Congo
Le président du Congo, Denis Sassou Nguesso, qui va être réinvesti vendredi pour un nouveau mandat de cinq ans, a promis de diversifier l'économie de son pays pour sortir du tout-pétrole par l'agriculture, avec pour autre défi l'industrie et la relance du chemin de fer.
La capitale pétrolière Pointe-Noire pourrait baigner dans l'optimisme en ce début 2021. Après la terrible année 2020, la production bat des records à 350 000 barils/jour, avec une remontée des cours mondiaux à près de 65 dollars l'unité. Les hydrocarbures représentent la première richesse du Congo (environ cinq millions d'habitants), avec 1,65 milliard d'euros de revenus en 2018, selon le dernier rapport sur la transparence des industries extractives (Itie).
Le Congo est lié par des accords de "partage de production" aux multinationales pétrolières, le géant français Total et l'italien Eni. En novembre, Total a obtenu le renouvellement pour 20 ans de sa concession sur le terminal pétrolier de Djeno au large de Pointe-Noire."La République du Congo aura sa part ainsi que les autres principaux opérateurs tels que Eni et Perenco", a vaguement promis devant la presse à l'époque le PDG de Total, Patrick Pouyanné.
Une autre partie de la rente pétrolière congolaise est versée sur "un compte séquestre en Chine" pour rembourser les infrastructures construites par les entreprises de Pékin au Congo (448,39 millions d'euros en 2018), selon le rapport de l'Itie. Une dernière partie est enfin affectée "au remboursement des accords de préfinancements avec les traders" Glencore et Trafigura (340,34 millions d'euros en 2018). "Lorsque nous remboursons la Chine et les traders, il nous reste 10% (des revenus pétroliers) qui viennent au Trésor public pour pouvoir faire vivre l’État du Congo", résume Brice Mackosso, militant de longue date pour la transparence des comptes pétroliers.
Vocations dans l'agriculture
A Nkayi, sur la RN1 entre Pointe-Noire et Brazzaville, la diversification économique est une réalité pour la Société agricole de raffinage industriel du sucre (Saris), qui exploite depuis 50 ans les plaines argileuses de la région de la Bouenza. Entourée de centaines d'hectares de plantations de cannes à sucre, l'usine produit 60 à 70 000 tonnes de sucre pour un marché de 55 000 tonnes. "Le reste est exporté vers les pays voisins", souligne son directeur général de la Saris, Guillaume Ranson. Un des rares exemples d'auto-suffisance au Congo, qui importe tout ce qu'il consomme par ailleurs.
Entreprise-sœur, la SGMP cultive du maïs, en partenariat depuis quelques mois avec des petits producteurs de la région, pour arriver également à l'auto-suffisance."Les gens commencent à comprendre que l'agriculture est plus importante que les autres activités. Le président a raison sur ce point là", lance Joseph, un de ces petits producteurs. "Vous voyez comme la terre est riche. Moi, je vis bien. Les enfants sont à l'école. J'ai même un garage grâce à l'agriculture", ajoute-t-il.
Joseph bénéficie du soutien d'une ingénieure agronome de la SGMP, Julia Gardies, sur les différents types de semences et d'engrais à utiliser. "On a de plus en plus de demandes" de gens qui veulent se lancer dans l'agriculture ou l'agro-industrie, assure la jeune expatriée française. "La main d’œuvre est de plus en plus disponible. Il y a aussi des freins liés à la trésorerie et aux approvisionnements en intrants".
Régime autoritaire
En poursuivant la route vers Brazzaville, quelques cimenteries témoignent des efforts de diversification industrielle, comme celle du milliardaire Dangote. Fruit de capitaux indiens et togolais, la cimenterie Diamond Cement a en revanche fait faillite en décembre 2019 à Mindouli, dans la région du Pool déjà durement éprouvée par la guerre civile de 2016-2017."Nous étions au nombre de 375 salariés", constate un ancien chef d'équipe. Autant de chômeurs en plus dans la région, dont certains ont tenté d'ouvrir un petit commerce avec leur indemnité de départ. Mindouli est également une des gares sur le chemin de fer Congo-Océan qui va de Pointe-Noire à Brazzaville.
Depuis la guerre dans le Pool, seuls circulent les trains de marchandises, pris d'assaut par des dizaines de passagers clandestins. "Je suis ici depuis des heures. Il n'y a pas d'horaires fixes", soupire un homme de 51 ans venu pour des examens médicaux, Jeff Alden, au milieu des sacs de manioc, de bananes et de safou d'un marché improvisé sur les quais. "Nous voulons le changement. Quand il est arrivé au pouvoir, j'avais dix ans", ajoute-t-il au sujet du président Sassou Nguesso, 77 ans dont 37 à la tête de régimes autoritaires depuis 1979. Et qui peut potentiellement rester aux affaires jusqu'en 2031.
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