 2016, Petit Malo a enregistré son premier tube mbole, "Dans mon kwatta" ("Dans mon quartier"), qui dépeint la vie à Nkoldongo, un quartier délabré de Yaoundé.

Le quartier est un dédale où les eaux usées coulent en ruisseaux dans les rues étroites et non pavées.

De nombreuses maisons n'ont pas de porte mais juste un tissu pour couvrir leur entrée, accroché au-dessus de quelques chaussures, montrant que des gens vivent là.

Le son des voix et du djembé fait accourir les jeunes du quartier.

"Petit Malo est un bon chanteur", dit Herman Sone, un fan de 15 ans. "Il chante la paix et l'espoir, et plein de bonnes choses".

Les chanteuses se frayent également un chemin dans un genre qui "est encore très masculin", explique Jeanne Manga, 29 ans, qui, sous le nom de Jay-Ni, a créé un groupe de mbole réservé aux filles.

Le mbole est un excellent moyen de dénoncer le sexisme, dit-elle.

"Dans mes textes, je parle par exemple des hommes qui invitent les femmes à sortir et attendent ensuite des faveurs sexuelles en retour", a-t-elle déclaré. "Nous ne sommes pas des cibles, et le mbole nous donne l'occasion de le dire".

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