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Au Liberia, la justice finlandaise sur les traces de "l'Ange Gabriel"

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Libéria

A la demande des juges, les audiences du procès de Gibril Massquoi ont été suspendues afin que les magistrats puissent visiter les lieux où se sont déroulés les crimes dont il est accusé.

Le tribunal finlandais devant statuer sur le sort de l'ancien chef de guerre sierra-léonais s'est déplacé jusqu'au nord-est du Liberia, afin de retrouver les traces de l'ancien chef rebelle Gibril Massaquoi. Depuis le 3 février, celui que l'on surnomme "L'Ange Gabriel" est jugé pour une série d'atrocités commises lors des deux guerres civiles ayant ravagé le Liberia entre 1989 et 2003.

Pendant deux mois, le tribunal visitera des scènes de crimes en Sierra Leone et au Liberia, et entendra quelque 80 témoins. "La raison de notre présence ici est de montrer à la Cour les endroits où les témoins affirment que les choses se sont passées. En particulier ce qui ne figure pas dans l'acte d'accusation", a déclaré sur place le procureur finlandais Tom Laitinen. Il a précisé que des représentants de la défense faisaient également partie de la délégation.

Les magistrats finlandais ont visité le village de Kamatahun, dans une région montagneuse proche de la frontière sierra-léonaise, à une journée de route de la capitale Monrovia. Accompagnés des autorités locales et terminant leur progression à pieds sur d'étroits chemins, ils ont inspecté et pris des photos, notamment des restes de maisons incendiées pendant l'une des pires guerres du continent africain, qui a fait 250 000 morts et des millions de déplacés entre 1989 et 2003.

Lourdes accusations

A Kamatahun, des habitants ont accusé Gibril Massaquoi d'avoir ordonné d'enfermer des civils, dont des enfants, dans deux bâtiments, avant de les réduire en cendres, selon le dossier d'instruction. Au moins sept femmes ont été violées et tuées dans la même localité, tandis que les cadavres d'autres habitants ont été découpés en morceaux et "transformés en nourriture que Massaquoi a également mangée", selon la même source.

Les juges devaient ensuite se rendre dans un hameau voisin, Yandohun, où l'ex-chef rebelle est également accusé d'être responsable d'atrocités. "Mon père a été tué sous mes yeux en face de ce bâtiment", une ancienne maison de la jeunesse encore criblée d'impacts de balles, a raconté à l'AFP un habitant de Yandohun, Kerfah Kamara. "J'étais un enfant, je ne pourrai jamais pardonner ses meurtriers", a ajouté l'homme de 27 ans, sans directement accuser Gibril Massaquoi.

Le chef du village, Massaquoi Swaray, 60 ans, se souvient lui aussi du passage des miliciens. "Ils ont violé ma femme et m'ont obligé à les regarder faire. Après, elle avait tellement honte qu'elle est partie dans la forêt et elle est morte", explique-t-il, très ému. Le dossier inclut également près de 4 000 pages d'accusations de meurtres et de viols de masse ailleurs dans la province de Lofa (nord) et à Monrovia, ainsi que des mises en cause pour esclavage et recrutement d'enfants soldats. Mais Gibril Massaquoi, qui est resté dans sa prison en Finlande, où il vit depuis 2008, affirme qu'il était engagé dans des négociations de paix ailleurs dans la région à l'époque des atrocités dont il est accusé.

Un proche du RUF rattrapé en Finlande

Surnommé à l'époque "l'Ange Gabriel", Gibril Massaquoi encourt la perpétuité pour meurtres, "crimes de guerre aggravés" et "crimes contre l'Humanité aggravés" qu'il est accusé d'avoir commis ou ordonnés entre 1989 et 2003. Il était alors un haut responsable du Front révolutionnaire uni (RUF), un groupe armé sierra-léonais dirigé par le caporal Foday Sankoh, proche de l'ex-chef de guerre libérien devenu président, Charles Taylor.

Jadis professeur, il avait été autorisé à s'installer en Finlande après avoir témoigné en 2003 devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) mis en place par l'ONU. Il avait alors reçu une immunité pour les actes commis dans son pays, mais pas au Liberia. Après la guerre civile, la plupart des commandants des différents groupes armés ont fui le pays et les poursuites restent l'exception, même si des condamnations ont été prononcées aux Etats-Unis et des procès et des poursuites sont en cours en Suisse et en France.

La cour de Tampere prévoit de revenir en Finlande en mai pour deux mois supplémentaires d'audience, avec un verdict attendu en septembre.

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