Un ancien commandant du groupe rebelle de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) a été reconnu coupable de dizaines de crimes contre l'humanité. Il s'agit d'un moment clé de la justice pour de nombreux Ougandais qui ont souffert pendant des décennies de cette insurrection brutale.
Ouganda : un ancien rebelle condamné pour crimes contre l'humanité
Le verdict tant attendu dans le procès de Thomas Kwoyelo a été rendu mardi par un panel de la Haute Cour siégeant à Gulu, la ville du nord où la LRA était autrefois active. Il s'agit de la première affaire d'atrocité à être jugée par une division spéciale de la Haute Cour qui se concentre sur les crimes internationaux.
Thomas Kwoyelo était accusé de meurtre, de pillage, de réduction en esclavage, d'emprisonnement, de viol et de cruauté. Il a été condamné pour 44 des 78 chefs d'accusation retenus contre lui pour des crimes commis entre 1992 et 2005. La date de sa condamnation n'a pas été précisée dans l'immédiat.
Kwoyelo, dont le procès s'est ouvert en 2019, était en détention depuis 2009, les autorités ougandaises cherchant à déterminer comment rendre la justice de manière équitable et crédible. Human Rights Watch a décrit son procès comme "une rare occasion de rendre justice aux victimes de la guerre de deux décennies" entre les troupes ougandaises et la LRA.
Rébellion
Les procureurs ont déclaré que Kwoyelo avait le grade militaire de colonel au sein de la LRA et qu'il avait ordonné des attaques violentes contre des civils, dont beaucoup avaient été déplacés par la rébellion.
Le chef de la LRA, Joseph Kony, se cacherait dans une vaste zone de brousse non gouvernée d'Afrique centrale. Les États-Unis ont offert une récompense de 5 millions de dollars pour toute information permettant de capturer Kony, qui est également recherché par la Cour pénale internationale.
L'un des lieutenants de Kony, Dominic Ongwen, a été condamné en 2021 par la CPI à 25 ans de prison pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité.
Des milliers d'autres combattants rebelles ont bénéficié de l'amnistie du gouvernement ougandais au fil des ans, mais Kwoyelo, qui a été capturé au Congo voisin, n'a pas eu droit à ce sursis. Les autorités ougandaises n'ont jamais expliqué pourquoi. Les défenseurs des droits de l'homme craignaient que le long délai pour le juger ne constitue une violation de son droit à la justice.
Défis complexes
Son procès a été controversé, soulignant les défis complexes que pose l'exercice de la justice dans une société qui ne s'est pas encore remise des conséquences de la guerre. Comme lors du procès d'Ongwen devant la CPI, Kwoyelo a affirmé qu'il avait été enlevé alors qu'il était jeune garçon pour rejoindre les rangs de la LRA et qu'il ne pouvait être tenu pour responsable des crimes commis par le groupe.
Kwoyelo, qui a nié les accusations portées contre lui, a déclaré que seul Kony pouvait répondre des crimes de la LRA et que tous les membres de la LRA risquaient la mort s'ils désobéissaient au chef de guerre.
La LRA, qui est née en Ouganda d'une rébellion antigouvernementale, a été accusée de recruter des garçons pour combattre et de garder des filles comme esclaves sexuelles. Au sommet de sa puissance, le groupe était connu pour sa brutalité et ses membres ont échappé pendant des années aux forces ougandaises dans le nord de l'Ouganda.
Insurrection
Certains observateurs ont souligné que les commandants militaires ougandais cités dans les abus commis sur les civils pendant l'insurrection de la LRA n'ont pas été traduits en justice.
La LRA a été accusée d'avoir commis de nombreux massacres visant principalement les membres du groupe ethnique Acholi. Kony, lui-même Acholi, est un messie autoproclamé qui a déclaré au début de sa rébellion qu'il voulait gouverner l'Ouganda selon les dix commandements bibliques.
Lorsque la pression militaire a contraint la LRA à quitter l'Ouganda en 2005, les rebelles se sont dispersés dans certaines régions d'Afrique centrale. Le groupe s'est affaibli ces dernières années et les rapports d'attaques de la LRA sont rares.