Les Béninois ont voté dimanche sans grande affluence et dans le calme pour élire leurs 109 députés, un scrutin marqué par le retour de l'opposition, une première sous le président Patrice Talon après quatre ans d'absence.
Sans grande affluence, le Bénin a voté pour élire ses députés
Il s'agit là d'un test clé pour le petit pays d'Afrique de l'Ouest, jadis perçu comme un modèle de démocratie, où le président Talon a favorisé le développement économique, selon ses partisans, mais au prix d'un recul démocratique, selon l'opposition. Car aujourd'hui, les principales figures de l'opposition sont soit derrière les barreaux, soit en exil.
Les rues de Cotonou, capitale économique, étaient calmes et tous les marchés et magasins étaient fermés.
Les bureaux de vote devaient ouvrir à 07H00 (06H00 GMT) et fermer à 16H00 (15H00 GMT) mais de nombreux retards ont été enregistrés, selon la Plateforme électorale de la société civile (PEOSC).
Les dernières législatives organisées en 2019 avaient été marquées par des violences meurtrières, une abstention record et une coupure totale de l'internet, des faits rarissimes au Bénin.
L'opposition n'avait pas pu participer aux élections en raison d'un durcissement des règles du scrutin. Seules deux formations de la mouvance présidentielle avaient été autorisées à concourir, donnant lieu à un Parlement entièrement acquis au président Talon.
Cette fois, sept partis politiques, dont trois se réclamant de l'opposition, ont été autorisés à participer.
"Nous sommes en train de tourner définitivement les mauvaises pages de notre récente histoire politique. C'est heureux !", a déclaré à la presse locale le président Patrice Talon, après avoir voté dans la matinée à Cotonou.
Pourtant, deux de ses principaux adversaires -le constitutionnaliste Joël Aïvo et l'ancienne Garde des Sceaux Reckya Madougou- sont toujours emprisonnés, condamnés à de lourdes peines.
"Plus trop d'espoir"
De son côté, le ministre chargé de la Défense, Fortunet Alain Nouatin, a appelé la population à sortir "massivement" pour aller voter.
"Toutes les dispositions sécuritaires sont prises pour le bon déroulement du vote", a-t-il affirmé.
Mais à Cotonou, capitale économique, comme ailleurs dans le pays, on ne s'est pas pressé pas pour aller voter.
La PEOSC, qui a mobilisé plus de 700 observateurs sur le territoire, a noté une "faible affluence (matinale) des électeurs" et une "amélioration" dans l'après-midi.
"Les gens n'ont plus trop d'espoir, ils ont peur des magouilles. Ils se disent que c'est inutile", a insisté Bawa Alimiyao, 40 ans, devant une école primaire à Cotonou, son bureau de vote.
"Ce gouvernement m'a déçu, on avait espoir. On attend le changement et on a besoin de députés représentatifs du peuple", a-t-il dit.
Nassirou, 35 ans, a lui aussi voté pour que les "gamins aient des bonnes personnes à l'Assemblée et que les décisions soient prises à l'avantage du Bénin".
Au terme d'une campagne pacifiée, quelque 6,6 millions d'électeurs doivent désigner les 109 députés, dont au moins 24 femmes - au moins une par circonscription - selon le nouveau Code électoral.
"Beaucoup d'électeurs ont eu des difficultés à trouver leurs lieux de vote" et le site de vérification en ligne n'a fait que "planter", a regretté Fadolo Enagnon, électeur de 32 ans, dans la ville de Zagnanado (sud).
Les résultats sont attendus la semaine prochaine.
Les partis qui recueilleront plus de 10% des suffrages se répartiront les 109 sièges, selon le système proportionnel.
"Confiant"
"On est confiant parce qu'on est de la mouvance présidentielle. Tout va bien", a assuré Hamdan Moussa, 22 ans, représentant local du Bloc républicain (BR), parti pro-gouvernement.
Au-delà de la place que se fera l'opposition au Parlement, cette élection revêt une importance particulière: le mandat des membres de la Cour constitutionnelle arrive à échéance au cours de l'année.
Or, la composition de cette Cour, dont quatre membres sont désignés par les députés, les trois autres étant choisis par le chef de l'Etat, pourrait s'avérer capitale dans trois ans.
Elle a notamment pour mission le contrôle des élections, dont les prochaines, les législatives, les municipales et la présidentielle se tiendront toutes en 2026.
Élu en 2016, réélu en 2021, le richissime homme d'affaires Patrice Talon a lancé des réformes politiques et économiques tous azimuts en vue d'engager son pays dans la voie du développement. Mais cette modernisation s'est aussi accompagnée d'un important recul démocratique, selon l'opposition.