La cybersécurité, un concept assez récent sur le continent africain. Pourtant, l'Afrique subsaharienne est souvent présentée comme particulièrement vulnérable aux attaques en ligne.
La cybersécurité, levier de croissance pour l'Afrique ?
Un paradoxe qui s'explique par les autres urgences auxquelles font face les pays africains analyse Franck Kié, Fondateur et Commissaire Général du Cyber Africa Forum .
Il y a en Afrique d'autres problématiques qui sont quand même aussi assez importantes, des problématiques économiques, des problématiques de santé. Et c'est vrai que la cyber-sécurité n'était pas forcément une priorité pour les dirigeants africains il y a quelques années. Néanmoins, avec l'accélération de la digitalisation, la Covid-19 qui est venue renforcer les usages numériques au quotidien, la cyber-sécurité devient de facto un élément crucial pour nos dirigeants.
Escroqueries en ligne, paiements mobiles, menaces d’attaques d’ampleur... Selon une étude publiée par Deloitte, en 2021, 40% des entreprises africaines ont enregistré "une augmentation du nombre d'incidents", toutes industries confondues.
Toutes les industries sont à risque, mais les cyber-attaquants en général ont plutôt un faible, si je peux dire, pour les institutions financières, pour des raisons évidentes que l'on peut imaginer. Il y a aussi les e-commerces qui sont parfois victimes du cyber-crime. Et puis le secteur gouvernemental qui en fait également les frais. Toutefois, je discute beaucoup aussi avec des clients ou des contacts qui sont dans le domaine de l'industrie, dans l'énergie, dans les services qui font face aussi de plus en plus à des cyber-attaques. Et contrairement à ce que l'on peut penser, les cyber-attaquants sont de plus en plus basées sur le continent et utilisent des méthodes de plus en plus sophistiquées.
Des attaques de plus en plus ciblées qui poussent les pouvoirs publics africains à structurer leur défense numérique.
On critique très souvent le manque de data-centers en Afrique. Parce que quand on parle de souveraineté numérique ici, on dit que l'Afrique n'héberge que 1.3% des data-centers dans le monde.
Mais nous avons un opérateur ivoirien, qui en partenariat avec un opérateur étranger, propose une solution de mini data-center sur cinq hectares et bientôt sur 10 hectares, pour pouvoir justement héberger localement ces données. Donc des moyens commencent à être mis en oeuvre, des opérateurs locaux nationaux commencent à se mettre à la tâche ici. C'est là que cette souveraineté numérique dont on parle prend tout sons sens.
La Cyber-criminalité représente un coût énorme pour le continent africain, 4 milliards de dollars en 2020 . Un chiffre qui serait même en dessous de la réalité.
Quand on voit que la cyber-criminalité peut coûter, quasiment 10 points du PIB africain, je pense que'en luttant contre la cyber-criminalité, en renforçant la protection des données, en ayant cette souveraineté numérique justement, ce delta que l'on peut préserver et protéger peut nous permettre d’être encore pus productifs et d'être un levier de croissance pour le continent africain.
Pour contrer la montée du cyber-crime, Franck Kié appelle à une collaboration entre pays africains. L'implication des jeunes, premiers utilisateurs du digital est aussi une priorité.
Nous sommes très heureux et très fiers aussi de voir l’engouement, l'engagement, de voir des jeunes s'impliquer, prendre leur destin en main pour avoir un réel impact sur l'Afrique de demain.
Et on continuera d'aller encore au plus près et de porter ces enjeux, ces questions de premier plan.
Et l'appel que je veux lancer c'est de demander au décideurs de vraiment faire de la cyber-sécurité une priorité pour leurs organisations.