Sénégal : à Mbour, les jeunes ne rêvent que d'Europe

Des canots pneumatiques débarquent sur un quai de pêche à Mbour, le 13 juillet 2023.   -  
Copyright © africanews
SEYLLOU/AFP or licensors

Mbour, à 80km au sud de Dakar, un important port de pêche au Sénégal. La localité est devenue aussi une plaque tournante de l’immigration clandestine vers l’Europe.

Depuis quelques semaines, les départs pour l'archipel espagnol des Canaries à quelque 1 500km ont repris. Des jeunes en quête d’une herbe plus verte prennent le large.

"En 2020, tout le monde savait que la situation était très difficile ici à cause du coronavirus. Personne n'avait un emploi. Les gens voulaient travailler mais ils ne trouvaient pas d’emploi. Tout ce que l'on pouvait faire, c'était partir. Tout le monde parlait de l'Espagne, de l'Espagne, de l'Espagne. C'est ce qui nous a poussés à partir", explique Ousmane (nom fictif), pêcheur ayant tenté la traversée en bateau en 2020.

Mais ce voyage est loin d’être tranquille. Mercredi, au moins huit personnes sont mortes à Saint-Louis dans le chavirement d'une pirogue. Les risques de la traversée sont connus , les rumeurs de disparitions aussi mais pas de quoi inciter au rétropédalage.

"Je ne ressens rien. Je compatis à la douleur des familles qui qui ont perdu un proche. Quand on est pêcheur, on n'a pas peur. Quand on voit des accidents en mer, on n'a pas peur. Cela peut choquer quelqu'un qui n'a jamais été en mer, mais nous, les pêcheurs, nous n'avons pas peur. On est né ici, on a grandi ici : on ne peut pas avoir peur", raconte Ousmane (nom fictif).

Ces derniers jours, les départs se multiplient depuis le Sénégal. Dakar affirme que 260 Sénégalais "en détresse" ont "été secourus dans les eaux territoriales marocaines" entre le 28 juin et le 9 juillet. Mais les récits- de ceux qui arrivent à bon port nourrissent les envies d'ailleurs.

"J'ai appris à mon enfant à pêcher. Il a commencé à pêcher à 13 ans. Je lui ai appris le métier. Je lui ai offert une pirogue et du matériel. Il a ensuite enseigné le métier à cinq autres personnes. Ils ont travaillé avec lui pendant un certain temps, puis ils sont partis en Espagne. Ils sont revenus en ayant compris quelque chose que mon fils ignorait. Ils son t venus voir mon fils et lui ont dit : "C'est toi qui nous as appris à pêcher. Tu nous as appris le travail que nous faisions ici, alors fais tout ce que tu peux pour venir en Espagne : tu y gagneras ta vie"; explique Mame Elimane Ndoye, pêcheur retraité dont le fils a fait la traversée il y a quinze jours.

"La police et la gendarmerie ne peuvent pas arrêter le phénomène de l'immigration clandestine", assure Mouhamadou Barro, président de la commission migration de la commune de Mbour.

À découvrir également

Voir sur Africanews
>