Madagascar
Les cinq prochaines années sonneront-elles la transformation positive de l‘économie malgache ? En se rendant ce mercredi aux urnes pour la présidentielle qui opposera 36 candidats, les Malgaches espèrent profiter des potentialités de leur pays et ainsi sortir l’extrême pauvreté qui frappe plus de la moitié d’entre eux. Mais l’effet boomerang guette…
Campagne en hélicoptères, communication XXL… Les moyens faramineux et luxuriants déployés par les candidats à la présidentielle du 7 novembre tranchent bien avec la paupérisation galopante de la population malgache. Cette période de campagne vient, en effet, jeter une lumière crue sur ce qu’est la société malgache d’aujourd’hui. Une société clivée entre une large franche, majoritairement pauvre, et une petite caste qui détient la quasi-totalité des richesses du pays.
Madagascar, c’est un pays de quelque 25 millions d’habitants qui affiche un taux de pauvreté de 76,2 % – un des plus élevés au monde, la Grande Île se classant à juste titre au 4e rang des pays les plus pauvres au monde. Entre 1963 et 2008, le pouvoir d’achat des ménages a été amputé d’environ deux tiers. Selon les chiffres de la Banque mondiale, quelque 90 % des Malgaches vivent avec moins de dollars par jour. Bien qu‘à majorité jeune – 76 % ont moins de 35 ans -, la population de cette île tassée dans la partie orientale de l’Afrique, baigne dans un taux de chômage alarmant. Cette précarité de l’emploi a solidifié le secteur informel qui concerne 9 emplois sur 10 à Madagascar.
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Un sombre tableau qui contraste avec les richesses dont dispose le pays. La Grande Île abrite 2 % de la biodiversité mondiale faisant d’elle l’un des « hot spots » de la diversité biologique mondiale. Les terres malgaches sont aussi riches de minéraux dont le cobalt, le graphite, l’uranium, l’ilménite, l’or, le nickel, le saphir rose – dont il est le premier producteur mondial –, mais encore des gisements de pétrole qui font d’elles une véritable île aux trésors… La diversité culturelle est par ailleurs l’un des arguments économiques de Madagascar.
Malgré tout, le pays se cherche encore une place au rang des pays émergents. Pourtant, depuis son indépendance, à l’opposé de nombreux pays africains, Madagascar n’a connu aucun conflit majeur pouvant justifier cette détérioration de son économie, comme le souligne le chercheur François Roubaud, co-auteur du livre “L‘Énigme et le paradoxe. Économie politique de Madagascar”. Le pays a exploré la plupart des politiques économiques sous l’impulsion des bailleurs de fonds internationaux, tandis que sa courbe démographique évolue sensiblement à l’instar de ses pairs africains.
Pour comprendre ce paradoxe, les analystes regardent vers la corruption endémique qui gangrène le pays. Il y a d’abord le bradage des ressources naturelles qui ont fait perdre au pays quelque 500 millions de dollars pour le secteur marin ou plus encore, 750 millions de dollars en quatre ans dans le trafic de bois rose. Puis, il y a les pots-de-vin et l’opacité qui règne dans l’attribution de marchés publics.
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Un handicap qui pèse sur toute la société : les projets de travaux publics, l’attribution des permis de conduire, la justice, le foncier… Madagascar est “le pays du mametraha kely (“veuillez déposer un pot-de-vin” en langue malgache) et de la règle des 10 %” du montant du contrat versés à des fonctionnaires véreux, explique Ketakandriana Rafitoson, responsable de la branche malgache de l’ONG Transparency International. Dans l’indice de perception de corruption de cette ONG , Madagascar pointe d’ailleurs à la 155e place sur 180.
Face à cette corruption institutionnalisée qui implique les plus hautes élites du pays, et une classe politique qui peine à se réinventer, faut-il alors se résigner ? Pour la société civile, la réponse est non. Transparency International Initiative Madagascar (TIIM) et le mouvement Rohy ont du reste appelé les Malgaches à prendre conscience du pouvoir de leurs votes et de ne laisser aucune chance (…) aux corrompus en tous genres d‘être ou de revenir à la tête de l’Etat.”
Cet appel sera-t-il entendu ? Difficile de le dire, d’autant que la majorité des électeurs, frappés par une pauvreté d’extrême, se laissent acheter leur voix.
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