A Ouagadougou dans la capitale burkinabé, le bar Le Procès fait justice avec humour.
Burkina : traiter des questions sociales autour d'un verre au "Procès"
Co-fondé en 2019, par l’artiste Patrick Kabré, l’établissement en plein air a rouvert ses portes au public samedi, huit jours après le putsch mené par le capitaine Ibrahim Traoré. Et suite à une pause imposée par la saison des pluies.
Ici, les clients commandent leurs boissons auprès d’un barman vêtu en robe de juge rouge et noire, et assistent à des concerts de chanteurs qui abordent les problématiques de la société burkinabé au lendemain du deuxième coup d’état militaire que vit le pays en huit mois.
" Pour nous, il ne s'agit pas de rire ou de se moquer, il s'agit aussi de sensibiliser, de montrer à nos autorités que la justice dans un pays est très importante, il faut toujours rechercher la justice, pas seulement pour les riches, il y a aussi les pauvres, il faut défendre les pauvres. " a expliqué Dao Moumine dit " Le Juge ", gérant du bar " Le Procès ".
Alors que des manifestations se poursuivent, l’ambiance du bar Le Procès donne un air de normalité.
C'est l'une des premières soirées-concerts post-putsch. Chacun s'y raconte les derniers potins, les dernières rumeurs militaires...
"C'est une farce comme ça, il y a des gens qui viennent. La bière c'est "justice", donc ils ont besoin de plus de justice, c'est pour ça qu'on a appelé la bière justice, c'est pour évoquer des points qui ont effectivement provoqué le chaos dans ce pays, ça veut dire justice, ça veut dire aussi impunité." a dit Patrick Kabré, artiste et copropriétaire du bar "Le Procès".
L'idée du bar, ouvert tous les week-ends au fond du quartier Gounghin, est partie d'"un délire" entre copains qui voulaient "évoquer des points qui ont fait le chaos de ce pays: la justice, l'impunité", dit Patrick Kabré.
"C'est par la discussion que nous pouvons susciter une prise de conscience. Aujourd'hui, le pays est confronté à un problème. La solution n'est ni militaire, ni politique. Elle n'est pas seulement militaire, politique ou autre chose. La solution est sociale, nous devons redynamiser le pays ensemble. " a déclaré Ali Kiswinsida Ouerdaogo dit "Doueslik", slammeur.
Théâtre d'une insurrection populaire contre le long règne de Blaise Compaoré en 2014, le Burkina Faso a été touché de plein fouet l'année suivante par les attaques de groupes jihadistes qui, partis du Mali voisin, s'étendaient.
L'instabilité politique a engendré de deux coups d'Etat. Le dernier en date, le 30 septembre, a placé le jeune capitaine de 34 ans, Ibrahim Traoré, au pouvoir du Burkina Faso.