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Rwanda : le français en quête d'un nouveau souffle

Des élèves dans une école au Rwanda   -  
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Rwanda

La langue française a perdu de son rayonnement au Rwanda au profit de l'anglais, privilégié ces dernières décennies par les autorités qui en ont fait la troisième langue officielle, sur fond de tensions diplomatiques avec Paris et de nouvelles ambitions économiques.

"La radio nationale ne lit plus les informations en français. A la télévision nationale, les informations françaises sont diffusées après 22H00, alors que les gens dorment déjà": ancien présentateur du journal en français à la télévision nationale, Etienne Gatanazi a assisté au recul du français.

Aujourd'hui, "la plupart des radios et télévisions n'ont plus d'émissions en français car elles jugent les émissions en anglais plus attrayantes", déplore-t-il.

A Kigali, les soirées de stand-up en français des humoristes du "Comedy Knights Rwanda" ne font, elles non plus, plus recette.

"Nous nous sommes rendu compte que lors des soirées humoristiques anglophones, il y avait du monde, mais pour les soirées francophones, la fréquentation était faible. En 2017, nous avons pris la décision commerciale de suspendre la soirée française", explique son créateur, le comédien, auteur et metteur en scène Hervé Kimenyi.

"Nous nous produisons toujours en français mais pour des publics spécifiques, ou sur commande", précise-t-il.

- Anglais, langue de l'enseignement -

Langue de l'ancien colonisateur belge, le français a grandement perdu de son influence depuis le génocide de 1994.

Les controverses sur le rôle de la France dans le génocide des Tutsi, qui a fait au moins 800.000 morts, ont été sources de vives tensions entre les deux pays, dont les relations diplomatiques ont été rompues entre novembre 2006 et novembre 2009.

A l'heure de la reconstruction post-génocide, le français s'est retrouvé en concurrence avec l'anglais, langue parlée par la plupart des réfugiés tutsi revenus d'Ouganda - anglophone - qui ont constitué la nouvelle administration.

Le président Paul Kagame, lui-même éduqué en Ouganda, a introduit dans la Constitution de 2003 l'anglais comme troisième langue officielle, avec le kinyarwanda et le français.

Puis en 2008, le français a subitement été remplacé par l'anglais comme langue d'enseignement obligatoire à l'école.

Les autorités rwandaises ont toujours réfuté toute volonté politique ou idéologique de reléguer le français au second plan, invoquant plutôt un pragmatisme et une volonté de former la jeunesse à une langue jugée essentielle pour le développement économique du pays, situé au carrefour de l'Afrique francophone et anglophone.

Le français "s'est progressivement estompé en faveur de l'anglais", concède Etienne Gatanazi. Mais "la langue et la culture françaises restent implantées dans le pays à cause de l'Histoire", souligne-t-il: "Les gens l'utilisent dans les bars, les restaurants, et la langue locale est imprégnée de mots français".

- Socle persistant -

En 2018, le français était parlé par 724.000 des 12,5 millions de Rwandais, soit 6% de la population, selon l'Organisation internationale de la francophonie (OIF). C'est la langue étrangère la plus parlée dans le pays.

Ce faible pourcentage s'explique par le fait que le kinyarwanda est parlé par presque tous les Rwandais, qui n'ont donc pas besoin de langue étrangère pour se comprendre, contrairement à d'autres pays africains où plusieurs langues locales coexistent.

L'OIF est dirigée depuis 2018 par l'ancienne ministre rwandaise des Affaires étrangères Louise Mushikiwabo.

Avec le récent réchauffement des relations entre Paris et Kigali, accéléré par la publication de deux rapports, un français et un rwandais, concluant à une lourde responsabilité française - mais pas à une complicité - dans le génocide de 1994, le français espère trouver un nouveau souffle.

Lors de sa venue jeudi dans la capitale rwandaise, Emmanuel Macron inaugurera un nouveau "Centre culturel francophone", sept ans après la fermeture de l'Institut français au Rwanda.

"Il aura vocation à faire rayonner non seulement la culture française, mais aussi toutes les ressources de la francophonie, notamment des artistes de la région", selon la présidence française.

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