Nigéria
Le ministre des Affaires étrangères nigérian a assuré lundi que des "discussions étaient en cours" avec Twitter, suspendu vendredi pour une durée indéterminée dans pays le plus peuplé d'Afrique, où les observateurs s'inquiètent d'un rétrécissement des libertés individuelles.
"Il y a des discussions avec Twitter et nous verrons les progrès qui sont faits. Je ne sais pas combien de temps durera cette suspension" a déclaré Geoffrey Onyeama, à l'issue d'une réunion à huis-clos avec les ambassadeurs de l'Union européenne (UE), de la Grande-Bretagne, des États-Unis et du Canada.
Le ministère de l'Information et de la Culture avait annoncé vendredi soir la suspension de Twitter pour "une durée indéterminée", accusant ce réseau social d'avoir une "mission suspecte" contre le gouvernement nigérian et interrogeant sur leurs intentions réelles.
L'organe national de régulation audiovisuelle, National Broadcasting Commission (NBC), a également demandé lundi à toutes les radios et télévisons du pays de "suspendre tout soutien" à Twitter, en supprimant immédiatement leur compte et qualifiant l'usage du réseau social comme d'un acte "anti-patriotique".
Cette décision est intervenue après la suppression mercredi par Twitter d'un message du président Buhari qui menaçait de "traiter avec un langage qu'ils comprennent" les responsables des violences actuelles dans le sud-est du Nigeria - attribuées par les autorités à des séparatistes igbos-, ravivant les terribles souvenirs de la guerre du Biafra qui avait fait plus d'un million de morts à la fin des années 1960.
Le Tweet avait été fortement décrié à travers le pays et le réseau social avait estimé que M. Buhari enfreignait ses règles d'utilisation.
L'Union européenne (UE), la Grande-Bretagne, les Etats-Unis et le Canada avaient déploré la suspension de Twitter dans un communiqué conjoint, et leurs ambassadeurs ont été reçus dans une réunion à huis-clos lundi matin auprès du ministre des Affaires Etrangères Geoffrey Onyeama.
Il a réitéré la nécessité de prendre ces mesures pour "rééquilibrer les forces médiatiques dans le bon sens et arrêter d'utiliser ces plateformes pour déstabiliser le pays et encourager la criminalité."
Mary Beth Leonard, l'ambassadrice américaine au Nigeria, a dit, quant à elle, vouloir rester "ferme" sur sa position, et sur son attachement au dialogue et à "la liberté d'expression".
- "Bâillonner les médias" -
"Le bâillonnement de Twitter est surtout un moyen de bâillonner les médias", assure le responsable web d'une importante chaîne de télévision à l'AFP. "Nous devons réagir, car si nous ne réagissons pas à ça, ils peuvent encore aller plus loin."
"Pour l'instant on attend et on voit", a expliqué à l'AFP le directeur du développement des réseaux sociaux d'un grand titre de presse nigérian. "Stratégiquement il faut développer les visites directes sur notre site, sans passer par les réseaux, parce qu'aujourd'hui c'est Twitter, mais on ne sait pas ce qu'il va se passer avec Facebook, ou Instagram".
Les médias au Nigeria, pays de 200 millions d'habitants où l'âge médian de la population est de 18 ans, ont une très forte présence sur les réseaux sociaux, et Twitter seulement enregistre plus de 39 millions de comptes au Nigeria, selon un sondage.
La plateforme joue un rôle important dans le débat public, avec des hashtags ayant eu un grand écho, comme #BringBackOurGirls ("Ramenez nos filles"), devenu viral lors de l'enlèvement de 276 écolières par le groupe jihadiste Boko Haram en 2014, ou #EndSARS, qui a donné en 2020 son nom au vaste mouvement contre les brutalités policières et contre le pouvoir.
- Hashtags et débat public -
De son côté, Twitter a déclaré être "très inquiet" de ce blocage et travaillerait à "restaurer son accès à tous".
Plusieurs organisations de défense des droits humains ont également dénoncé cette dernière décision du gouvernement après plusieurs tentatives de réguler les réseaux sociaux et les médias pour lutter contre la "désinformation".
Les usagers internet nigérians ont téléchargé en très grand nombre des VPN (réseau privé virtuel), permettant l'accès à Twitter partout dans le monde, et la recherche "VPN App" était la deuxième plus grande recherche dans le pays, malgré les menaces du pouvoir contre tout contrevenant.
Lundi matin, le hashtag #KeepItOn (Continuez) était partagé par des dizaines de milliers d'usagers sur Twitter dans un signe de protestation contre le pouvoir.
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