L'équipe nationale du Qatar ouvre ce dimanche la 22e coupe du monde de l'histoire face à l'Equateur. Parmi les 26 joueurs sélectionnés à disposition de l'Espagnol Félix Sánchez Bas, 14 ont des racines africaines. Une imposante colonie qui ne doit rien au hasard.
Mondial 2022 : un Qatar "made in Africa"
Lorsqu'en décembre 2010, la FIFA choisit l'Emirat pour accueillir le Mondial 2022, la surprise est totale dans le monde du football. Outre les interrogations sur la légitimité d'un si petit Etat d'accueillir le plus grand évènement planétaire, beaucoup s'inquiètent de la compétitivité de l'équipe nationale.
Au Qatar, on compte à peine plus de 2 millions d'habitants et seulement 400 000 disposant de la nationalité qatarienne. Le vivier footballistique est donc extrêmement faible surtout pour espérer concurrencer les plus grandes puissances mondiales ou simplement faire bonne figure dans son propre tournoi.
Rapidement, les dirigeants de la QFA souhaitent s'appuyer sur l'Aspire Academy, une école de football d'excellence basée à Doha qui bénéficie d'infrastructures exceptionnelles.
Le projet Football Dreams est lancé en 2007. Derrière une cause humanitaire, des dizaines d'académies sont créées dans le monde entier et principalement en Afrique. Plus de trois millions de gamins sont ainsi repérés et formés depuis l'âge de 13 ans avec pour objectif de réorienter les meilleurs sur Doha puis de les naturaliser.
Le centre de Saly au Sénégal est celui qui apporte les meilleurs résultats. En 2010, l'équipe nationale du Qatar aligne ainsi une demi-douzaine de Sénégalais dont le regretté Abdou Serigne Thiam , décédé en 2016.
Cela fonctionne aussi dans l'autre sens puisqu'au début des années 2010, les sélections de jeunes sénégalaises ( Moussa Wagué en U20, Ibrahima Diédhiou, Ibrahima Dramé, Fallou Niang et Babacar Niasse au CHAN 2011), maliennes ( Alassane Diallo et Bourama Doumbia ), guinéennes ( Abdoul Karim Conté et Alhassane Soumah 3e de la CAN U17 205) ou nigérianes ( John Felagha champion du monde U20 2013 ou Francis Uzoho au Mondial U17 la même année) regorgent d'Académiciens.
Mais le projet est mis à mal en 2014 lorsque la Fédération Internationale décide de durcir la politique de naturalisation, en partie pour freiner le projet de la QFA. Le Qatar change d'option et se concentre sur les produits de Doha. Dans les faits, la sélection présente pour Qatar 2022 s'appuie surtout sur des binationaux, des enfants d'étrangers employés dans les entreprises qataris.
Les Stars
Deux cracks offensifs tiennent à eux seuls l'équipe du Qatar. Le sélectionneur Félix Sánchez Bas les connaît bien, il s'appuyait déjà sur eux il y a près de dix ans lorsque le Qatar remportait la coupe d'Asie U19 en 2014.
Almoez Ali et Akram Afif sont inséparables et ont mené l'équipe nationale au plus grand succès de son histoire lors de la Coupe d'Asie des Nations 2019.
Almoez , 26 ans, est le meilleur buteur de l'histoire du pays avec 42 réalisations en une centaine de sélections. Il est né à Khartoum au Soudan et a suivi ses parents très jeune sur les bords du Golf Persique. Poli à l'Aspire Academy, passé par tous les clubs satellites en Europe (Linz en Autriche, Eupen en Belgique ou Leon en Espagne), il a été de toutes les campagnes internationales de l'équipe nationale : Copa América, Gold Cup en Amérique Centrale et meilleur buteur et meilleur joueur de cette toute première victoire en Coupe d'Asie 2019.
Son partenaire d'attaque est lui considéré comme le plus grand talent de l'histoire de l'Emirat. Akram Afif est le fils d'un ancien international somalien né en Tanzanie et qui a achevé sa carrière au Qatar. Meilleur joueur de la Confédération Asiatique en 2019, il a évolué en première division en Belgique et en Espagne où il.a été recruté par Villareal.
Capable d'évoluer à tous les postes de l'attaque, il possède un QI foot au dessus de la moyenne et l'a encore développé sous les ordres de Xavi , l'ancien maestro du Barça, entraîneur d'Al Saad entre 2019 et 2021. A 14 ans, son talent lui avait déjà valu des stages dans de grandes écuries européennes comme Manchester City ou le FC Séville.
Le troisième joueur à suivre pendant le Mondial sera le Ghanéen Mohammed Muntari. Né à Kumasi, il a été formé dans l'Académie Golden Lions créée par Nii Odartey Lamptey, un des grands noms de l'histoire des Black Stars. Parti au Qatar à 18 ans, il fait depuis le bonheur d'Al Duhail en compagnie d'Almoez.
Enfin, en défense rayonne Pedro Miguel Carvalho Deus Correia , un Portugais cap-verdien d'origine. Surnommé Ró-Ró en hommage à ses idoles Ronaldo et Romario , il n'évolue pas en attaque comme eux mais en défense. Formé au prestigieux Benfica, il est arrivé dans le Golfe en janvier 2011. Avant de défendre les couleurs du Qatar, il avait porté le maillot du Cap-Vert en jeunes, remportant notamment les Jeux Lusophones en 2009.
Les Soudanais
Comme Almoez , d'autres internationaux qataris ont vu le jour dans la capitale soudanaise, comme le puissant milieu aux origines maliennes Assim Madibo ou le latéral droit Musab Kheder.
D'autres son nés à Doha au sein de familles émigrées de la Corne de l'Afrique pour travailler. C'est le cas du milieu de terrain Abdulaziz Hatem ou du gardien Meshaal Barshim. Le frère de ce dernier n'est autre que Mutaz Essa Barshim , la star du saut en hauteur (triple champion du monde et champion olympique).
Les Algériens
Karim Boudiaf et Boualem Khoukhi n'ont pas grandi au Qatar. Le premier est né en France, à Rueil-Malmaison, d'un père marocain et d'une mère algérienne. Formé à Nancy, il n'est parti au Moyen-Orient qu'à l'âge de 20 ans. Six fois champion du Qatar avec Lekhwiya, devenu Al Duhail, il compte près de 120 sélections en équipe nationale.
Khoukhi a lui passé toute sa jeunesse en Algérie. Formé à la JSM de Chéraga avec un certain Islam Slimani , il est recruté par Al Arabi à l'âge de 19 ans et comme Boudiaf , ce sont ses performances remarquées en Qatar Stars League qui lui offrent l'opportunité de porter le maillot grenat. Sélectionné en équipe d'Algérie U23, il a d'ailleurs mis du temps avant de se laisser convaincre de changer de nationalité sportive.
Les Egyptiens
L'attaquant Ahmed Alaaeldin est né à Ismailia, au Nord-Est du Caire. Il est arrivé au Qatar à l'âge de 10 ans dans les pas de son père, un ingénieur civil, recruté par une grande entreprise basée à Doha. Le buteur d'Al Gharafa a été international à près de 50 reprises.
Mostafa Tarek Meshaal est lui né à Doha. Il est un des derniers venus en équipe nationale. Il évolue au milieu de terrain pour Al Saad et représente le futur de la sélection.